Au menu de ce deuxième épisode de la saison 2019-2020, le nouveau spectacle de Bill Burr, qui, s'il ressemble en certains points à celui de Dave Chappelle critiqué dans le dernier numéro, s'avère plus empathique et réjouissant. Egalement au programme, les parodies de vidéos Brut par le talentueux Bertrand Usclat, une chasse au trésor un peu spéciale sur YouTube, et le nouveau talk-show d'Anthony Jeselnik sur Comedy Central.

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U«Le nouveau spectacle de Bill Burr vaut bien mieux que ses quatre premières minutes», a titré Vulture dans sa critique du dixième special du comédien américain, le cinquième pour Netflix, tourné cette fois au Royal Albert Hall à Londres. On approuve : n'ayant jamais été particulièrement réceptif au style colérique de l'humoriste vétéran, tout en lui reconnaissant une qualité d'écriture digne des meilleurs, on est arrivé dans ce Paper Tiger avec l'impression de voir une mauvaise caricature de lui-même. S'attaquant de manière plus ou moins subtile au mouvement #MeToo ou à Michelle Obama, Burr ponctue de rires gras ses attaques de troll auto-satisfait.

Cette introduction semble en réalité uniquement servir de pare-feu : dans le contexte actuel, hyper polarisé, l'humoriste choisit son camp dans les premières minutes pour ne pas avoir à y consacrer son spectacle entier. Passage obligé. Car la suite se révèle plus empathique et introspective. Récent papa, pour la première fois, d'une petite fille, Burr raconte ses disputes de couple «où c'est toujours sur moi qu'on travaille» : «ma femme est évidemment ce chef-d'œuvre sous verre exposé dans un musée, et moi cet immeuble perpétuellement en construction, avec un échafaudage depuis six ans». L'écriture est fine, notamment lorsqu'il évoque un débat sur l'appropriation culturelle avec sa compagne noire, devant un documentaire sur Elvis, ou sur la dernière partie consacrée aux robots, avec une attaque parfaitement gratuite et hilarante sur feu Stephen Hawking.

Surtout, au cœur de ce Paper Tiger, on n'est pas loin de déchiffrer l'humoriste : pour une fois, sa comédie se retourne sur son personnage d'homme perpétuellement en colère. «Mon père avait ce trait de caractère : il n'aimait pas la joie» : la rage se transmet dans son arbre généalogique. «J'ai tout essayé : la méditation, porter des pulls, prendre des bains». Sa seule solution est sous nos yeux : le stand-up comme exutoire de cette passion incoercible.

Un boucher anti-vegan, un policier de l'IGPN ou un néo-nazi victime de racisme anti-blanc : les personnages que choisit Bertrand Usclat (de la talentueuse bande des Yes vous aime) sont pour beaucoup dans le fait que ses parodies de Brut sont autant partagées, et à raison. Renouvelant les archétypes des personnages comiques issus de l'actualité, dans la lignée des Inconnus ou du Palmashow, ces pastilles face caméra tournent en dérision aussi bien les écolos un peu trop instagrammables (une parodie directe d'une vidéo Brut) que des électeurs de Patrick Balkany. Agile.

Une aventure interactive au plus profond du sac de courses : ce qui commence comme une parodie de ces «haul videos» où des Youtubeurs dévoilent ce qu'ils ont ramené du Lidl devient subitement une épopée à la recherche d'un trésor mystérieux. Une sorte de très artisanal Bandersnatch (l'épisode de Black Mirror dont vous étiez le héros) réalisé, pendant leurs vacances on présume, par Camille Fievez de Glamouze et Babor Lelefan. Vertigineux.

Six ans après The Jeselnik Offensive, un premier talk-show basé sur l'actualité, Anthony Jeselnik revient sur Comedy Central dans un format de 20 minutes orienté vers la comédie. Good Talk tend ainsi vers le podcast de conversation avec des confrères humoristes. Le casting est attirant : Nick Kroll (Big Mouth) dans le premier épisode, Kristen Schaal (Flight of the Conchords) dans le deuxième. Un peu bancal, notamment à cause de son présentateur, qui semble malgré son arrogance habituelle peu à l'aise dans l'exercice de l'interview, le talk-show reste plaisant à regarder que ce soit pour certaines réparties brillantes d'humour noir de Jeselnik, pour les compilations moqueuses de vannes éculées de stand-uppeurs nuls, ou pour son intérêt non feint pour la technique comique.