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Qu'est-ce que le populisme ?

Après le score historique du Front National au premier tour des élections régionales, on peut être tenté de se demander : un parti populiste n’est-il pas aussi le parti du peuple ? Au nom de quoi, dans une démocratie, contester le jugement du plus grand nombre ?

C’est pour résoudre ce paradoxe que Platon a proposé, il y a deux mille cinq cent ans, de distinguer la rhétorique de la politique

Dans le célèbre dialogue Gorgias, Socrate se trouve aux prises avec deux sophistes, Gorgias et Polos, célèbres dans l’art de manier les mots et de séduire les esprits. Tous conviennent du pouvoir extraordinaire de la parole – « pouvoir de persuader par ses discours les juges au tribunal, les sénateurs dans le Conseil, les citoyens dans l’assemblée du peuple » ; pouvoir de faire du maître un esclave ; pouvoir aussi de contrôler et dominer l’argent. Ainsi la rhétorique est-elle, incontestablement, le premier des « arts de combat ».

Mais si l’orateur sait produire de la croyance, il se tient éloigné de toute définition du juste et de l’injuste. Sa technique repose ultimement sur la « flatterie ». Si les enfants pouvaient choisir leurs aliments, poursuit Platon, ils feraient confiance au pâtissier et jetteraient des pierres au médecin.

Certes, dira-t-on, mais Platon continue de se placer du point de vue du dirigeant (qu’il soit sophiste ou politique). Qu’est-ce que le populisme, vu… depuis le peuple ?

A cette question, l’historien Pierre Rosanvallon a tenté de répondre dans un court essai de 2011, Penser le populisme. Selon lui, le populisme procède d’une triple simplification : politique, en considérant le peuple comme un « sujet évident » distinct des « élites » ; institutionnelle, en opposant la culture du plébiscite aux structures représentatives ; sociale, en cherchant une « identité » collective là où s’entrecroise une infinité de rapports sociaux.

Le secret du populisme, c’est donc de faire croire au peuple qu’il existe en tant que tel. Alors que, pour reprendre le titre d’un autre livre de Rosanvallon, le peuple dans une démocratie reste par définition… « introuvable ». Il ne faut pas simplifier la démocratie, mais en assumer la complexité !

 
Platon (vers 427 av. J.-C., vers 347 av. J.-C)

Philosophe antique de la Grèce classique, contemporain de la démocratie athénienne. Il est considéré comme l'un des premiers philosophes occidentaux, voire comme l’inventeur de la philosophie. Il reprit le travail philosophique de certains de ses prédécesseurs, notamment Socrate dont il fut l'élève. En savoir plus.
Pierre Rosanvallon (né en 1948)

Historien, sociologue et intellectuel français, occupe depuis 2001 la chaire d'histoire moderne et contemporaine du politique au Collège de France. Ses travaux portent principalement sur l'histoire de la démocratie, et du modèle politique français. En savoir plus.
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