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Quel intérêt pour l'édition indépendante et féministe d'agir collectivement aujourd'hui ? L'éditrice, autrice et journaliste Juliette Rousseau, aux côtés d'autres professionnel.les du secteur, ont décidé de créer « Éditer en féministes ». Dans un domaine plus que jamais en proie à une logique capitaliste, le collectif souhaite questionner et repenser le fonctionnement des structures éditoriales, et en dévoiler les manquements sous un prisme économique et féministe.
« J’aimerais que tous les écrivains obtiennent la ­possibilité de dénoncer leur contrat dès lors qu’il y a un changement d’actionnaire et le livre est complètement remboursé. Aujour­d’hui, on récupère nos droits soixante-dix ans après notre mort ! C’est ubuesque. »
Virginie Despentes dans Libération
CONTRE BOLLORÉ, L’ÉDITION LUTTE EN COLLECTIF

Il y a quelques mois, Vincent Bolloré annonçait reprendre le groupe Lagardère. Avec ce rachat, il met la main sur l’entreprise Hachette, et étend son emprise au-delà de la sphère médiatique en s’attaquant à celle de l’édition. Pour faire simple, Hachette est le n°3 mondial sur le marché, juste derrière Éditis, également propriété de Vincent Bollloré. Si les deux groupes venaient à fusionner, ils couvriraient à eux deux 100% des petits points de vente en France. Des manuels scolaires aux livres de politicien.nes en passant par la littérature générale, Bolloré contrôlerait la diffusion et l’édition d’une majorité des ouvrages français. De nombreuses personnes du monde de l’édition ont averti des dangers d’une telle action : parmi elles, Virginie Despentes a rappelé, dans une tribune pour Libération, à quel point il était primordial que les écrivain.es aient un droit de recul sur leur contrat. Notamment dans une situation où une idéologie d’extrême droite viendrait menacer la parution et la diffusion de milliers d’ouvrages. Dans le même temps, l’autrice annonçait lancer sa propre maison d’édition aux côtés d’Axelle Le Dauphin : le projet se nommera La Légende éditions et verra le jour en septembre 2022.

Alors bien sûr, un contrôle de la situation va être fait. Bien sûr, la commission européenne en charge du droit à la concurrence doit statuer sur la possibilité pour Bolloré de procéder à une telle opération. Bien sûr, il sera sans doute contraint de renoncer à une partie des actifs qu’il possède chez Éditis ou chez Hachette. Bien sûr. Mais le paysage français de l’édition pose question : comment se fait-il qu’une telle situation soit rendue possible ? Comment peut-il être permis aujourd’hui qu’une personnalité ait la main mise sur un domaine entier sans qu’il n’en soit empêché ? 

Dans un tel contexte, deux questions se posent : comment l’édition indépendante et féministe peut-elle lutter et exister devant une telle puissance financière ? Et pourquoi le doit-elle ? Intervient alors une initiative éditoriale récente : Éditer en féministes. Sous forme de collectif, des maisons d’éditions indépendantes et féministes se sont rassemblées pour créer un rapport de force. Éditions du communÉditions blast, Éditions Daronnes, Éditions des Lisieres, le passager clandestin éditions, PMN Éditions, Hystériques et AssociéEs et enfin Mémoires Minoritaires : pour toutes, il s’agit de parler ensemble des manquements du domaine vis-à-vis de la profession, et de fonder entre adelphes un mouvement pour s’organiser et lutter ensemble.
« Lutter ensemble ». C’est le titre du livre dont Juliette Rousseau, membre du collectif, est l’autrice. Également journaliste et éditrice chez les Éditions du commun, elle a créé Éditer en féministes avec plusieurs autres éditeurices afin d’engager une réflexion commune sur le monde l’édition. Pour, par exemple, pointer du doigt le manque de transparence du CNL concernant la parité dans les attributions d’aides financières. Ou pour organiser l’échange et le temps de parole, à l’occasion d’événements comme Les Assises nationales de l’édition féministe organisées en juin prochain, à Montreuil. Mais il s’agit aussi pour elles et eux de diffuser en collectif. Bolloré a aujourd’hui la mainmise sur un nombre faramineux de points de vente. Lui et les personnes qu’il désigne en tant que décisionnaires de son « empire » (des personnalités qui, sans surprise, partagent ses idées) peuvent décider de ce qui peut être lu, ou non. Le collectif pense également à cet aspect là : comment s’assurer, dans le paysage actuel de l’édition, que les idées féministes ne soient pas soumises à la censure ?
« C’est d’avoir par exemple notre propre réseau de diffusion, de ne pas passer par les diffuseurs qui appartiennent aux grands groupes, avec lesquels on a zéro rapport de force. Donc c’est d’avoir nos propres outils, de travailler de façon plus en proximité avec les libraires indépendantes et indépendants, accroître ces espaces-là. »

LA CAPITALISATION DES ÉCRITS FÉMINISTES

Au-delà de la diffusion, il faut repenser les logiques de rentabilité. D’abord, celles qui sont observables : aujourd'hui, les livres identifiés comme féministes profitent d’un succès éditorial inédit. Des ouvrages écrits récemment, mais également des livres clés dans l’histoire féministe, dont les droits ont été achetés il y a plusieurs années ou décennies par des maisons d’éditions qui ont grossi, et en touchent aujourd’hui tous les bénéfices, sans en partager les idées. Ce qui amène à des situations où, dans une même maison d’édition, peut être mis en vente un ouvrage féministe et un autre écrit par un violeur. C’est un problème identifié par Virginie Despentes chez Libération, et c’est ce que soulève Juliette Rousseau aujourd’hui :

« Il y a quand même quelque chose d’assez hallucinant à se dire que les luttes féministes génèrent ce succès éditorial, qui lui va venir remplir les poches de personnes comme Vincent Bolloré qui n’ont aucun intérêt à l’émancipation des femmes. C’est quand même un peu fou. »

Ensuite, il y a l’aspect invisible des questions de rentabilité : dans la loi capitaliste, le succès d’une catégorie d’ouvrage en efface une autre. Ce qui ne produit pas d’argent ne doit pas être produit, point. Si seule cette loi du plus fort perdure, que deviendront les voix qui peinent à se faire entendre mais dont les mots sont nécessaires à la lutte ? Juliette Rousseau identifie le travail des éditions féministes et indépendantes comme une mission d'archive et de mémoire. Comme la création d’un matrimoine/patrimoine dans le but de conserver une trace des combats et des idées féministes, si peu rentables soient-elles d’un point de vue économique. Si échapper aux lois capitalistes est difficilement envisageable lorsque l’on vend des livres, encore est-il possible de choisir ceux que l’on vend, pour qui, et dans quel but. C’est le combat mené par le collectif, et mis en mots par Juliette : éditer en féministe, c’est éditer au service du commun.

Et c’est quelque chose que la capitalisation des idées féministes semble avoir oublié : publier des livres sur les enjeux du féminisme intersectionnel ne suffit pas s’il n’engage aucun changement structurel.
« Dans notre collectif, il y a aussi plusieurs éditrices non-blanches qui se posent la question de la persistance du racisme et de modalités coloniales dans la façon dont l'édition fonctionne en France. »
Pour le collectif, il est important de soulever des problématiques propres au féminisme intersectionnel, notamment l’idée qu’il s’agit d’une problématique structurelle, qui ne peut pas se résumer à une ligne éditoriale : les maisons d’éditions, elles aussi, doivent repenser leur fonctionnement interne. Faire front à la capitalisation des idées féministes, c’est rappeler qu’il s’agit, au-delà d’une ligne éditoriale, au-delà de la rentabilité, au-delà des logiques capitalistes, d’une façon de penser et de s’organiser autrement.
« C’est ça la question: qu’est ce qui va rester lorsque ce phénomène de mode va passer ? Parce que clairement, on est dans un très bon exemple de la façon dont le capitalisme s’approprie les idées, y compris celles qui peuvent lui être contradictoires. Il en fait une source d’argent phénoménal, et les dépossède de leur substance subversive, il les défait de cette façon-là. Pour nous la question c’est aussi celle-là : on est éditrices féministes parce qu’on pense que la société a besoin du féminisme, que nous on a besoin du féminisme. Et on est bien consciente du fait que ce succès éditorial se traduit en pas grand chose, pour le moment, en termes de changement sociétal. »
L'association We are Safe Place organise les 14 et 15 mai prochain l’événement The Safe Place week-end, au Garage Amelot dans Paris 11ème. Et à cette occasion, Censored a été convié pour une table ronde aux côtés de Tal Madesta, Douce Dibondo et Camille Kervella : WHAT WE CALL HOME . Comment vivre demain ? Un sujet largement abordé dans le dernier numéro Censored. Il sera question d’espace domestique et de ce que nous appelons notre « maison » : parfois un lieu à fuir, par choix ou non, évoquant les violences intra familiales. Un terrain à reconstruire aussi, avec de nombreuses manières de le repenser et de faire famille, bien au-delà des modèles de famille nucléaire classique et vers l'utopie. On espère vous y voir ! Entrée gratuite sur inscription.

PS : Cet événement est le premier d'une longue série de lancements partout en France et ailleurs. On vous en dit plus très bientôt et on a hâte de partir à votre rencontre !
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ESPACES VERTIGES - EXPO
Le jeudi 12 mai à partir de 18h30 au RolaBola à Rouen, l’artiste Diane Gaignoux présentera le vernissage de son exposition Espaces Vestiges. Partant de sa pratique textile et formelle autour du vêtement, elle glisse vers un travail sculptural et pictural : des tapisseries teintées et feutrées ainsi que divers pièces en résine colorée. « Un travail sur la couleur, une recherche autour de l'objet vêtement comme survivance de corps ». L’exposition sera visible en permanence du 12 mai au 26 juin au 4 rue Eugène Boudin à Rouen.

Élodie Petit, autrice qui a participé au dernier numéro Censored, sortait cette semaine son recueil Fiévreuse plébéienne, aux Éditions du commun ! « Manifeste d'une poésie punk et lesbiennxe », l'ouvrage se lit comme un roman poétique, érotique, vecteur d'une émancipation absolue. L'autrice sera à Rennes le 26 mai prochain à l'établi des mots pour le lancement. 
LES 10 ANS DE LA GAÎTÉ LYRIQUE
Pour fêter ses 10 ans, la Gaîté Lyrique organise une série de table ronde et de sessions de mentorat autour de la création. L’événement, gratuit sur réservation, a pour but de faire se rencontrer les créateurices autour de questions qui les concerne : le mécénat, le travail indépendant, la communauté autour des artistes ou encore la notion de conviction dans le travail artistique. En partenariat avec Patreon, l’événement aura lieu le 20 mai prochain !

GIRLS DON'T CRY PARTY
Girls don’t cry vous propose un nouvel événement futuriste dans un cadre hors du commun, en partenariat avec le label de musique electro d’avant garde Hyper Link. L’événement aura lieu le 8 juin 2022 à La Chapelle des Carmélites à Toulouse et réunira 3 performeuses de la scène électro ! Info et réservation sur la page facebook de l’événement. 

COUCOU CHLOE - WAITING
Low Lov - Velvet Dress
YENDRY - KI-KI
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