Hélène
“Peut-être qu’en septembre, tu seras là” chantait Hélène. C’est surtout ma sœur qui regardait les séries d’AB production mais tout le monde connaissait Hélène Rollès qui habitait dans le même village que nous, ou du moins qui y avait une propriété avec des chevaux. Lors d’un job d’été au Crédit Agricole j’avais regardé le fichier client pour voir si elle y avait son compte. C’était bien le cas mais les informations y étaient classées confidentielles. Mon père m’a dit qu’elle était propriétaire d’un restaurant de couscous.
Il paraît qu’une fois Christophe Dechavanne s’est arrêté dans une des 3 boulangeries du village. Pour identifier chacune des boulangeries, nous leur avions donné des noms : “Celle de la petite rue”, “Glinche” et “Celle du milieu”. C’était chez Glinche qu’il fallait aller (ça, Christophe Dechavanne le savait certainement). Par chez ma grand-mère, les boulangeries s'appelaient “Lebouleu” et “À qui le tour”.
Une fois, chez Lebouleu, j’avais utilisé la monnaie du pain pour m’acheter un ourson en guimauve. Ma grand-mère s’en était rendu compte mais ne m’avait pas grondé. Elle devait bien m’aimer ma mémé.
Mémé Marais s'appelle maintenant Leconte. Son prénom est Monique, comme celui de ma mère (sa fille). Elle aime danser et va jouer au bowling un mercredi sur deux. J’ai passé la majeure partie de mon enfance chez elle, au 18 rue des Acacias, en face de Samouraï 2000 et des entrepôts de la SNCF. Au bout de la rue, il y a la rivière où Pato, le chien orange, nageait pour aller chercher les bâtons qu’on lui lançait. Pato qui se cachait sous le buffet quand il y avait de l’orage ou des feux d’artifice. Maintenant les berges sont aménagées mais avant c’était un simple chemin de terre qui menait jusqu’aux bâtiments de la SEITA puis le pont de Fer. C’est le chemin que j’avais pris avec mon oncle (qui écoutait Police, mais aussi et surtout Téléphone) pour aller voir Rambo 2 au cinéma (le Français, l’ABC ou les Ambassades, j’ai oublié).
À l’entrée de la rue des Acacias il y a peut-être encore, sur une gouttière, l’autocollant Force Ouvrière récupéré lors d’une réunion syndicale de mon père et que j’ai collé en allant à l’école. Rue des Acacias où, dans le caniveau, j'avais vu pour la première fois une capote anglaise usagée et que j’avais pensé récupérer pour la rincer et ainsi m’éviter la honte de devoir , un jour, en acheter dans une pharmacie. Je ne savais pas qu’il me faudrait des années avant d’avoir l’occasion d’en utiliser. À la fac, Cédric (que je n’aimais pas trop trop) avait dit “ça fait 2 mois que je n’ai pas baisé” et je pensais “moi, ça fait 19 ans”. De la première année de fac je ne garde que quelques souvenirs confus : une chaise pliante cassée, du vomi dans une voiture, de la moquette murale verte. Pourquoi avais-je, punaisée au mur de ma petite chambre d’étudiant, une carte postale de l’affiche de Reservoir Dogs alors qu’aujourd’hui je déteste Tarantino ?
Jean-Luc Delarue avait l’air très content quand Pulp Fiction reçu la Palme d’or du festival de Cannes 1994. Il montrait son vidéo laser disc de Reservoir Dogs à la caméra, en faisant des mimiques ridicules à la fin de La Grande Famille, son émission du midi sur Canal+.
Quand je lisais American Psycho, je m’imaginais que Patrick Bateman avait le visage de Jean-Luc Delarue. Ce livre m’a rendu dingo. À l’adolescence j’étais un peu monomaniaque dans mes lectures. Quand j’avais apprécié un auteur, il fallait que je lise TOUT. Je me suis ainsi tapé l’intégrale de Ionesco et de Lovecraft.
Lovecraft, c’était à cause du jeu de rôle L’Appel de Cthulhu. En théorie j’adorais le principe des jeux de rôles (et les dés à 20 faces) mais en pratique je trouvais ça ridicule et pénible (surtout à cause des nombreuses règles à lire et à apprendre). J’étais du genre à faire des bruits de pets quand le maître du jeu essayait de poser une ambiance. Je n’avais pas beaucoup d’amis. En primaire j’étais BFF avec Marc. Mais j’ai perdu le contact en entrant au collège avec les bouseux d’Yvré L'Evêque. Marc adorait Napoléon et les soap opéras (Dallas, Dynastie et Santa Barbara). Il avait également une fascination pour la 2e guerre mondiale et les nazis (c’est décidément une habitude chez mes amis). Lors d’une nuit passée chez lui j’avais voulu goûter le Get 27 de sa collection de mignonettes (il l’avait en double). Sa mère n’avait pas trop apprécié (nous avions 10 ans). C’est peut-être pour ça que je n’ai plus eu trop de nouvelles de lui. Au collège, j’ai souvent traîné avec Ronan. Son père était le secrétaire de la mairie et il ressemblait à Pierre Bonte. Je n’étais pas très intime avec Ronan, même s’il m’avait raconté que son grand frère avait éjaculé dans son pantalon en feuilletant une revue porno chez le marchand de journaux.
Ronan faisait de l’aïkido, ce qui n’était pas banal. Il me racontait les grands préceptes de cet art martial et l’histoire de Morihei Ueshiba, son créateur. C’était chiant.
Une fois adulte j’ai retrouvé sa trace grâce à internet. Nos échanges sont restés polis mais sans suite. Il faut dire qu’il était très ami avec cette grosse merde de Yannick Lemoine.
Yannick Lemoine, si tu lis ces lignes, je te méprise autant que je te déteste.
Pareil pour toi, Samuel Janvier.
Le type qui était le plus proche de ce qui peut être un ami était Anthony. Anthony me ressemblait un peu mais il était gentil. Il n’avait pas ou plus de père et sa mère conduisait des cars de ramassage scolaire. Il aimait l’histoire, les jeux de rôle et Napoléon. C’était aussi, par une très grande coïncidence, le cousin de Lydia dont j’avais fait connaissance au cours de tennis et dont j’étais amoureux. Anthony avait décrété que sa cousine était moche et conne. Mon amour resterait donc secret. Pour toujours.
Anthony m'avait confié comment il se masturbait. C’était un vrai pote.
Lors d’un week-end à Paris avec mes parents nous avions fait les boutiques du forum des Halles et j’étais rentré le lundi avec un nouveau pantalon à pinces et un blouson “teddy” assorti. Anthony m’avait fait rire en me disant “Ce nouvel ensemble te va à ravir.” mais les autres gars de la classe se foutaient de ma gueule à cause de la marque du blouson, imprimée en vert fluo, bien visible : Feu Follet.
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J’appréciais ces courts séjours dans la capitale. Traditionnellement nous allions visiter un monument ou un musée et quelques grands magasins. Souvent nous en profitions pour aller voir Alain et Gérard, les vieux copains de mon père. Ils étaient marrants. C’est généralement l’un ou l’autre qui nous hébergeait pour la nuit. Je dormais dans la chambre du fils de Gérard qui avait la Dictée magique et le château fort de Skeletor. Gérard avait un magnétoscope et des VHS piratées. C’est chez lui que j’ai pu voir Rox et Rouky mais aussi un film avec une invasion de tarentules tueuses. Mes parents m’avaient interdit de parler à quiconque de ces films et du magnétoscope (“Si jamais quelqu’un vient te poser des questions à l’école…”). Une fois, nous sommes allés manger un couscous chez Bebert. J’aimais quand nous circulions la nuit dans Paris en écoutant des radios que nous ne captions pas dans la Sarthe. Et avant de dormir, je regardais les lumières de la ville par la fenêtre de la tour où Gérard et sa famille habitaient.
La femme de Gérard s’appelle Françoise et elle me rappelait France Gall. Gérard, lui, me faisait plutôt penser à Michel Sardou. J’ai oublié le prénom de leur fils mais aujourd’hui je l’associe à Ricky, de Ricky ou la belle vie (il s'appellera donc Ricky). Et leur fille : Nathalie. Nathalie avait le même âge que moi, les yeux bleus et ressemblait à Maïwenn. Pour moi elle était comme toutes ces jeunes filles que l’on pouvait voir dans les films avec Sophie Marceau. Du genre à porter des sweats Poivre Blanc rose pâle. Quand j’entendais “parisienne”, je pensais Nathalie. Nous sommes partis plusieurs fois, avec nos parents, aux sports d’hiver. Vers cinq ou six ans je lui avait proposé que l’on se mette tout nus dans nos lits comme j’avais vu certains adultes faire à la télé. Elle avait refusé et je pense qu’un des adultes m’avait également entendu car on est venu rapidement nous dire de passer à table. J’ai mangé une crêpe au nutella et j’ai vomi (mais ce n’était peut-être pas le même soir, ni la même année). Elle m’avait longuement, et avec enthousiasme, raconté l’histoire de E.T. l’extraterrestre qu’elle était allée voir au cinéma. Certainement dans un grand cinéma sur les Champs Elysées, j’imagine. Après avoir skié, nous léchions les stalactites de glaces qui tombaient du toit du chalet en disant que c'était délicieux, que celui-là était à la vanille alors que l’autre était au chocolat. La dernière fois que je l’ai vue, à l'adolescence, j’ai essayé de la convertir au rock alternatif français en lui faisant écouter du Ludwig Von 88. Ce fut un échec. Ses parents m’ont régulièrement donné de ses nouvelles, comme quand elle a eu la tuberculose. Et à chaque fois on me racontait l’histoire des stalactites à la vanille et au chocolat.
(à suivre)
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QUELQUES LIENS POUR FINIR
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- Le Kaomoji Cool club permet de générer de chouettes combinaisons de caractères pour créer des emoji "old school". Je suis fan de ce petit koala : ʕ •ᴥ•ʔ
- Tous les néo boomers vont le diront : la gamme Lego Space des années 80 était la meilleure. Lego Space Bot est un compte twitter qui ne poste que des images de boites de cette série. J'ai récemment vu la boite de la base spatiale de mes rêves à 60 € dans une braderie. À une époque j'aurai tué pour elle mais aujourd'hui je n'ai plus le temps ni l’argent pour ces conneries.
- Le 11 septembre 2001, en plein direct sur les attentats, TF1 a diffusé des images de Star Wars pendant 3 secondes.Comment cela a-t'il pu se produire ?
- Tous les anciens et fidèles auditeurs de Bernard Lenoir seront certainement émus de retrouver les conducteurs de certaines de ses émissions. L'article dans son ensemble est très intéressant et le blog dont il est extrait vaut certainement le coup d'être lu (TL;DR).
- Déprime, à quoi tu rimes
- Connaissiez vous les chiens de carrefour ?
- Mon bureau se trouve maintenant au 3e étage, autant vous dire que ce site va me permettre pas mal d'expériences.
- Tehching Hsieh est un artiste surtout connu pour ses performances se déroulant chaque fois sur une année entière : vivre dans une cage, rester lié par une corde avec un autre artiste, vivre en extérieur, pointer toutes les heures... Il a mis fin a sa carrière artistique en 2000.
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