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(D.R.)

       Auditeurs sachant auditer,


       Voici des nouvelles et voilà des rappels, 

 

- Des nouvelles


       Nous continuons à vous proposer chaque semaine des badas d’un genre nouveau : à la place des enregistrements de nos échanges avec le public de l’École alsacienne, ces suppléments nous ont conduits de Mulhouse à Marseille, avec Richard Werly. Journaliste à Moscou, Etienne Bouche a répondu à nos questions sur la pandémie et sa gestion en Russie. Depuis Tokyo, Karyn Nishimura a dépeint les réponses japonaises à la menace du Covid-19 et nous venons de mettre en ligne, ce jeudi 30 avril, un entretien sur la situation au Royaume-Uni avec Sylvie Bermann, qui y a représenté la France pendant trois ans.

       Nous continuerons à ce rythme à nous intéresser à ce qui se passe ailleurs : rien ne serait plus incompréhensible que de traiter d’une crise planétaire du seul point de vue de notre clocher.

       A ces badas (un auditeur m’écrit : « en lisant un livre sur l’histoire de l’Islam (de Sabrina Mervin), j’apprends, page 156, que la théorie du « badâ’ » désigne, pour le chiisme duodécimain, la possibilité pour Dieu de changer d’avis »), à ces badas donc, s’ajouteront deux épisodes d’un Kitafétoi avec Michelle Perrot. Dans le premier, en ligne le lundi 4 mai, c’est l’historienne du mouvement ouvrier que j’interroge. Son enfance à Paris entre Les Halles et l’ancienne Cour des miracles devenue le Sentier, sa formation d’historienne sous la direction d’Ernest Labrousse, son passage du catholicisme social au parti communiste sous la houlette de François Furet, puis au PSU, ses amitiés de jeune professeur avec les historiens Jacques et Mona Ozouf et avec la biologiste Nicole Le Douarin, la vie dans Caen dévastée après le débarquement, sa collaboration avec l’ancien instituteur Jean Maitron, anarchiste inventeur du dictionnaire biographique du mouvement ouvrier et tant de rencontres mémorables Pierre Vidal-Naquet, Annie Kriegel... Dans le second entretien, en ligne le lendemain, mardi 5 mai, c’est la pionnière de l’histoire des femmes qui répond à mes questions. Elle évoque les premiers pas de cette nouvelle discipline sous l’œil tantôt réprobateur, tantôt paternaliste et tantôt enthousiaste de ses collègues universitaires, l’ambiance tonique de Jussieu, les premières conférences qui virent la discipline s’organiser avec Andrée Michel, Pauline Schmitt et Fabienne Bock, l’influence des féministes américaines, l’apparition du concept de genre. Elle se remémore aussi ses travaux sur la prison, sa rencontre avec Michel Foucault, la difficile confrontation des points de vue entre l’auteur de « Surveiller et punir » et Maurice Agulhon, grand connaisseur des institutions de la République, elle brosse le portrait de Georges Duby, qui fut pour elle un soutien précieux, ainsi que d’autres historiens comme Jacques Le Goff, Jacques Revel, François Furet ou de l’anthropologue Françoise Héritier. Je vous souhaite de prendre à l’entendre le même plaisir que j’ai eu à l’interroger.             

 

- Des rappels :

       Notre dernière émission en ligne « Repartir, mais de quel pied ? » a réuni Nicolas Baverez, Jean-Louis Bourlanges, David Djaïz, Nicole Gnesotto et Lionel Zinsou. Dans notre prochaine conversation, en ligne dimanche 3 mai, Béatrice Giblin, Marc-Olivier Padis, Lucile Schmid et Richard Werly discuteront de la différenciation territoriale qui présidera au prochain (?) déconfinement et de la dialectique entre urgence climatique et reprise économique.

       En soutenant notre podcast, vous bénéficiez d’une déduction fiscale de 66% si vous êtes un particulier et de 60% si vous êtes une entreprise. Seule l’association « J’Aime l’info » est habilitée par le ministère des finances à délivrer l’attestation de don qui ouvre droit à abattement d’impôt. Toutes vos contributions au financement du Nouvel Esprit public, qu’elles viennent par chèque ou par internet, transitent par cette association agréée et c’est elle qui, dans les semaines qui précèdent la date de déclaration des revenus vous adressera le précieux document. J’Aime l’info est gérée par le Syndicat de la Presse Indépendante d’Information en ligne.

       Le Bloc-notes de cette lettre est assuré par le dernier arrivé dans notre équipe, David Djaïz . Né en 1990 à Agen, il est ancien élève de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm (où il est entré cacique en 2010) et de l’École nationale d’administration. Titulaire d’un master 2 de philosophie politique de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, il a conduit des recherches sur la genèse de la théorie politique moderne (Hobbes, Machiavel). En 2017, il a publié son premier livre, 
La guerre civile n’aura pas lieu (éd. du Cerf), dans lequel il confronte le défi de ce djihadisme né et grandi en France aux différentes approches philosophiques de la guerre civile et du dissentiment. En 2019, il a publié un second essai, Slow Démocratie, dans lequel il réhabilite le rôle de l'État-nation pour répondre aux défis posés par la mondialisation. Il enseigne depuis 2017 à Sciences Po l'histoire des idées politiques et la philosophie politique au sein du programme « Humanités politiques ». Écrit au tout dla pandémie, il analyse, sous le titre « Ce que Netflix nous dit de la mondialisation qui vient », la confrontation entre la mondialisation et la renaissance du « national » à la fois sur le plan politique, économique et culturel. On voit qu’il n’a donc rien perdu de son actualité.


Cordialement,

Philippe Meyer. 

LES BRÈVES DE DIMANCHE DERNIER

Philippe Meyer


Fortune

Je voulais simplement dire tout le bonheur que j’ai à relire Conrad en ce moment, et particulièrement « Fortune » si je dois n’en conseiller qu’un.


EN SAVOIR PLUS

Nicole Gnesotto

Les mondes polaires


Je vais pour ma part vous recommander un livre sinon exotique, en tous cas dépaysant. Il s’agit d’un dictionnaire sur les mondes polaires, paru récemment aux puf. C’est une somme de deux dictionnaires stratégiques, l’un sur l’Arctique, l’autre sur l’Antarctique. C’est absolument fascinant, sans compter qu’en plus ce sont des zones où l’on se confine en plein air.

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Lionel Zinsou
 

Hommage à Manu Dibango

J’aimerais rendre hommage à Manu Dibango, qui nous a quittés il y a peu. Cet immense musicien, mondial et Camerounais était autodidacte, il avait appris seul tous les instruments, y compris le saxophone dont il était devenu l’une des illustrations mondiales. Il est mort du Covid-19 ; l’Afrique et le reste du monde sont en deuil.


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Nicolas Baverez
 

Exposition Pompéi chez vous

Je voulais vous recommander d’aller sur le site du Grand Palais, pour y voir l’exposition virtuelle sur Pompéi. C’est piloté par le Pr. Ossana, qui est à la fois le commissaire de l’exposition et le directeur général du parc archéologique de Pompéi, et c’est absolument formidable. On peut visiter virtuellement des bâtiments reconstitués et voir les dernières découvertes, ainsi que les dessins des pensionnaires de la Villa Médicis au XIXème siècle. Ils sont présentés en contrepoint de cette réalité virtuelle.


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David Djaïz
 

Mémoires du général de Gaulle

Je voulais vous recommander les mémoires du général de Gaulle, qui viennent de ressortir en Pléïade, Mémoires de guerre et Mémoires d’espoir.Au delà du fait qu’il s’agit d’un très grand texte littéraire, écrit dans cette belle langue classique qu’affectionnait le général, cela se lit comme une formidable épopée, qui répond à des questions très contemporaines : comment remonter la pente et sauver l’honneur, quand on pense avoir touché le fond ? J’ai lu ça avec délectation.


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BLOC-NOTES
Par David Djaïz

CE QUE NETFLIX NOUS DIT DE LA MONDIALISATION QUI VIENT



    Les années 1980 furent dominées par une vision quasi théologique faisant de la mondialisation un phénomène irréversible, une nouvelle raison dans l’histoire qui balaierait bientôt les frontières nationales. Le commerce international ne cessant de progresser, ainsi que l’intégration financière, il devait en aller de même de la culture. Les années 1980-1990 ne furent-elles pas celle du succès éclatant des firmes américaines comme Disney qui imposaient leurs productions au monde entier ? Le modèle économique de ces entreprises reposait, et repose encore, sur un principe simple, bien expliqué par Nassim Nicholas Taleb dans The Black Swan : la scalabilité. La même unité de travail peut être vendue 10 fois, 1 000 fois ou un million de fois sans que les coûts de production n’augmentent au même rythme. Passer d’un public local ou national à un public mondial ne demande pas beaucoup plus de travail à un cinéaste et à sa boîte de production, mais laisse espérer des gains démultipliés. C’est exactement le modèle économique sur lequel s’est construit Hollywood : une hyper-concentration du capital, des plateaux techniques, des décors, des compétences à Los Angeles… mais une diffusion en mondiovision de ses « créations ». Dans les années 1980, Hollywood écrasa tout sur son passage. Les pays qui ne surent pas protéger leurs industries culturelles, à commencer par le cinéma, en firent douloureusement les frais. On sait ce qu’il advint du cinéma indépendant portugais, espagnol, italien et même britannique face à cette déferlante.

    Seulement, depuis quelques années, la mondialisation uniformisante a atteint un plateau tant sur le plan économique que culturel. Et, sans qu’il soit possible de parler de démondialisation, un freinage pourrait s’amorcer. Sur le plan économique, c’est indéniable : le commerce international, après une phase de croissance rapide, comprise entre 8 et 10 % durant les années 1990 et 2000, semble avoir atteint son point d’infléchissement : il ne croît plus depuis 2015 « que » de l’ordre de 2 ou 3 %. Bien sûr, la résurgence des nationalismes, la crise terminale de l’OMC, et la perspective d’une guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine expliquent ce tassement. De surcroît, la conversion des opinions publiques à l’impératif de la transition écologique pourrait demain renchérir les coûts de la délocalisation, avec la taxation du fioul maritime ou le ralentissement de la vitesse des navires de fret. La propagation spectaculaire du coronavirus montre enfin à quel point nous sommes vulnérables dans la mondialisation et pourrait accélérer le mouvement de freinage, avec la possible relocalisation d’actifs stratégiques dans le domaine de la santé, comme l’atteste la décision de Sanofi de rapatrier une partie de sa production en France.


    Mais plus largement, ce virage de la mondialisation s’explique par la résurgence du fait national dans l’économie, la politique, la technologie et… la culture. Sur le plan culturel, la stratégie du nouveau géant Netflix consistant à financer les productions des meilleurs scénaristes et réalisateurs dans chaque pays, afin de toucher non seulement le marché local mais aussi le marché international, estfinalement emblématique du virage que prend la mondialisation. Après l’ère du « tout-Global » (1980-2016), voici une nouvelle articulation du national et du global : Netflix tire profit des spécificités culturelles de chaque nation, non pas seulement pour satisfaire les goûts folkloriques d’un public local, mais pour en faire un produit d’exportation. Les nations reviennent en force, mais dans un jeu d’interdépendances inédit : la frontière entre « l’intérieur » et « l’extérieur » est beaucoup plus perméable. Mieux : l’intérieur se nourrit désormais des représentations que l’extérieur projette sur lui. Les « créations françaises » financées par Netflix sont en réalité des créations « hyperfrançaises » qui entrent en résonance avec les images d’Épinal qu’ont de la France les consommateurs mondiaux de contenus culturels. L’accent se trouve mis sur quelques « hyperlieux » (comme le Vieux Port dans la mauvaise série « Marseille »…) ou quelques « hyperproduits » (comme le béret-baguette), censés incarner la quintessence de la culture française… alors qu’ils ne sont en fait que des produits de l’imaginaire « touristiques » de ces consommateurs étrangers d’hyper-France. Et si le stade ultime du développement de la mondialisation était justement atteint dans la renaissance du « national » à la fois sur le plan politique, économique et culturel, mais un fait national pleinement mondialisé, c’est-à-dire d’emblée posé comme un produit d’export ? Ce n’est qu’une hypothèse de travail, mais si elle se vérifie dans les faits, Netflix aurait une sacrée longueur d’avance sur ses concurrents Gaumont et Disney. En attendant, en 2019, les créations hollywoodiennes caracolaient toujours en tête du box-office français…

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