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Bon voyage Gaspard

 
Après avoir rencontré les papes de l'Intelligence Artificielle, notre ami Gaspard Koenig (co-fondateur de Time To Philo) a décidé de partir, à cheval, à la rencontre de la liberté intérieure, de Montaigne et surtout des Européens. Pendant 6 mois (plus ?) à partir de mai 2020, Gaspard va entreprendre le voyage que Montaigne fit de Bordeaux à Rome par le chemin le moins court. Quittant les rivages de l’intelligence artificielle, Gaspard s’est fixé un nouveau cap : l’humanisme européen. A dos de jument.
 
Gaspard vous en dit plus sur son projet dans la vidéo et le texte ci-dessous. Vous pouvez le soutenir en participant à la levée de fonds qui lui permettra de financer cette aventure européenne et philosophique (ici)
 
Bon voyage Gaspard !
 
Time To Philo

Sur les pas de Montaigne

par Gaspard Koenig

Dans sa Panthère des neiges, Sylvain Tesson fait l’éloge de l’affût, de l’attente immobile, dans un monde où les voyages sont devenus trop communs pour conserver leur part d’exotisme, où l’humanité semble avoir produit cette « monoculture de masse » redoutée par Claude Lévi-Strauss. Et si c’était plutôt nous qui ne savions plus voyager ? Nul n’est besoin de partir en Mongolie : il suffit de retrouver, même près de chez soi, le sens du chemin, le goût du hasard, le plaisir des rencontres. Mais comment faire ?
 
Pour (ré)apprendre à voyager, je propose de prendre Michel de Montaigne comme guide. L’auteur des Essais est un des premiers voyageurs modernes : parti de son château bordelais en juin 1580, il se rendit à Rome par le chemin le plus long, en passant par les Vosges, la Suisse, la Bavière et la Vénétie, s’arrêtant dans les villes d’eau pour soulager ses douleurs rénales. Il musarda de longs mois en Italie. Seule son élection à la mairie de Bordeaux le décida à rentrer au bercail, après un an et demi d’absence. Il raconta cette épopée dans son Journal de voyage (en partie rédigé par son domestique) ainsi que dans ses Essais (en particulier au chapitre « de la vanité », III, 9). De ces premiers écrits d’écrivain-voyageur, je tire trois leçons.
 
Tout d’abord, le voyage est une fuite. Loin de se satisfaire de la solitude de sa fameuse Tour, Montaigne se plaint de la « tourbe des menus maux » et des « épines domestiques ». Mais attention, la fuite n’est légitime que si l’on ne court pas se réfugier dans une nouvelle routine ou de nouvelles certitudes : « Je sais bien ce que je fuis, mais non pas ce que je cherche ». C’est moins une quête de soi qu’une saine escapade hors de soi.
 
Le voyage ne saurait donc être trop planifié. « J’entreprends seulement de me branler, pendant que le branle me plaît, et me promène pour me promener ». Montaigne se vante de ne suivre aucune ligne droite. Voilà qui rendait fous ses compagnons de route, comme ils en ont témoigné : « s’il eût été seul avec les siens, il fût allé plutôt à Cracovie ou vers la Grèce. Quand on se plaignait de ce qu’il conduisait souvent la troupe par chemins divers, revenant souvent bien près d’où il était parti, il répondait qu’il ne pouvait faillir ni tordre sa voie, n’ayant nul projet que de se promener par des lieux inconnus ». Adieu, TripAdvisor !
 
De cette sérendipité naît l’ouverture à l’autre. Montaigne fréquente aussi bien les édiles que les courtisanes ou les aubergistes. Il s’efforce d’adopter les coutumes étrangères, comme de boire le vin sans eau en Allemagne... Il s’agace quand il entend trop de Français à Rome. Il étudie et respecte les différentes mœurs dont il nourrira ses Essais, au point de devenir lui-même un composite cosmopolite : « Un honnête homme, c’est un homme mêlé ».
 
A la panthère des neiges, je préfère donc le cavalier européen, jamais plus heureux que « le cul sur la selle » !


Gaspard Koenig

Michel de Montaigne (1533 - 1592)

Ecrivain, philosophe, homme politique et diplomate français. Ses Essais, entrepris en 1572 et constamment remaniés jusqu'à sa mort, ont nourri la pensée des plus grands auteurs en France et en Europe. Montaigne s'y peint, en exposant ses réflexions, basées sur ses nombreuses expériences, tout en dénonçant les travers de son son époque. En savoir plus.
Time To Philo est illustré par Daniel Maja.
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