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Bonnes vacances !

Selon un récent sondage OpinionWay, trois quarts des Français prendront des vacances cet été. L’occasion pour beaucoup de « faire une pause ». Mais que fait-on exactement quand on ne travaille pas ? La vie devrait-elle ressembler à nos vacances ?
 
Nous avons souvent l’oisiveté honteuse, et à peine nos valises posées cherchons des ruines à visiter, des panoramas à découvrir, des châteaux de sable à bâtir. N’est-ce pas l’inquiétant symptôme d’un renoncement à notre droit le plus précieux, apanage de notre humanité : le droit à la paresse ? Paul Lafargue, gendre de Karl Marx et figure historique du socialisme, en avait fait le thème d’un pamphlet bien connu des indolents. Sans surprise, il y vantait les Grecs qui « n’avaient que du mépris pour le travail : l’homme libre ne connaissait que les exercices corporels et les jeux de l’intelligence ». Les Romains, quant à eux, ne tolérèrent l’activité marchande (negotium) que dans la mesure où elle permettait de se livrer à des occupations supérieures : les loisirs (otium), moyen d’entretenir le corps et l’esprit. Condamnant le « droit au travail » et autres « phtisiques droits de l’homme », Lafargue imagine des réjouissances populaires qui « feront aller les flacons, trotter les jambons et voler les gobelets ». Les vacances, c’est la vie.

Redoutant l’ennui autant que le travail, Lafargue précise qu’ « en régime de paresse, pour tuer le temps qui nous tue seconde par seconde, il y aura des spectacles et des représentations théâtrales toujours et toujours ». Comme s’il fallait à tout prix se divertir, ne pas laisser une seule seconde libre et incertaine. Le paradoxe des vacances, c’est celui de la vie : une recherche perpétuelle de la distraction, souvent bien plus exigeante et harassante qu’une journée au bureau. Finalement, on ne travaille jamais autant que pour ne rien faire.

Ce que Pascal avait noté mélancoliquement dans sa célèbre Pensée 136 sur le divertissement  : « tout le malheur des hommes vient d'une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer en repos dans une chambre ». Après une heure de détente, c’est la course aux « activités », dûment promues dans nos lieux de villégiature, et la quête aux « problèmes », merveilleuse occasion de renouer avec les conflits qui nous manquent déjà. On tue le temps pour ne pas penser au temps qui tue, à la certitude de la mort et à la vanité des affaires. Les vacances sont le triste reflet de notre existence : « Ainsi s'écoule toute la vie, conclut Pascal ; on cherche le repos en combattant quelques obstacles et si on les a surmontés le repos devient insupportable par l'ennui qu'il engendre. Il en faut sortir et mendier le tumulte. »
 
Bonnes vacances à tous !

Blaise Pascal (1623 - 1662)

Mathématicien, physicien, inventeur (notamment de la première machine à calculer), philosophe et théologien français. Dans ses Pensées, publiées en 1669, après sa mort, il développe une défense de la religion chrétienne contre les sceptiques et les libres penseurs (après avoir assisté, selon la légende, à une guérison miracle). En savoir plus.

Paul Lafargue (1842 - 1911)

Journaliste, économiste, écrivain et homme politique socialiste français. C'est durant son incarcération en 1883 pour propagande révolutionnaire qu'il rédige le Droit à la paresse, son ouvrage le plus connu. Il est également l'auteur d'un Cours d'économie sociale (1884) et du Socialisme et la Conquête des pouvoirs publics (1899). En savoir plus.
Time To Philo est illustré par Daniel Maja.
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