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Analyste perplexe (D.R.)

Auditeurs sachant auditer,


 

                  Commençons, selon l’usage, par quelques informations pratiques :

- Notre prochain enregistrement en public aura lieu ce dimanche, le 2 février et il est nécessaire de s’inscrire ici
- Plusieurs de nos donateurs m’ont demandé le document qui leur permettra de bénéficier de l’abattement d’impôt sur le revenu auquel leur don ouvre droit. Seule l’association « J’Aime l’info » est habilitée par le ministère des finances à délivrer de telles attestations.  Toutes vos contributions au financement du Nouvel Esprit public, qu’elles viennent par chèque ou par internet, transitent par cette association agréée et c’est elle qui, dans les semaines qui précèdent la date de déclaration des revenus vous adressera le précieux document. J’Aime l’info est gérée par le Syndicat de la Presse Indépendante d’Information en ligne.
- Après avoir essuyé des revers dus, notamment, aux grèves et à leurs conséquences, notre projet d’enregistrements publics hors-série sur Paris  connait une vigueur nouvelle :  réservez dans vos tablettes les soirées du 2 et du 9 mars, notre prochaine lettre vous en dira davantage.
- Vous connaissez le chemin qui conduit à nous soutenir. Il passe par ici

 

                            Vendredi prochain, le Royaume-Uni se sera séparé de l’Union européenne. On peut épiloguer sur ce que fut son degré d’adhésion, on peut  ironiser sur les atermoiements qui ont accompagné sa décision de partir, sur le spectacle donné par la Chambre des Communes, on peut s’inquiéter de voir, avant même que la désunion ne soit scellée, des Européens établis depuis des années en Angleterre, apprendre qu’ils vont devoir quitter le pays, on peut se demander ce qu’il adviendra des chances qu’offraient aux étudiants anglais le programme Erasmus et à tous la libre circulation, on peut chipoter sur la brutalité du système électoral britannique ou prédire que l’unité du Royaume y résistera d’autant moins que la famille royale donne furieusement de la bande, mais on ne peut pas ne pas reconnaitre que le Royaume-Uni a renié l’Europe par trois fois :  en juin 2016 lors du referendum, en mai 2019 lors des européennes, où les Brexiters ont obtenu une très forte majorité, et en décembre 2019 où le parti conservateur l’a emporté. 

                      Je me suis demandé à moi-même d’assurer le bloc-notes de ce numéro 4 de notre lettre d’information et je ne me suis pas fait prier pour accepter. Sans me vanter, je crois poser dans ce texte la seule question qui vaille : comment vivre en Europe privé de notre ennemi héréditaire ? 

                 Le ciel vous tienne en joie,

                            Ph. M

LES BRÈVES DE DIMANCHE DERNIER

Philippe Meyer


La Mouche au théâtre des Bouffes du Nord
 

Christian Hecq et Valérie Lesort avaient déjà fait ensemble au Vieux-Colombier un « Vingt mille lieues sous les mers » absolument féérique. C’est exactement la même chose ici, avec une excellente maîtrise de tout ce que la technique peut apporter à un spectacle fantastique, avec tout ce que Valérie Lesort et Christian Hecq peuvent apporter d’humour, et une science du jeu que que les quatre comédiens partagent. 

J’y ai découvert à cette occasion un confrère visionnaire, celui qui s’est retrouvé en garde à vue pour avoir dit que le président de la République assistait à la réprésentation. J’étais dans la salle ce soir là. Cette garde à vue est une totale stupidité, en plus d’être un manquement aux règles tout à fait déplorable. Mais ce confrère est visionnaire en ce que, dans une déclaration ultérieure à sa garde à vue, il a dit qu’on lui avait confisqué son téléphone, parce que ce dernier contenait une vidéo montrant le président et son épouse s’enfuyant à toutes jambes. Moi qui étais dans ce théâtre et avais le couple présidentiel parfaitement dans mon champ de vision, je les ai vus ne pas quitter le théâtre, applaudir aux saluts, et je sais qu’ils sont allés discuter avec les interprètes après la représentation. Par ailleurs, que des gens attendent le président de la République à la sortie d’un théâtre pour lui exprimer leur hostilité : rien à redire. En revanche, que ces gens tentent d’entrer dans le théâtre et provoquent une interruption momentanée du spectacle, c’est montrer à l’égard du travail (celui des comédiens notamment) un mépris, à propos duquel on perd le droit de s’offusquer quand on prétend en être victime soi-même.


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Béatrice Giblin


Rapport sur l’immigration

Je voudrais attirer l’attention sur ce rapport sur l’immigration, qui a été remis au président de la République, dont le Monde a fait un compte-rendu, qui préconise davantage de régularisations pour les étrangers. Vis à vis des étrangers qu’on ne peut pas expulser, parce que leurs enfants sont scolarisés en France, qui sont salariés, et qui sont dans des situations invraisemblables, logés parfois deux ans d’affilée dans des hôtels (ce qui a un coût exorbitant), il est plus que temps qu’on regarde les choses sereinement. Il faut donner de la publicité à ce rapport, faire en sorte que le plus de Français possible examinent sans passion cette question. Voici plus de trente ans qu’on essaie de réduire une immigration dont on a besoin. Il ne s’agit pas d’être laxistes, mais d’avoir un minimum de dignité, que nous n’avons plus pour le moment.

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Michaela Wiegel
 

Von Erbfeinden zu guten Nachbarn (Des ennemis héréditaires aux bons voisins)

Je retourne aux barricades, à l’occasion des 150 ans de la guerre de 1870. Ce petit livre, bientôt publié par Fayard, de deux historiens Hélène Miard-Delacroix et Andreas Wirsching : Von Erbfeinden zu guten Nachbarn (Des ennemis héréditaires aux bons voisins) est un livre très instructif. Il traite d’éléments qu’on a un peu oubliés, par exemple comment, après la guerre de 1870, il y eut une sorte de regard sur l’Allemagne, qu’on retrouve aujourd’hui (même s’il est désormais vidé d’envies revanchardes), un mélange d’admiration et de détestation. Instructif donc, mais aussi amusant. J’aimerais raconter une blague par laquelle commence l’ouvrage, sur la famille Lagarde, renommée en 1871 en « Wache » (qui veut dire : « la garde »), écrit avec un « W » mais prononcé comme « vache ». Du coup, après la première guerre mondiale, cette famille est renommée « vache ». En 1940, on la renomme « Kuh », et en 1945, la prononciation change, on passe de « Cou » à « Cul » ... 

Réjouissons-nous donc que Christine Lagarde n’ait pas vécu en Alsace ...

 

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Richard Werly
 

Le grand écart 

Ma première suggestion est pour le livre de Pascal Perrineau, qui est un peu le pendant politique de L’Archipel français (de Jérôme Fourquet). C’est tout à fait intéressant, il y a derrière ce livre un plaidoyer pour davantage démocratie directe. Je citerais cette phrase de l’introduction : « la disruption politique intervenue en 2017 a beaucoup contribué à délégitimer la représentation politique ancienne, sans parvenir à la renouveler. Cet échec a ouvert la voie à l’expression radicale de la contestation. »

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Richard Werly

 

MBS : le prince d’Arabie

A propos de l’Arabie Saoudite, je recommande le documentaire récemment diffusé, à présent disponible sur internet, « MBS le prince d’Arabie ». Il est consacré à Mohamed ben Salmane, c’est passionnant et cela montre combien ce personnage est sinon trouble, du moins dangereux, et difficile à manier pour les Occidentaux.

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Jean-Louis Bourlanges 


Giraudoux
L’humanisme républicain à l’épreuve 

 

Je retombe en adolescence en recommandant deux livres, directement inspirés par des camarades de classe. Le premier est d’André Job, qui a consacré une grande partie de sa vie à l’étude de Giraudoux, il montre notamment quelque chose de tout à fait intéressant : l’auteur a été victime du fait d’être mort avant la Libération, ce qui fait qu’on lui a accolé une image de désinvolture qui l’a écrasé, alors que toute son œuvre  est en réalité empreinte d’une tension, d’une inquiétude et d’un tragique qui sont très forts. Ce livre réhabilite la place de Giraudoux dans l’Histoire, il n’a pas été le chantre précieux de la IIIème République qu’on a voulu faire de lui.

 

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Jean-Louis Bourlanges
 

La liberté d’enseignement et les projets de loi de M. Jules Ferry

Mon ami Stanislas de Laboulaye qui a exercé plusieurs postes diplomatiques importants, m’a signalé une oeuvre que j’aurais dû connaître depuis très longtemps, celle de son trisaïeul Edouard Laboulaye, un quasi contemporain de Tocqueville, qui a contribué à faire construire la statue de la liberté. Son livre montre que le monopole de la collation des grades par Jules Ferry, la nationalisation de l’université est une erreur profonde. Si l’université est si malade encore aujourd’hui, c’est à cause de ce mauvais choix (le seul je crois) de Jules Ferry.

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BLOC-NOTES
Chronique de Philippe Meyer

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Brexit déclenché, les Anglais nous quittent. Mauvais débarras, et qui donne toute sa portée à cette phrase que l’on enseignait à Sciences Po, du temps où y régnait le plan en trois parties : « l’Angleterre est une île, entourée d’eau, de toutes parts » … Sans doute notre union n’avait-elle été que de raison, mais n’avions-nous pas tout ce qu’il fallait pour devenir un indestructible vieux couple ? D’abord, nous pouvions nous jeter à la tête une provision de reproches remontant au 12e siècle et offrant tous les débouchés à cette mauvaise foi sans laquelle il n’est pas de véritables scènes de ménage : peut-être avons-nous perdu à Crécy ou à Azincourt, mais rien ne pourra effacer Bouvines de l’histoire de l’Europe. Et quand leur roi s’appelait Charles le Mauvais, le nôtre régnait sous le nom de Charles le Sage. « Bien sûr, nous eûmes des orages ». Cent ans de disputes au Moyen-âge suivis d’innombrables remontées de fièvre au cours des siècles. Mais malgré ou à cause de ces querelles jamais éteintes, de combien de peuples européens sommes-nous aussi proches que des Britanniques ? 

                    Nous avons de l’affection pour les Italiens, les Espagnols et les Portugais. Mais c’est une affection qui ne va pas sans condescendance. Leurs immigrés ont été nos maçons, nos portefaix, nos femmes de ménage. Nous allions en vacances sous leur soleil parce qu’il ne nous coûtait pas plus cher qu’aujourd’hui celui de Zanzibar. Nous en avons gardé l’habitude de prendre ces peuples de haut. Ce n’est pas avec les Anglais que nous nous risquerions au paternalisme. À la moquerie, oui. Nous avons brocardé les grands pieds de leurs femmes, le désastre de leur cuisine, les mœurs de leurs pensionnats de garçons, la vanité de leur vision du monde, l’ennui de leurs dimanches, dont Fernand Raynaud fit un sketch mémorable, la sournoiserie de leurs diplomates, la brutalité de leurs rugbymen, la dégénérescence de leurs aristos, les règles abracadabrantesques de leur cricket, leurs verbes irréguliers, la température de leur bière, la forme et les couleurs des chapeaux de leur reine, leur climat… Aucun peuple ne nous offre autant d’occasions de faire de l’esprit à ses dépens. Abominer les Allemands, ce n’est pas drôle : en trois clichés on en a fait le tour. Honnir les Anglais, c’est le fun…

                   Les porter dans son cœur aussi. De combien de nations européennes partageons-nous à ce point la littérature – de Shakespeare à Harry Potter –, la musique – de Purcell à Amy Winehouse – le cinéma, – de « Noblesse oblige » à « Billy Elliot » –, les séries télévisées – de « The Office » à « Downton Abbey » ? Combien de leurs héros sont aussi les nôtres, de Robin des bois à Winston Churchill ? Combien de peuples que nous croyons connaître gardent-ils une pareille capacité à nous déconcerter ? Quelle autre forme d’humour nous fait-elle autant sourire, avec son sens de l’absurde et son goût de la cruauté ? Et quel civisme pourrait-il mieux nous inspirer que celui de ce chauffeur de taxi, pendant le Blitz, qui déclarait à son passager, l’un des Français de la BBC, après avoir passé trois quarts d’heure à slalomer entre des bombes, « on a eu de la chance, rien que des feux verts » ?

                    Le mathématicien italien Brunacci soutenait que « la principale occupation des Anglais est de jouer à être anglais ». Le jour de l’enterrement de la reine et impératrice Victoria, le 2 février 1901, les balayeurs des rues portaient un crêpe à leurs balais et les prostituées s’étaient toutes habillées de noir. Le 30 janvier 1965, le long de la Tamise, les grues s’inclinèrent au passage du convoi funèbre de Winston Churchill. Et le 31 janvier prochain, on ne m’empêchera pas d’entonner « Ce n’est qu’un au-revoir ».

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