Demain, quelles forêts en métropole face au dérèglement du climat ?

Gueule de bois. Incendies, sécheresses, attaques de ravageurs… les forêts françaises sont mises à rude épreuve et la situation se détériore à mesure que le changement climatique s'intensifie. Face à cela, quelles solutions pour améliorer leur résilience ? Tour d’horizon. 

Les deux incendies, qui ont commencé le 12 juillet en Gironde, sont toujours en cours et ont dévasté plus de 20 000 hectares de forêt. Du vent, des températures très élevées, et un déficit hydrique important depuis le début de l’année ont asséché une végétation déjà fragilisée par les tempêtes de 1999 et de 2009 et favorisé la dispersion des incendies. Avec le réchauffement climatique, il ne fait plus de doutes que les feux seront plus fréquents et plus intenses. Et ceux-ci, libérant le carbone stocké depuis des années, peuvent encore accélérer la hausse des températures. 

Le Sénat a lancé en juin une mission d’information sur « le contrôle relatif à la prévention et à la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie ». Il devrait rendre ses conclusions début août. Pour Anne-Catherine Loisier, co-rapporteure centriste de la mission interrogée par publicsenat.fr, « les forêts entretenues sont les plus résilientes. Renforcer la gestion et la surveillance à l’échelle de chaque massif forestier, c’est le meilleur moyen de protéger la forêt et les habitations ». Encore faut-il savoir de quoi on parle. « Qu’est-ce qu’on met derrière le mot "entretien" ? Enlever tout le bois mort ? Mais une forêt en a besoin. Si gérer la forêt, c'est la simplifier en mettant des monocultures de pins maritimes ou d'eucalyptus, on n'est pas d'accord du tout », relève Sylvain Angerand, ingénieur forestier et directeur des campagnes de l'association Canopée - Forêts vivantes. 

D'autres travaux peuvent être entrepris pour limiter la propagation au cas où l'incendie se déclare. « Il faut compartimenter, aérer, créer des ruptures du continuum forestier avec des vignes ou des espaces agricoles », indique Bernard Prévosto, directeur de recherche à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) sur l’écologie des forêts méditerranéennes. « Il serait intéressant réfléchir à d'autres stratégies de stockage du carbone moins susceptibles d'être affectées par des incendies comme les tourbières et les zones humides qui étaient fréquentes dans le passé », complète Jonathan Lenoir, chercheur en écologie au CNRS. « On a un compromis à faire entre les différents types de gestion, résume Bernard Prévosto. Mais il est vrai que biodiversité et lutte contre le feu ne se marient pas bien. »

Sylvain Angerand réclame pour sa part plus de « mesures contraignantes en faveur de la biodiversité » dans la gestion des forêts et rappelle que « pour limiter le risque et ne pas arriver aux scénarios extrêmes, la première des choses à faire, c’est de diminuer nos émissions de gaz à effet de serre ». Notre décryptage à lire sur vert.eco.

· Jeudi, le Parc naturel régional du Morvan a annoncé saisir le Conseil d'État pour obliger l’Etat à limiter les coupes rases, ces techniques d’abattage de la totalité des arbres d'une zone forestière en une seule fois. La forêt « naturelle composée de feuillus est progressivement rasée et remplacée par des résineux », déplore le parc qui souhaite que cette pratique ne soit plus qu’« autorisée au cas par cas ». - Le Bien Public

· Dimanche, une quatrième centrale nucléaire a obtenu une dérogation environnementale l’autorisant à rejeter des eaux plus chaudes qu’habituellement. Après Golfech (Tarn-et-Garonne), le Blayais (Gironde) et Saint-Alban (Isère) vendredi, c’est la centrale du Bugey (Ain) qui bénéficie de cette exception afin d’« assurer la sécurité du réseau électrique », selon l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN). - L’info durable

·  Lundi, une deuxième personne est morte d’un coup de chaleur en travaillant dans l’agglomération de Madrid (Espagne). L’homme d’une cinquantaine d’années s’affairait dans un entrepôt et sa température corporelle atteignait 42,9°C lorsque les secours l’ont pris en charge. Samedi, c’est un employé de voirie de 60 ans qui était décédé au travail en raison des températures très élevées. En moins de dix jours, pas moins de 360 personnes sont mortes à cause de la chaleur dans le pays. - Libération

·  Mardi, la vague de chaleur qui pèse sur la France s’est décalée vers l’est après un pic de chaleur lundi. La vigilance rouge a été levée mais 70 départements et l’Andorre sont en vigilance orange canicule. Selon Météo France, la vague de chaleur pourrait durer une quinzaine de jours au total et le risque d’orages est important. - France info

· Mardi encore, la mairie de Marseille a lancé une pétition en ligne contre les escales des navires de croisière lors des pics de pollution. « Nous suffoquons », déplore le texte signé par un peu moins de 4 000 personnes le jour de sa diffusion. - France Bleu

82 %

On continue à s’envoyer en l’air. Ce dimanche, le constructeur aéronautique Boeing a annoncé qu’il prévoyait une hausse de 82 % du nombre d’avions dans le monde d’ici 2041, tous constructeurs confondus. Dans un rapport prévisionnel annuel pour les vingt prochaines années, le géant nord-américain envisage ainsi que 47 080 appareils voleront en 2041, contre 25 900 en 2019. Vertigineux, et pourtant, Boeing a revu ses estimations à la baisse en raison de la crise économique : il misait l’an dernier sur 49 405 avions en circulation dans deux décennies. Quelques jours auparavant, les calculs d’Airbus allaient dans le même (contre-)sens avec 46 930 appareils prévus en 2041 contre 22 880 en service en 2020.

Les émissions de gaz à effet de serre de l’aviation sont en progression constante. On ne résiste pas à vous rafraichir la mémoire sur la pollution liée à ce secteur dans un article et un graphique made in Vert.

« Ce qui survient est très largement irrémédiable. Donc il s’agit de créer un monde franchement nouveau. Plutôt que la frayeur, mon sentiment est celui d’une sorte de devoir. »
 

 Génération désenchantée. Dans un grand entretien accordé mardi à nos confrères de Reporterre, le climatologue Hervé Le Treut revient sur l'engagement nécessaire des scientifiques face au dérèglement climatique. Il avance que les constats scientifiques ne suffiront pas et que la réaction de la jeunesse est essentielle pour répondre aux enjeux qui s’annoncent.

· C’est la course. La grande distribution a annoncé, lundi, un plan de « sobriété énergétique » pour réduire la consommation d’énergie dans les supermarchés « devant le risque de pénuries d’approvisionnement électrique annoncées par le gouvernement pour cet hiver », a déclaré la fédération Perifem qui agrège les acteurs de la distribution. Extinction des enseignes dès la fermeture - soit une heure plus tôt que ce que prévoit la loi -, réduction de l'éclairage lorsqu’il n’y a pas de client·es, meilleure gestion de la température… les mesures doivent être mises en place à l’automne. - Le Monde

· Bien debouts. Des habitant•es du quartier des Malassis à Bagnolet (93) se mobilisent devant l’école Pêche d’or et son îlot arboré, « menacé d'être rasé dans les prochains jours ». Elles et ils s’opposent à un projet de complexe scolaire jugé « inadapté », réunissant un centre de loisirs et une crèche, qui doit remplacer l’école maternelle actuelle et sa ferme écologique, sociale et culturelle. Une tribune, adressée à la Première ministre Elisabeth Borne, a été publiée sur le site du Monde. - Le Parisien

· On rase gratis. Au Brésil, la déforestation a augmenté de 20 % en 2021, selon une étude indépendante publiée lundi par la plateforme collaborative Mapbiomas. Bien qu’elle représente près de 60 % des zones impactées, l’Amazonie - où 18 arbres sont rasés chaque seconde -, n’est pas la seule région concernée. L’agriculture et l’élevage constituent les principales causes de cette déforestation. - Le Monde

L'effondrement et moi

Dernière extrémité. Dans la série de quatre podcasts « L’effondrement et moi », la journaliste de Radio France Karine Le Loët explique comment elle tente d’affronter son angoisse climatique, née une nuit, lors d’un épisode de fortes chaleurs. On la suit à la rencontre de la famille modèle, en plongée dans un groupe de parole, ou en immersion au sein d’un mouvement de désobéissance en Allemagne. Au total, un peu plus d’une heure trente d'émission, réalisée pour Les Pieds sur Terre (France culture). Le temps de nous mettre en miroir avec ces autres, qui parviennent sereinement - ou pas - à gérer leur connaissance des enjeux climatiques et de biodiversité.