Depuis l’an 2000, le Conseil des arts du Canada a attribué les prix du Gouverneur général en arts visuels et en arts médiatiques à plus d’une centaine d’artistes choisis par leurs pairs pour leur contribution à l’art contemporain canadien. Même si la plupart du temps le prix est remis à une seule personne, les gagnants énumérés ci-dessous ont aussi fait partie des collectifs qui sont à l’origine du mouvement des centres d’artistes autogérés.
Plusieurs, dont Vera Frankel (2006), ont été impliqués dans les CAAs tout au long de leur carrière. Qui plus est, combien d’artistes et de commissaires des centres d’artistes autogérés ont travaillé au Conseil des arts du Canada? Et si l'on inclut les directeurs et coordonnateurs de CAAs repêchés pour diriger et/ou administrer des galeries publiques et des musées, la liste s'avérerait bien plus longue, affirme Clive Roberston.
La reconnaissance des artistes prend différentes formes. Le programme « Résidences internationales » du Conseil des arts du Canada, enraciné depuis plusieurs années dans quelques grandes villes, offrait bien plus que de l’hébergement selon l’artiste Romeo Gongora, dernier récipiendaire du studio de Londres. Dans une lettre au Conseil, il regrette la disparition de ces structures, symboles de réussite pour une longue lignée d’artistes du Canada parvenus à la mi-carrière. Ceci ne veut aucunement dire qu’il faut cesser l’exploration de nouveaux lieux qui seraient susceptibles d'agrandir le réseau. Or, sans analyse, il est difficile de saisir les enjeux de la transformation.
Dans la réorientation stratégique des programmes à l’international, quel rôle sera dévolu aux artistes (qui semblent maintenant devoir tout gérer de A à Z)? Quels rôles occuperont les organismes artistiques soutenus par le Conseil des arts du Canada, notamment les centres d’artistes autogérés, l'édition en art dont les nombreuses revues? Ces structures sont-elles mobilisées? Si oui, de quelle manière?
Anne Bertrand, directrice
actualités
> quoi de neuf dans le réseau?
Voici une liste des récipiendaires du Prix du Gouverneur Général, pour la plupart reconnus individuellement, mais qui ont pris part aux collectifs à l’origine du mouvement de centres d’artistes autogérés au Canada : ______
En 1974, AA Bronson (2002) fonde Art Metropole, organisme dédié à la présentation, à l’édition et à la diffusion des livres d’artistes, de multiples et de vidéos;
Ian Carr-Harris (2007) figure parmi les premiers membres de A Space Gallery (1971), l'un des plus vieux centres d’artistes autogérés au Canada;
Peggy Gale (2006) co-directrice de Art Metropole et directrice générale de A Space (1979-81);
Jamelie Hassan (2001) s'est associée à la Forest City Gallery et le Embassy Cultural House à London (Ontario) dans les années 1970 et 1980; elle y a participé activement avec son conjoint, l’artiste Ron Benner;
Suzy Lake (2016), Bill Vazan (2016), Tom Dean (2012) figurent parmi les 13 membres fondateurs de Véhicule Art (Montréal, 1972); Suzy Lake aura aussi contribué à la fondation de The Toronto Photographers Workshop (Toronto, 1978);
Tanya Mars (2008) participe à la fondation de La Centrale galerie Powerhouse à Montréal en 1973, un des premiers collectifs d’artistes féministes au Canada, et a édité la revue Parallélogramme de 1976 à 1989;
Eric Metcalfe (2008) et Michael Morris (2011) fondent en 1973 le Western Front, un centre d’artistes autogérés à Vancouver;
Edward Poitras (2002) est un des membres fondateurs de Sâkêwêwak First Nations Artist's Collective en 1993;
Suzanne Rivard Le Moyne (2003), en 1973, alors en poste au Conseil des arts du Canada, met en place le programme de subventions des centres d’artistes autogérés;
Tom Sherman (2010) a été commissaire de A Space Video et co-fondateur, avec Lisa Steele (2005), du magazine FUSE;
Lisa Steele & Kim Tomczak (2005) ont co-fondé le V tape artists’ cooperative (Vtape) à Toronto, en 1982;
Paul Wong (2005) a joué un rôle clé dans la fondation de deux centres d’artistes autogérés à Vancouver : Satellite Video Exchange (Video-In) en 1973 et On Edge en 1985.
Thank you, merci, meegwetch - À la mi-carrière, là où je considère être parvenue, je demeure toujours aussi liée au réseau des centres d’artistes autogérés pour toutes sortes de raisons : passer le temps, parler à mes collègues et à d’autres artistes, rencontrer les visiteurs, utiliser les toilettes, l’ordinateur, le téléphone; pour moi, être artiste, c’est comme avoir un emploi. Mon emploi. Au fil des années, j’ai souffert financièrement comme d’ailleurs la plupart des artistes, avec des hauts et des bas : parfois j’ai de l’argent; parfois, je n’en ai pas. Aujourd’hui, j’en ai et je suis très contente.
– Rebecca Belmore, remerciements prononcés à la conférence de presse des prix du Gouverneur général, Montréal, mars 2013.
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Sur la transformation du programme « Résidences internationales »
du Conseil des arts du Canada
Quelques points de vue au sujet de la transformation du programme « Résidences internationales » du Conseil des arts du Canada suite à la résiliation des baux de location dans six grande villes : Paris, Londres, Sydney, Berlin, New York et Santa Fe, au profit d'une plus grande flexibilité.
L'artiste visuel Romeo Gongora, dernier récipiendaire de la résidence à Londres, s'exprime sur ce changement de garde dans une lettre envoyée au Conseil des arts du Canada en janvier, et à l'ARCA le 8 mars dernier, et dont nous publions ici un extrait:
[J]e suis surpris d’apprendre que la nouvelle restructuration du CAC a aboli le programme de Résidences Internationales pour le remplacer par un nouveau programme dès 2016, qui demande à l’artiste de sélectionner son lieu de résidence pour un montant maximum de 20 000 $ incluant les frais d’hébergement. Ce nouveau programme semble donner une grande liberté de choix à l’artiste. Cependant, mon expérience des résidences internationales accumulées depuis dix ans m'amène à me questionner sur l’impact réel à court et à long terme de cette décision :
Les étapes d'entente avec l'organisme seront endossées par l'artiste, ce qui augmentera son travail administratif et réduira son temps de travail en création;
L’artiste sera plus à risque devant les inégalités des structures, car il n’y aura pas un historique de partenariat avec les résidences d’accueil;
Les artistes sans expérience internationale et sans réseau seront défavorisés par le programme;
La réduction du budget alloué aux résidences avec le nouveau programme ne donnera plus accès à des résidences de longue durée telles que la Kunstlerhauss Bethanien (35 500 $ pour 1 an, frais d’hébergement couverts par le CAC), la Acme Studios (23 500 $ pour 6 mois, frais d’hébergement couverts par le CAC), etc.;
La limitation de budget favorisera des résidences de courte durée défavorisant des projets artistiques en profondeur et la création de collaboration;
Les artistes aux pratiques et carrières établies et/ou avec un réseau international sont ceux qui seront particulièrement favorisés pour des résidences de qualité; L'impact défavorable sur les organismes de résidences internationaux, dont plusieurs fonctionnent par entente bilatérale, perdront une méthode stable de financement. (R.G.)
Artist-Run Centres and Collectives Conference wishes to thank the Canada Council for the Arts for its support. / La Conférence des collectifs et des centres d’artistes autogérés reconnaît l'appui financier du Conseil des arts du Canada.
