Il y a de très bonnes vannes dans ce premier special de Ricky Gervais pour Netflix. A propos d’un fondamentaliste chrétien : «il aime surtout Dieu... et les fœtus. Il aime les fœtus depuis la conception jusqu’à ce qu’il découvre qu’ils sont gays.» Tout un passage sur sa volonté de ne pas avoir d’enfants est une merveille de mauvais esprit. Seulement, ces passages ne sont pas vraiment au cœur de ce premier spectacle en sept ans du Britannique.
Non, la cause défendue tout au long d’Humanity par Gervais, c’est celle de la liberté d’expression. «On peut rire de tout, tant qu’on le fait bien», semble signifier l’humoriste, revenant pendant vingt longues minutes sur une vanne sur Caitlyn Jenner prononcée aux Golden Globes en 2016 et jugée transphobe par certains. Si la déconstruction de la blague est juste, et la séquence qui suit flirte plus ou moins habilement avec le malaise, Gervais refait une référence, révélatrice, à Caitlyn Jenner plus tard dans le spectacle. Lors d’un passage sur ses couilles de quinqua qui flottent quand il prend un bain (oui, c’est fin comme du Bigard), il conclut par un «testez ça chez vous si vous avez plus de 50 ans. Et que vous êtes un homme évidemment. Ou Caitlyn Jenner.» En plus de faire un bide, cette vanne paresseuse lâchée négligemment annule tout ce qu’il a exposé précédemment.
Ce n’est pas le seul défaut du Ricky Gervais d’Humanity : son mauvais esprit est seulement mis au service d’un ego hypertrophié. Il se rêve en pourfendeur exemplaire du politiquement correct, ce qu’il pourrait être si certains passages de son spectacle - une intro assez naze d’imitation de chiens notamment - n’étaient pas extrêmement faiblards. Dans le même genre, on préférera par exemple un Anthony Jeselnik aux one-liners sardoniques tirés au cordeau. Surtout, Ricky Gervais passe un bon quart de ce spectacle à raconter les réparties qu’il a eu sur Twitter et comme le résume brillamment Matt Zoller Seitz dans Vulture : «raconter à des étrangers une description point-par-point d’une dispute que vous avez eu sur les réseaux sociaux tout en vous faisant passer à la fois pour une victime et pour un héros est l’une des choses les plus chiantes qu’un être humain puisse faire.»
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