Après un parcours académique impressionnant, Nic Kirkman est finalement revenue à ses passions de toujours : la peinture et le dessin. Désormais artiste à plein temps, elle enseigne également les arts plastiques à la Peninsula Arts Society et à la Dromana Community House, toutes deux sur la Péninsule de Mornington. Nic nous donne un aperçu de son parcours et nous explique notamment le rôle joué par son installation en Australie dans sa transformation professionnelle.

Melbourne Accueil : Physique théorique, astrophysique, architecture, résistance des matériaux… Vous avez passé de nombreuses années en milieu universitaire, où vous avez notamment obtenu votre doctorat de physique après un parcours varié et ambitieux. Pourquoi une telle frénésie intellectuelle ?

Nic Kirkman : Initialement par curiosité intellectuelle, ensuite parce que je me suis aussi retrouvée dans des environnements extrêmement compétitifs ; je pense notamment à mes études d’architecture (faites en parallèle avec celles de résistance des matériaux), où chacun essayait de montrer aux autres ce dont il était capable, le tout en dormant le moins possible ! Jusqu’au moment où cela a eu des conséquences sur ma santé. Par la suite, en réfléchissant à la nature du métier d’architecte sous l’angle de la responsabilité professionnelle, j’ai compris que cela aurait été une source d’inquiétude permanente pour quelqu’un d’aussi perfectionniste que moi. Je me suis donc davantage ouverte aux sciences humaines, notamment au travers du métier de tuteur pour adultes dyslexiques, que j’ai exercé jusqu’à mon arrivée en Australie, en 2012.

Votre entourage remarque vos qualités artistiques dès votre plus jeune âge. Pourquoi ne pas avoir « simplement » suivi cette voie à partir de là ?

J’avais 7 ans lorsque j’ai peint mon premier portrait reconnaissable de quelqu’un. Cela dit, mes parents n’ont jamais considéré qu’on pouvait subvenir à ses besoins matériels par la peinture. J’ai toujours dessiné et peint avec passion, mais cela ne m’était jamais venu à l’idée que je pourrais un jour devenir une artiste. Rétrospectivement, je m’aperçois pourtant que la partie artistique de mon activité a toujours été extrêmement importante pour moi ; par exemple, la chose que j’ai préférée dans la rédaction de ma thèse de doctorat a été la réalisation d’illustrations avec WordArt !

L’autre défi auquel j’ai dû faire face est la dyslexie puisque je suis moi-même dyslexique. L’étude de ses mécanismes dans le cadre de l’apprentissage de mon métier de tuteur m’a aidée considérablement à comprendre le fonctionnement de mon cerveau, et accessoirement… à boucler ma thèse. Plus généralement, cela m’a donné des connaissances et un surcroît de confiance en moi qui ont ensuite ouvert la voie à des choix de vie beaucoup plus personnels.

Justement, quel a été le déclic ? Et en quoi l’expatriation a-t-elle été importante dans ce processus ?

Mon parcours a été influencé par des rencontres et des lectures, notamment autour des concepts de pleine conscience, de vulnérabilité et du sens de la vie en général. J’ai fini par accepter le fait que l’on avait le droit d’exprimer ses émotions artistiquement et que certaines choses pouvaient rester parfaitement indicibles. Parallèlement à ces réflexions, il y avait des aspects fondamentaux de mon activité professionnelle que je voulais changer, notamment en termes de mode de vie et de contrôle du fruit de mon travail. Et en déménageant du Royaume-Uni en Australie, je suis passée d’un environnement où chacun tend à rester à sa place et agit avec retenue, à un environnement où tout paraît possible à qui se donne la peine d’être le véritable maître à bord. J’ai aussi rencontré ici beaucoup de personnes ravies de m’aider dans mon projet professionnel.

Cela dit, si ce tournant de ma vie professionnelle a fini par s’imposer de lui-même, tout n’a pas été simple. Il y a par exemple une grande différence entre peindre uniquement quand l’inspiration vous vient naturellement et pour votre propre plaisir, et passer chaque jour 5 à 8 heures d’affilée pleinement concentrée sur une seule peinture. Le travail d’Elizabeth Gilbert m’a aidée à comprendre l’importance de maintenir une curiosité et une discipline professionnelle, qui se sont révélées précieuses au moment de saisir les opportunités qui se présentaient à moi.

Enfin, pour ce qui est de l’enseignement, je ne me lasse jamais d’observer l’effet produit par l’art sur autrui: voir des personnes, dont certaines ont peu confiance en elles, apprendre la peinture ou le dessin, laisser s’exprimer leur créativité grâce à leurs nouvelles connaissances, et tout à coup, se libérer au travers de leurs propres réalisations artistiques… tout cela est une source abondante de bonheur absolu !

Dans un parc, un petit garçon demande à un vieux monsieur :
- Bonjour monsieur, pourriez-vous m'ouvrir la grille du parc, s'il vous plaît ?
- Bien sûr, mon petit, tu es très bien élevé, dis-moi! Quand tu seras plus grand, tu verras, tu pourras ouvrir la grille tout seul.
- Oui, monsieur, surtout que la peinture aura séché d'ici là.