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Sujets LGBTI :
En finir (là aussi) avec le racisme

Déprimé•e par l’actualité ? Le racisme qui s'invite dans les médias, chaque jour plus décomplexé ? Nous aussi. 

Du racisme, parlons-en donc. Quel rapport avec les questions LGBTI+ ? Tout à voir. Rappelons que la lutte contre les LGBTIphobies s’est catalysée dans les mains de femmes trans noire et latina jetant des pavés sur la police, Marsha P. Johnson et Sylvia Rivera.

Et pourtant, l’histoire et la représentation de la lutte subit régulièrement des remix javellisés. On croirait que les seules identités LGBTI+ possibles seraient blanches, comme si les personnes racisées, sans-papiers, de banlieues, et hors de l’Occident, étaient dans des impasses hétérosexuelles. Quelle vision obtuse, triste et erronée !

Il faut rappeler que l’homophobie est une création en grande partie occidentale, qui s’est propagée à travers la colonisation du monde. La diversité de genre et sexuelle a existé et existe hors de l’Occident et de ses modèles de pensée. L’arrivée des colons, des prêtres et les politiques impérialistes européennes ont une part non-négligeable dans les attitudes homophobes qui s’y sont implantées. Leur effets sont encore ressentis aujourd’hui et il est de notre devoir de les mettre en lumière.

Notre travail nous demande de nommer les choses. Il nous faut utiliser les grands mots pour parler de la réalité des mots et des actes : islamophobie, racisme, et sans guillemets. 

Racistes et islamophobes, le rejet, la discrimination, l'exclusion des femmes qui portent le voile en France. Un racisme qui se cache derrière le mot de "féminisme" pour contrôler le corps des femmes. Contrôler mais pas protéger : à l'heure où sont écrites ces lignes, 129 féminicides ont été perpétrés en France cette année.

Et l’on ferait bien de tendre l’oreille : les politicien•nes n'hésitent pas à brandir les droits des personnes LGBTI+ comme argument pour opposer Occident soi-disant tolérant et musulmans, arabes ou noirs soi-disant LGBTIphobes. Alors que nos droits sont loin d'être acquis dans cet Occident où nous sommes encore victimes de violences diverses.

Ne tombons pas dans une ritournelle historique, cherchons la contradiction, les complexités. Un exemple : l’Iran. Quand les journalistes parlent d’homosexualité en Iran, on résume cela aux lois qui la criminalisent. Saviez-vous que la sodomie était illégale au Canada au niveau fédéral jusqu’en 2016 ? La loi n’était juste plus valable au niveau des provinces et presque plus appliquée. Il ne suffit pas de citer ces lois ou des chiffres à l’échelle du pays. Les réalités de l’homophobie dans un pays donné, en France comme en Iran, varient, et l'application des lois ne se fait pas de tout temps et partout pareil. 

Ces mêmes raccourcis, cette distance avec le réel, se retrouvent dans la couverture des identités LGBTI+ en banlieues, notamment des LGBTI+ noirs, arabes et musulmans. Souvent stéréotypées comme des identités incompatibles, elles ont pourtant droit, aussi, à une couverture informée, juste et qui va chercher la complexité et la nuance.

L’AJL va bientôt actualiser son guide en cet honneur. Vous y trouverez de quoi réfléchir aux présupposés antagonismes de l’homosexuel des villes et de l’homophobe des banlieues, des identités LGBTI+ et de l’islam, etc. 

Ce futur chapitre ne se veut ni exhaustif, ni un remède à tous les maux. Le mieux, c’est encore d’embaucher des personnes LGBTI+ racisé•es, de banlieues, ou de payer un journaliste connaissant le terrain sur place. L’effort, c’est bien, la présence des personnes concernées, c’est mieux !

Au boulot !

Revue de presse

On vous encourage à lire
Paroles de concerné•es. Une femme célibataire, une femme trans, un couple de femmes lesbiennes, une femme lesbienne infertile, un jeune garçon, fils de deux mamans lesbiennes né grâce à une PMA... À l'occasion des débats au sujet de la loi bioéthique et de l'ouverture de la PMA aux femmes lesbiennes et célibataires, Terrafemina a donné la parole avec une série de témoignages aux premièr•es concerné•e•s.
 
Mode et beauté. Le magazine Elle a choisi pour la couverture de son numéro du 11 octobre Valentina Sampaio, première mannequin trans de Victoria's Secret. De son côté, l'édition du 1er novembre de M, le magazine du Monde mettait à l'honneur la "beauté en tous genres". Si l'article de Zineb Dryef met en lumière les avancées obtenues par les personnes trans en matière d'inclusivité dans le monde hyper-normé qu'est l'industrie de la beauté, il en expose également les limites. Corps "normés", injonction au "passing", invisibilisation et musellement des personnes racisées, absence d'hommes trans, récupérations : la journaliste montre, notamment par les voix de la mannequin trans Munroe Bergdorf et des sociologues Karine Espineira et Sam Bourcier que, malgré l'ouverture souvent affichée, dans le monde du luxe comme ailleurs, le combat est loin d'être terminé. 

"Je suis drag-queen et alors ?" L'édition Dordogne de Sud-Ouest nous présente Gigi, drag-queen récemment installée à Périgueux. L'occasion de découvrir la discipline ainsi que le collectif LGBT Dordogne. Le Mag de Sud-Ouest s'intéressait aussi à la scène drag dans son édition du 27 septembre, avec un portfolio consacré à l'association bordelaise Maison Éclose.

Maire lesbienne. Le dimanche 27 octobre, Claudia Lopez devenait la première femme et la première personne homosexuelle a être élue maire de Bogota, capitale de la Colombie. Une bonne manière de mesurer les avancées en matière de visibilité, puisque de nombreux médias français n'ont pas hésité à employer le mot "lesbienne" dans leurs titres et dans leurs colonnes. 
 

 


On vous encourage à voir
 
PMA décodée. Avec pédagogie, humour et l'éclairage de Sophie Zadeh, maîtresse de conférence, Les Décodeurs du Monde posent la question "PMA : faut-il un papa et une maman ?" et tordent ainsi le cou à de nombreuses idées reçues concernant la parentalité.
On est déçu•e•s
Biphobie. Dans sa chronique du 20 octobre dans Le Monde, Maïa Mazaurette se penche sur ces gens "compliqués" que sont les bi•es. D'une plume pleine de condescendance envers ses lectrices et lecteurs, elle répète crûment les clichés dont iels font les frais, au prétexte de les combattre. Le procédé est en réalité d'une grande violence pour les personnes concernées, en leur agitant sous le nez des images si insultantes qu'on a du mal à croire qu'elles ne sont pas un peu siennes aussi. Difficile d'éviter les clichés ricanants quand on part du prémisse que ces gens sont "compliqués", elle le martèle. Elle prouve en même temps sa méconnaissance du sujet, dans une tentative de définition de la bisexualité qui se vautre dans la transphobie et le mépris. Et c'est finalement la chute du papier qui résume bien sa vision : "les bi•es c'est exotique, les bi•es c'est excitant".

Polémique médiatique. Le 24 octobre, une conférence que devait donner Sylviane Agacinski à l'Université Bordeaux-Montaigne était annulée. Marianne, Le Canard enchaîné, Europe 1, FigaroVox, Contrepoints, Causeur, 24 heures, Valeurs actuelles, Ouest-France, Le Point, Atlantico… Tous ont paresseusement repris le même storytelling des “horribles censeurs LGBTI opposés à la liberté d’expression”, en se basant principalement sur le communiqué de presse des organisateurs, sans questionner la véracité de celui-ci (de quelles “menaces” parlait-on ?), ni chercher à interroger les associations étudiantes qui avaient protesté contre cette tribune sans contradiction accordée à la philosophe anti-PMA et anti-GPA. Seuls La Croix et Checknews (Libération) ont fait le job et souligné que c’était Sylviane Agacinski elle-même qui avait pris l’initiative d’annuler sa venue plutôt que d’accepter la proposition des organisateurs de transformer la conférence en débat contradictoire.

Polémiste Médiatiquement Assisté. Le 15 octobre, CNews n'a rien trouvé de mieux que de faire "débattre" son repris de justice maison sur le thème de la PMA. Comme c'était à prévoir (et prévu), les attaques LGBTphobes ne se sont pas faites attendre. 
 

Si nous sommes scandalisé•es par ces pratiques, nous n'oublions pas nos consœurs et confrères journalistes pris en tenaille entre le besoin d'exercer leur métier et la pathétique course au buzz entreprise par leur direction. Nous leur apportons tout notre soutien. 

Transphobies. Sensationnalisme dégoulinant, mégenrage, utilisation répétée du prénom de naissance, des termes "transsexuel" et "changer de sexe"... On ne va pas lister tout ce qui ne va pas dans un article publié dans la rubrique "C'est mon histoire" du magazine Elle : c'est un véritable bingo ! Nous allons simplement rappeler aux rédactions que la forme du témoignage ainsi que l'utilisation des guillemets ne constituent absolument un bouclier derrière lequel on peut se cacher pour publier n'importe quoi et que le chapitre, fraîchement actualisé, "Respecter les personnes trans" de notre kit est à leur disposition. Un kit dans lequel Le Canard Enchaîné ferait bien d'aller tremper sa plume. En effet, une critique du film XY Chelsea a été l'occasion, pour le journal, de plusieurs sorties transphobes qualifiant notamment l'activiste "d'androgyne". Pas une première pour le palmipède... 

Responsabilité journalistique. Dans son numéro paru le 24 octobre, la Gazette de Montpellier publiait via son courrier des lecteurs une lettre intitulée La PMA va fabriquer de futurs dégénérés. Un texte lesbophobe aussi insultant pour les femmes ayant eu ou allant avoir recours à la Procréation Médicalement Assistée qu’envers les enfants qui en sont issus. Évidemment, ce « courrier » a fait réagir bon nombre de personnes et d’associations (dont l’AJL, par la voix de sa co-présidente Clémence Allezard). Devant cette vague d’indignations, le magazine s’est fendu, dans son numéro suivant, d’un « mea culpa ». La publication du texte incriminé serait une erreur de jugement (visant à « nourrir le débat »). La rédaction ne partagerait pas son contenu et se plaint du « flot de propos haineux déversés par certains sur les réseaux sociaux ». Or, c’est bien cette rédaction qui a choisi de publier ce texte. Elle, encore, qui lui a choisi son titre immonde. Elle, toujours, qui a choisi de ne pas contredire les fantasmes délirants qu’il contenait. Les LGBTIphobies ainsi que les discriminations ne sont pas des opinions mais des délits et il est bien trop facile, après coup, de se plaindre des réactions que leur lecture peut susciter de la part des personnes concernées.

À l’étranger

La bisexualité à l'honneur. La flamboyante co-présentatrice des Out d'Or 2019, Nora Bouazzouni, l'a rappelé durant la cérémonie : "Le B de LGBTI, ça ne veut pas dire que badass". Du 15 au 25 octobre, en Belgique, la RTBF proposait en télé, en radio et sur sa plateforme Auvio une programmation mettant la bisexualité à l'honneur. L'occasion de découvrir, notamment, le podcast Bisexualités, dans lequel 5 personnes bisexuelles racontent leur vécu et leurs réflexions concernant leur orientation.

Une première ! Pour son numéro de décembre 2019, l'édition britannique du magazine Men's Health a choisi de mettre en couverture l'ex-rugbyman Gareth Thomas. C'est le premier homme ouvertement gay et séropositif au VIH à faire la Une d'une revue qui promeut la bonne santé. 

Nos adhérent•e•s ont du talent

  • Traitement médiatique des personnes intersexes. Le 3 novembre, à l'occasion de la Rencontre nationale intersexe, le Collectif Intersexes et Allié.e.s organisait une table-ronde intitulée "Parler de nous, avec nous : productions médiatiques, culturelles et scientifiques". Clément Giuliano y est intervenu pour l'AJL, notamment pour faire le bilan du traitement médiatique des personnes intersexes depuis la parution du chapitre, co-réalisé avec le CIA, de notre kit "Informer sans discriminer", consacré à cette question. Verdict : toujours très peu de productions journalistiques, mais un frémissement se dessine. 
  • Officier de liaison LGBT. Dans un article publié sur AEF info, notre co-président a révélé la nomination d'un "officier de liaison LGBT" au sein de la Préfecture de police.
  • "On existe !" C'est Rachel Garrat-Valcarcel qui assurait, ce mois-ci, la chronique de l'AJL pour le podcast Gouinement Lundi. Alors que l'ExisTransInter, la manifestation des personnes trans et intersexes et de celles qui les soutiennent, samedi 19 octobre, a eu droit à une couverture médiatique proche du néant, notre trésorière a analysé le traitement médiatique des sujets liés aux personnes trans. Spoiler alert : il y a encore (beaucoup) de boulot !
  • Combat PMA. Elena Louazon a rencontré des mamans lesbiennes qui, parce qu'on ne leur a pas laissé le choix, ont bravé la loi pour avoir un enfant. Entre galères et illégalité, elles racontent leur parcours de PMA.
  • « Je suis lesbienne »Sortir les lesbiennes du placard est une série de documentaires proposés sur France Culture. Représentations, féminismes, persécutions, communauté : en quatre épisodes, Clémence Allezard expose les mécanismes d’invisibilisation des lesbiennes. Et, grâce à un important travail de recherches, à un récit choral issu de nombreux témoignages mais, aussi, avec son propre ressenti, notre co-présidente met en lumière celles qui ont été laissées dans l’ombre, celles dont l’Histoire ne parle pas.
  • Thérapies de conversion. Pour les besoins d'un documentaire diffusé dans "Enquête exclusive" le 13 octobre, Félicien Cassan a infiltré une thérapie de conversion aux États-Unis. Dans un article publié dans Slate, il raconte son expérience et montre notamment ce que permet de dire et de produire le fait d'être journaliste et out
  • Tunisie, humour et DJ. Pour Komitid, Romain Vallet est revenu sur la (très faible) place des questions LGBT dans la présidentielle tunisienne dont le second tour s'est déroulé le 13 octobre. Notre camarade a également réalisé pour Jock.Life des interviews de l'humoriste Lolla Wesh ainsi que du commerçant et DJ David Bolito
  • Le pacs a 20 ans. Le 13 octobre 1999, l'Assemblée nationale adoptait définitivement la loi sur le pacte civil de solidarité (pacs). À l'occasion de ce vingtième anniversaire, Florian Bardou a rencontré huit couples, homos ou hétéros, qui ont fait le choix de cette union. 
  • Cinéma lesbien et féministe. Du 31 octobre au 3 novembre, se déroulait  à Paris le Festival du film lesbien et féministe Cineffable. Pour expliquer les enjeux de cette 30e édition, Mathilde Loire a interviewé Marie-Anne et Carole, deux de ses organisatrices. 
  • Intersexualité et queer-coded villain. Dans un important article publié dans le magazine Antidote, Aline Mayard met en lumière l'une des principales revendications des personnes intersexes : l’arrêt des opérations chirurgicales infligées par le corps médical aux enfants inter sans leur consentement. Dans les colonnes des Inrocks, notre consœur revient également sur le cliché du "méchant crypto-gay" (ou queer-coded villain) à l'occasion de la sortie du film Joker.  
  • Yourcenar et Shade culture. Pour Télérama, Lucas Armati nous fait découvrir Les Monts Déserts, retraite de Marguerite Yourcenar et de sa compagne dans Le Maine, aux États-Unis. Dans Stylist, notre confrère nous dit tout sur la "shade culture", ses origines gay et africaines-américaines ainsi que ses limites.
  • Droits des personnes intersexes. Alors qu'elle était encore en discussion à l'Assemblée nationale, Hélène Molinari s'est penchée sur la loi de bioéthique et a montré en quoi les projets d'Agnès Buzyn allait à l'encontre des droits fondamentaux des personnes intersexes
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