Est-ce un mot imprononçable ?
Pourquoi les lesbiennes sont-elles les grandes absentes de nos écrans de télévision, des unes de nos journaux ou des matinales radio ? De là à croire que leur existence est impensable dans une société patriarcale où la valeur des femmes est indexée sur le regard masculin porté sur elles, il n’y a qu’un pas 🤔.
Car les faits sont là : dans les débats qui les concernent, les lesbiennes sont à peine conviées, quand elles sont là, c’est le terme "lesbienne" qui semble être une insulte, ou trop "chargé". Trop chargé sexuellement. Les vécus, les expériences, les réalités, des lesbiennes ne sont pas représentés dans les médias.
Pire, les seules représentations mainstream – le porno hétéro – n’en sont pas. Elles sont façonnées par des hommes. Le corps des "lesbiennes" y est lieu de projection de fantasmes masculins hétérosexuels, quand les lesbiennes – les vraies – sont bien celles qui auraient pu y parvenir, dans leur intimité au moins, à échapper à ce regard objectivant... Mais non, capturées, elles aussi.
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C’est ainsi que le terme lui-même devient tabou, comme a pu le constater l’AJL non seulement depuis sa création en assurant une veille médiatique constante et en relevant que les lesbiennes brillaient par leur absence, dans la langue même, mais aussi en se rendant place de la République interroger des passant·e·s. Verdict : pour une majorité de personnes, "le mot n’est pas beau".
Cette vidéo à découvrir sur le compte Twitter de l’AJL fait partie d’une série de productions que nous avons tout spécialement publiées pour la journée internationale de la visibilité lesbienne, le 26 avril dernier. "Lesbienne, c’est encore une identité de résistance", nous dit l’historienne des féminismes Christine Bard en conclusion des capsules sonores consacrées à la généalogie du mot “lesbienne”, à écouter à écouter ici. De manière assez inédite, les médias se sont emparés du sujet de la visibilité lesbienne, en témoigne cette excellente vidéo du Figaro Madame.
La veille de la journée internationale, c’était le collectif SEO lesbienne qui se réunissait pour la première fois, le but ? "Hacker le référencement naturel du terme lesbienne” – comprendre la captation par le porno hétéro des résultats dans les moteurs de recherche – en incitant les diffuseurs (médias, influenceur·se·s, blogueur·se·s...) à l’employer, et en dénonçant la censure du terme dans les GAFA : "SEO lesbienne" ne pouvait initialement pas s’appeler ainsi, le “s” devant être remplacé par un “z” sur Facebook. Dans la même veine, la newsletter de l’European Lesbian Conference avait été censurée par Google... car il y avait une suspicion de contenu pornographique. Un comble. Quand les lesbiennes s'approprient le mot, le revendiquent, et s’organisent, elles sont empêchées par le sens dévoyé accolé à leur orientation sexuelle.
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En parlant de la European Lesbian Conference, l’AJL était aussi à Kiev du 11 au 14 avril dernier. De tout le génie lesbien déployé face à des manifestants lesbophobes, nous retenons surtout l’incroyable puissance de Monica Benicio, veuve de l’élue brésilienne noire et lesbienne assassinée il y a plus d’un an. "Nos corps lesbiens sont politiques" a-t-elle notamment lancé à une assemblée manifestement émue. Nous retenons aussi cette phrase prononcée par Alice Coffin, cofondatrice de l’AJL, qui, contrairement aux idées reçues sur l’incompatibilité à revendiquer une identité politique lesbienne avec une pratique journalistique, estime: "Être lesbienne a fait de moi une meilleure journaliste".
Une déclaration qui a eu un écho glaçant dans l’actualité de ce mois : nous avons appris la mort de notre consoeur Lyra McKee, connue pour sa remarquable couverture du conflit nord-irlandais et pour son militantisme en faveur des minorités sexuelles. "It won’t always be like this. It’s going to get better." (“Ce ne sera pas toujours comme cela, cela ira mieux"), écrivait-elle à l’ado qu’elle était, dans une déchirante lettre republiée par The Guardian. Journaliste lesbienne, définitivement, une donnée essentielle, pas un détail biographique relevant de la chambre à coucher.
Heureusement des médias mainstream comme BFMTV, l’ont relevé. Les lignes seraient-elles en train de bouger? En tout cas, "les féroces gouines bien décidées à exploser le patriarcat" veilleront au grain.
Allez, encore une fois, pour la route, “LES-BI-ENNE”.
xoxo, l'AJL
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- L’excellent dossier que de L’Obs consacré aux personnes non binaires, et sa superbe Une : "Ni fille ni garçon, la révolution du genre".
- L’Obs reprend aussi la très bonne dépêche AFP de Robin Legrand sur la transidentité, exemplaire dans le traitement de ce sujet : "Transidentité, la difficile question de la psychiatrie dans les parcours de transition".
- C’est un témoignage digne et douloureux sur la situation des personnes intersexes que retrace Aude Lorriaux, pleine de justesse, dans Slate : "L’histoire de M., première personne intersexe au monde à porter plainte pour mutilations".
- Dans Libération, Ioana Marines nous parle de la perte de salaire des femmes après leur premier enfant, une étude hyper intéressante qui lie sexisme et économie.
- Numérique, lesbophobie et cyberactivisme, avec Numerama, qui rappelle l’importance et l’aspect politique du choix des mots, en se demandant pourquoi le mot "lesbienne" sur Google ne renvoie que vers des sites pornographiques.
- "Pourquoi les lesbiennes sont-elles privées de parole à la télé ?" : Télérama relaie également une interrogation –vous l'aurez compris– prégnante au sein de l'AJL.
- 20 Minutes s’interroge aussi sur l’invisibilité des lesbiennes, rappelant à la fois les différents mécanismes aboutissant à cette invisibilisation et les discriminations particulières subies par les femmes lesbiennes.
- Enfin, et à l’heure de l’homophobie "folklorique" dans le foot, franceinfo propose un dossier salutaire et nécessaire sur le tabou de l’homophobie dans ce sport, le tout en deux parties.
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On vous encourage à voir et à écouter
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- On vous en parlait dans l’édito, la visibilité des lesbiennes passe notamment par l’utilisation du mot "lesbienne". Or l’élection de Lori Lightfoot à la tête de Chicago a permis de donner un parfait exemple de l’évitement des médias dans l’emploi de ce terme, à l’image du papier de France Inter ou de cette dépêche de l'AFP, qui parlent d’une femme "homosexuelle" ou "gay".
- Last but not least, le dossier de Marianne sur L’offensive des obsédés de la race, du sexe, du genre, de l’identité, soit une longue (et méprisante) complainte à l’encontre des “théories intersectionnelles”, complainte ne reposant que sur des amalgames approximatifs et autres raccourcis intellectuels contestables.
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Nos adhérent·e·s ont du talent
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- Le genre d’article qui fait du bien : Matthieu Foucher célèbre les identités et les perspectives minoritaires pour Vice avec une série de portraits : "Ce qu’être queer a apporté à leur vie".
- À l’occasion de la journée de la visibilité lesbienne, Lucie, Rozenn, Samia et Bérengère ont travaillé sur cette vidéo publiée par l'AJL.
- Notre co-présidente, Clémence Allezard a consacré un documentaire en deux parties à l’athlète lesbienne Violette Morris, figure des années folles puis collabo, qualifiée de "hyène de la Gestapo" pour des raisons qui demeurent troubles. "Le cas Violette Morris", sur France Culture.
- Clémence Allezard signe aussi pour L’Obs un superbe portrait d’Olena Shevchenko, activiste lesbienne membre du board de EL*C, rencontrée à Kiev.
- #NosCoprezOntDuTalent : la première co-présidente ever de l’AJL, Léa Lootgieter, est interviewée dans un excellent article de ChEEK Magazine sur les chansons d’amour lesbiennes, à propos de son livre, co-écrit avec Pauline Paris, Les Dessous lesbiens de la chanson, (à paraître aux éditions iXe).
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- Notre trésorière, Rachel Garrat-Valcarcel, figure parmi les premières journalistes françaises à publier, dans 20 Minutes, un article sur la mort de notre consœur lesbienne Lyra McKee. Évidemment elle s’attarde longuement sur son militantisme LGBTI.
- Rachel Garrat-Valcarcel signe également, avec la chercheuse Noémie Grunenwald, une tribune très bien sentie à propos de la campagne de l’Inter-LGBT pour Komitid.
- Arno Pedram, qui a rejoint récemment la grande famille de l’AJL, consacre pour le Bondy blog, un double papier, dont l’un intime, sur le harcèlement scolaire.
- Dans un dossier très complet de Libération, Florian Bardou nous offre trois articles dédiés à la transidentité, avec des témoignages de participants à la manifestation organisée le 9 avril dernier à l’appel d’associations trans après l’agression transphobe de Julia Boyer, une interview du sociologue Emmanuel Beaubatie sur les ressorts et les manifestations des violences transphobes et un papier relatant les avancées législatives de pays catholiques et musulmans pour les droits des trans.
- Non seulement trois générations de co-présidentes lesbiennes de l'AJL se sont succédé lors de l’atelier “Quelle place pour les journalistes lesbiennes et les histoires 'gouines' dans ce monde médiatique macho?” de la European Lesbian* Conference mais deux d’entre elles, Léa et Clémence, vous donnent un aperçu sonore de ces féroces gouines réunies à Kiev dans cette (encore une fois) très belle émission de reportages de Gouinement Lundi.
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On vous dit au mois prochain.
Et d'ici là, n'oubliez pas d'abonner vos confrères et consoeurs !
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