La police des existences
irrégulières et incertaines
Socio-histoire du vagabondage
et de la mendicité au XIXe siècle
----- Jeudi 2 décembre 2021 à 14h00
EHESS, 54 bd Raspail 75006 Paris
Thèse d'histoire préparée à l'EHESS sous la direction de Gérard Noiriel
Legs de l’époque moderne, les délits de vagabondage et de mendicité furent des éléments importants du maintien de l’ordre au XIXe siècle. Incriminant les individus a priori dépourvus de ressources régulières, incapables de répondre d’un ancrage social ou professionnel satisfaisant, ils reçurent de nombreuses justifications théoriques. D’un point de vue pratique, ils furent les instruments d’une police des mobilités et des populations pauvres aux finalités multiples. Adossé à la législation sur les passeports, le vagabondage permit d’interpeller les individus qui circulaient hors du cadre légal. Avec la mendicité, il participait d’une gestion localiste de la pauvreté, qui visait à fixer les indigents, à limiter leurs circulations. En fin de siècle, cette vocation historique est interrogée, à travers la recherche d’un nouvel équilibre entre pénal et assistantiel, fondé sur des catégories génériques, déterritorialisées. Les délits furent également justifiés par un répertoire d’images et de représentations, essentiellement négatives, qui soulignaient l’altérité des mendiants et des vagabonds. Au cœur de l’activité des forces de l’ordre, ils ouvraient la voie à une gestion policière et administrative dont les modalités étaient très variées. L’appareil judiciaire n’intervenait que secondairement, à travers une justice de plus en plus expéditive. Loin d’être uniforme, cette police fut une source de conflits récurrents. L’analyse des parcours individuels dévoile une sociologie complexe, qui éclaire l’histoire des classes populaires, à travers plusieurs axes problématiques (mobilités, économie familiale, armée, vulnérabilité ou marginalité de certains groupes).