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Hebdo n° 47/2021
27 décembre 2021
SOMMAIRE
 
JURISPRUDENCE AIDES D’ÉTAT : Estimant que la Commission a fait une application correcte du critère de l’investisseur privé, le Tribunal confirme la décision qualifiant d’aide d’État incompatible avec le marché intérieur le financement de l’aéroport de Gdynia-Kosakowo situé en Poméranie et ordonnant sa récupération par la Pologne

INFOS UE : La Commission européenne révise en profondeur ses lignes directrices concernant les aides d'État au climat, à la protection de l'environnement et à l’énergie, mais accorde un sursis au gaz naturel

INFOS : Entérinant la possibilité admise par l’ARCEP de réguler le marché de gros amont des services de diffusion de la TNT via de simples engagements souscrits par l’opérateur historique, l’Autorité de la concurrence émet cependant des réserves sur un certain nombre d’allègements de la régulation résultant de la proposition d’engagements de TDF

INFOS : L’Autorité rend un avis sur l’assurance perte de récoltes

 

JURISPRUDENCE AIDES D’ÉTAT : Estimant que la Commission a fait une application correcte du critère de l’investisseur privé, le Tribunal confirme la décision qualifiant d’aide d’État incompatible avec le marché intérieur le financement de l’aéroport de Gdynia-Kosakowo situé en Poméranie et ordonnant sa récupération par la Pologne

 

Le 21 décembre 2021, le Tribunal de l’Union a rendu deux arrêts dans l'affaire T-209/15 (Gmina Kosakowo contre Commission européenne) et, sur renvoi, dans l’affaire T-263/15 RENV (Gmina Miasto Gdynia et Port Lotniczy Gdynia Kosakowo contre Commission européenne).

Aux termes de ces deux arrêts, le Tribunal rejette les recours introduits contre la décision de la Commission rendue le 26 février 2015 rendue à propos du financement public accordé par deux communes polonaises en faveur de l’aéroport de Gdynia-Kosakowo situé en Poméranie.

Entre temps, la Cour de justice de l’Union avait, par arrêt du 11 mars 2020, prononcé, à la demande de la Commission, dans l’une des deux affaires, l’annulation de l’arrêt du 17 novembre 2017 rendu dans l’affaire T‑263/15 (Gmina Miasto Gdynia et Port Lotniczy Gdynia-Kosakowo contre Commission européenne), par lequel le Tribunal avait partiellement annulé la décision de la Commission du 26 février 2015, en ce que cette dernière avait omis de mettre les intéressés en mesure de présenter leurs observations, et ce, après le retrait d’une première décision et l’adoption d’une seconde décision, alors que la Commission avait opéré, dans la décision attaquée, un changement de régime juridique s’agissant de l’analyse de la compatibilité de l’aide au fonctionnement et que le nouveau régime juridique appliqué par la Commission dans la décision attaquée comportait des modifications substantielles par rapport à celui précédemment en vigueur et pris en compte dans la décision d’ouverture et dans la décision de 2014.

En juillet 2007, souhaitant reconvertir à des fins civiles l’aéroport militaire de Gdynia-Oksywie, les deux communes — les requérantes — avaient créé une société afin de gérer ce nouvel aéroport civil, destiné à servir au trafic aérien général, aux lignes à bas coûts et aux compagnies charters.

Dans une première décision adoptée le 11 février 2014, la Commission avait constaté que le projet de financement de cet aéroport constituait une aide d’État et en avait ordonné la récupération aux autorités polonaises. Mais, prenant conscience que l’aide d’État déclarée incompatible comprenait certains investissements ne constituant pas des aides d’État dans la mesure où ils relevaient d’une tâche d’intérêt public, la Commission avait en conséquence, le 26 février 2015, retiré la décision de 2014, puis l’avait remplacée par la décision attaquée. Pour autant, la Commission avait considéré qu’il n’était pas nécessaire d’ouvrir une nouvelle procédure d’examen dans la mesure où le dossier contenait, selon elle, tous les éléments nécessaires à l’appréciation de la mesure en cause.

Les deux communes et la société chargée de la gestion de l’aéroport et accessoirement le bénéficiaire de l’aide ont alors formé un recours en annulation des articles 2 à 5 de la seconde décision de la Commission du 26 février 2015.

Pour l’essentiel, le présent arrêt écarte d’abord toute violation des droits procéduraux des requérantes tenant à ce que la Commission n’a pas rouvert une procédure formelle d’examen et, partant, ne les a pas invitées à présenter leurs observations sur les modifications factuelles opérées dans la décision attaquée. Sur ce point, le Tribunal estime qu’il n’apparaît pas que, entre la décision 2014/883 et la décision attaquée, la Commission ait appliqué des critères ou une logique différents pour apprécier la compatibilité au marché intérieur de l’aide à l’investissement (aff. T-263/15 RENV, pt. 60). En outre, comme la première décision a été retirée au motif qu’elle avait irrégulièrement élargi le champ de la procédure formelle d’examen résultant de la décision d’ouverture, l’illégalité est ainsi intervenue au stade de la décision clôturant la procédure formelle d’examen et n’a pas affecté la décision d’ouverture. Partant, le retrait de la première décision n’impliquait pas que la Commission reprenne la procédure en remontant au-delà de ce point précis (aff. T-263/15 RENV, pt. 63). Et si les requérantes font valoir que, dans la décision attaquée, la Commission a procédé à une nouvelle analyse et développé de nouveaux éclaircissements et éléments d’appréciation qui ne figuraient pas dans la première décision, elles n’établissent pas que, ce faisant, la Commission se serait fondée sur des éléments déterminants pour son analyse juridique (aff. T-263/15 RENV, pt. 71). Dès lors, dans les circonstances de l’espèce, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que, en n’ouvrant pas une nouvelle procédure formelle d’examen et en n’invitant pas les parties intéressées à présenter leurs observations sur la nouvelle analyse de la Commission dans la décision attaquée, celle-ci aurait méconnu les obligations qui pèsent sur elle en application de l’article 108, § 2, TFUE, de l’articles 6 et de l’article 26, § 2, du règlement n° 659/1999 (aff. T-263/15 RENV, pt. 75).

Par ailleurs, les deux arrêts rendus ce jour par le Tribunal viennent confirmer les conclusions de la Commission selon laquelle l’investissement en cause ne répondait pas au critère de l’investisseur privé, en ce sens qu’un investisseur privé n’aurait pas décidé de procéder à de tels investissements. Cette conclusion de la Commission, que le Tribunal fait sienne, repose, en substance, sur trois constats essentiels. Premièrement, l’aéroport de Gdynia-Kosakowo se situe à 25 kilomètres environ de l’aéroport de Gdańsk, qui dispose de capacités non utilisées et dont l’extension est déjà programmée. Leurs activités ne sont pas complémentaires dès lors que ces aéroports visent chacun principalement les compagnies charters et à bas coût. Deuxièmement, les redevances prévues dans le projet d’investissement ne sont pas concurrentielles dès lors qu’elles sont supérieures à celles applicables à l’aéroport de Gdańsk ainsi qu’à celles de deux autres aéroports distants de 196 et 296 kilomètres. Compte tenu de la concurrence à laquelle l’aéroport de Gdynia-Kosakowo devra faire face, les prévisions concernant le trafic formulées dans l’étude de 2010 sont fondées sur des hypothèses irréalistes, ce qui est confirmé par la réduction significative des prévisions de trafic figurant dans l’étude de 2012. Troisièmement, pendant toute la période du projet (c’est-à-dire jusqu’en 2040), les flux de trésorerie actualisés cumulés seront négatifs. Le projet ne deviendra rentable qu’à la fin de l’investissement envisagé (c’est-à-dire en 2040), compte tenu notamment de la valeur terminale du projet. Or, cette valeur n’est pas fiable ; elle est très probablement surévaluée, dans la mesure où les infrastructures devront revenir, à la fin du projet, à l’État, compte tenu du contrat conclu entre le Trésor public polonais et les requérantes ni à la société PLGK (aff. T-263/15 RENV, pt. 132) (aff. T-209/15, pt. 108). Le Tribunal confirme à cet égard que les aéroports de Gdynia-Kosakowo et de Gdańsk auraient été en concurrence sur le même secteur (aff. T-263/15 RENV, pt. 140).

INFOS UE : La Commission européenne révise en profondeur ses lignes directrices concernant les aides d'État au climat, à la protection de l'environnement et à l’énergie, mais accorde un sursis au gaz naturel

 

Le 21 décembre 2021, la Commission européenne a adopté de nouvelles lignes directrices concernant les aides d'État au climat, à la protection de l'environnement et à l’énergie, qui entreront en vigueur en janvier 2022. Par ailleurs, les États membres seront tenus d'aligner les régimes existants sur les nouvelles règles à partir de 2024.

Les lignes directrices fixent les conditions dans lesquelles les aides d'État accordées par les États membres dans les domaines du climat, de la protection de l'environnement et de l'énergie peuvent être considérées comme compatibles avec le marché intérieur et les critères appliqués par la Commission pour examiner les aides fournies par les États membres dans ces domaines.

Les lignes directrices révisées visent à mettre les règles en ligne avec les priorités stratégiques de la Commission, en particulier celles énoncées dans le pacte vert pour l'Europe et, dans les domaines de l'énergie et de l'environnement, celles énoncées dans le paquet « Ajustement à l'objectif 55 ».

Concrètement, les nouvelles lignes directrices cherchent à supprimer les subventions en faveur des combustibles fossiles les plus polluants, pour lesquels une appréciation positive de la Commission au regard des règles en matière d'aides d'État est peu probable compte tenu de leurs effets négatifs importants sur l'environnement. Lors de la présentation du nouveau texte, la vice-présidente exécutive, Margrethe Vestager, a toutefois indiqué que la Commission entendait faire preuve de pragmatisme à l’égard du cas particulier du gaz naturel, qui bénéficiera d’un régime favorable de façon transitoire et pour autant qu’il remplace des énergies plus polluantes, comme le charbon, la tourbe et le schiste bitumineux. À terme, le gaz naturel ne devrait plus bénéficier d’une appréciation positive de la Commission au regard des règles en matière d'aides d’État. Celle-ci, qui visiblement s’est fait tordre le bras par certains États membres à propos du gaz naturel, conserve son objectif ultime d'éliminer progressivement la dépendance aux combustibles fossiles, y compris le gaz, d’autant qu’une moindre dépendance vis-à-vis des combustibles fossiles importés nous aidera également à éviter les pics de prix de l'énergie auxquels nous sommes actuellement confrontés.

Pour le reste, les lignes directrices révisées viennent élargir les catégories d'investissements et de technologies que les États peuvent soutenir à toutes les technologies à même de contribuer à réduire ou à éviter les émissions de gaz à effet de serre, notamment grâce à des investissements dans l'énergie renouvelable, l'efficacité énergétique des processus de production et la décarbonation dans l'industrie. En outre, les plafonds d'aide maximum sont en grande partie supprimés. Ainsi, les aides d'État peuvent désormais couvrir l'intégralité du coût supplémentaire d'un investissement plus vert, par rapport à une alternative moins verte, en particulier lorsque l'aide est accordée à l'issue d'une procédure de mise en concurrence, et introduisent de nouveaux instruments d'aide, tels que les contrats d'écart compensatoire.

Les lignes directrices révisées couvriront désormais les aides à la prévention ou à la réduction de la pollution autre que celle due aux gaz à effet de serre, y compris la pollution sonore, les aides en faveur d'une utilisation efficace des ressources et de l'économie circulaire, et les aides en faveur de la biodiversité et de la réparation des dommages environnementaux. En outre, elles couvrent des aides encourageant les investissements dans la performance énergétique des bâtiments et dans une mobilité propre couvrant tous les modes de transport.

Les lignes directrices révisées modifient les règles relatives aux réductions de certaines taxes sur l'électricité pour les gros consommateurs d'énergie. Il s’agit d’éviter que ces taxes encouragent le déplacement des activités de certains secteurs vers des sites où les règles environnementales sont absentes ou moins ambitieuses que dans l'UE. Les règles ont également été révisées afin de mieux soutenir la décarbonation progressive de ces entreprises, notamment en liant les réductions de taxes aux engagements pris par les bénéficiaires en vue de réduire leur empreinte carbone;

Les lignes directrices révisées introduisent des garanties donnant l'assurance que l'aide est effectivement dirigée là où elle est nécessaire pour améliorer la protection du climat et de l'environnement, qu'elle se limite à ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs environnementaux et qu'elle ne fausse ni la concurrence ni l'intégrité du marché unique. À cet égard, elles renforceront par exemple la participation des parties prenantes à la conception des mesures d'aide de grande ampleur, exigeant des États membres qu'ils consultent les parties prenantes sur leurs principales caractéristiques.

Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de presse de la Commission.

INFOS : Entérinant la possibilité admise par l’ARCEP de réguler le marché de gros amont des services de diffusion de la TNT via de simples engagements souscrits par l’opérateur historique, l’Autorité de la concurrence émet cependant des réserves sur un certain nombre d’allègements de la régulation résultant de la proposition d’engagements de TDF

 

Le 17 décembre 2021, l’Autorité de la concurrence a rendu un avis n° 21-A-17 à la faveur duquel elle répond à une demande d’avis de l’ARCEP concernant un projet de décision relatif au cinquième cycle de régulation du marché de gros amont des services de diffusion de la TNT, aux termes de laquelle cette dernière envisage pour la première fois depuis 2006 de faire reposer ce nouveau cycle de régulation, non sur la base d’obligations réglementaires, mais sur la seule base d’engagements, proposés par TDF en octobre 2021, qui seraient acceptés et rendus opposables par la décision en cause.

Les offres de gros amont de diffusion proposées par TDF permettent aux diffuseurs ne disposant pas de leurs propres infrastructures de diffusion, d’être hébergés sur ses sites et de pouvoir ainsi offrir leurs services de diffusion aux multiplex, qui regroupent plusieurs chaînes de télévision, sur le marché aval.

Aux termes du présent avis, l’Autorité estime d’abord que les conditions cumulatives exigées par la Commission européenne pour le maintien d’une régulation ex ante du marché de gros amont des services de diffusion de la TNT — barrières à l’entrée élevées et non provisoires (pt. 148), absence de perspective d’évolution vers une situation de concurrence effective (pt. 162) et insuffisance du droit de la concurrence pour remédier, seul, aux défaillances de marché identifiées (pt. 168) — sont toujours réunies.

S’agissant ensuite de la capacité de l’ARCEP de contrôler le respect des engagements rendus obligatoires, voire d’en sanctionner le non-respect, l’Autorité estime que l’ARCEP dispose des moyens réglementaires de contrôler et de sanctionner ex post en cas de manquements de TDF à ses engagements (pt. 180). Toutefois, l’Autorité observe que le contrôle opéré par le régulateur sectoriel dépend des informations dont il dispose. Or, les engagements proposés par TDF en l’état diminuent significativement le degré de transparence a priori des conditions d’accès pour les opérateurs tiers et, en ce sens, seraient susceptibles d’affecter le contrôle effectif pouvant être effectué par l’ARCEP (pt. 181). Ainsi, l’ARCEP n’étant pas systématiquement informée par TDF de la signature de conventions d’accès ou de ses avenants, le nouveau système entretient une asymétrie d’information au bénéfice de TDF (pt. 189).
 
Sur le fond, si l’Autorité souscrit à l’analyse de l’ARCEP quant à la nécessité de maintenir, au travers des engagements proposés par TDF, la plupart des obligations imposées à TDF dans le cadre du cycle en cours, elle émet cependant des réserves sur un certain nombre d’allègements résultant de la proposition d’engagements de TDF.

De fait, le mécanisme proposé supprime ou réduit huit obligations non tarifaires antérieures : i) informer l’ARCEP de la signature de conventions d’offres d’accès pour ses offres de gros amont de diffusion hertzienne terrestre de programmes télévisuels ; (ii) permettre aux opérateurs et à l’ARCEP d’avoir accès en permanence aux informations listées en annexe 2 de la décision d’analyse de marché de 2015 pour la plupart de ses sites ; (iii) mettre à jour, pour chacun de ses sites et chaque multiplex, lesdites informations ; (iv) fournir sur demande, et en ce qui concerne les points de services faisant l’objet de réaménagements de fréquences par le CSA, une étude technique préalable relative à une prestation « DiffHF-TNT » ; (v) transmettre à l’ARCEP, et le cas échéant, sur demande, à un diffuseur alternatif autre que celui ayant répliqué son infrastructure, les offres de référence technique et tarifaire de ses sites ou antennes répliqués ; (vi) publier, au plus tard un mois après la date de la notification de la décision que l’ARCEP s’apprête à adopter, la première offre de référence technique et tarifaire prise en application de ladite décision ; (vii) prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que les conventions en vigueur qui ne respectent pas les dispositions de la décision que l’ARCEP s’apprête à adopter soient mises en conformité avec celles-ci ; (viii) mettre à jour, à la suite de la publication des gabarits ou des dossiers de numérisation par le Conseil supérieur de l’audiovisuel, l’offre de référence technique et tarifaire au plus tard un mois avant la date limite de réponse des opérateurs au premier tour de l’appel d’offres pour le point de service concerné.

Par ailleurs, sur le plan tarifaire, est supprimée l’obligation antérieure d’orienter les tarifs vers les coûts pour les sites réputés non réplicables.

Enfin, les obligations de séparation comptable et de comptabilisation des coûts, sont réduites.

Dès lors, l’absence d’amélioration de la situation concurrentielle du marché depuis le dernier cycle de régulation permet difficilement de justifier certains de ces allègements, notamment la suppression du principe d’orientation des tarifs vers les coûts, s’agissant des sites non réplicables (pt. 229).

De même, l’Autorité suggère le maintien des obligations de transparence qui existaient dans le cadre de la décision antérieure de l’ARCEP, pour que soient préservés l’efficacité de la régulation ex ante et le développement d’une concurrence pérenne et effective sur le marché. Ainsi, l’Autorité estime que TDF devrait s’engager à mettre à jour, à la suite de la matérialisation des évolutions liées à la modernisation de la plateforme de la TNT et pouvant avoir un impact sur la composition ou le nombre de multiplex métropolitains, l’offre de référence technique et tarifaire au plus et tard un mois avant la date limite de réponse des opérateurs au premier tour de l’appel d’offres pour le point de service concerné (pt. 213).

Pour le surplus, je vous renvoie à la lecture du communiqué de l'Autorité de la concurrence.

INFOS : L’Autorité rend un avis sur l’assurance perte de récoltes

 

Le 17 décembre 2021, l’Autorité de la concurrence a rendu public son avis n° 21-A-16 adopté, à la demande du ministre de l’économie, le 22 novembre 2021 concernant trois dispositifs alternatifs de coopération horizontale entre assureurs en matière d’assurance multirisques climatiques (MRC).

Dans un contexte marqué par l’accélération des phénomènes naturels imprévisibles et une faible diffusion en France de l’assurance multirisques climatiques des récoltes, les ministères en charge de l’économie et de l’agriculture envisagent trois dispositifs alternatifs. Tout d’abord, ils proposent de mettre en commun les données de sinistralité de chaque assureur afin de faire en sorte que les différents risques climatiques des récoltes soient mieux connus par les assureurs. Ensuite, ils cherchent à promouvoir une meilleure mutualisation des risques entre assureurs distribuant en France l’assurance MRC en constituant un dispositif soit de co-réassurance soit de co-assurance.

Il est possible que les différents dispositifs de coopération horizontale envisagés affectent sensiblement le commerce entre États membres, ce qui rendrait applicable au cas d’espèce le droit européen de la concurrence (pt. 77).

Aux termes du présent avis, l’Autorité envisage deux hypothèses selon que l’adhésion au dispositif retenu est ou non rendue obligatoire.

Le dispositif relatif à une mise en commun, entre assureurs distribuant en France l’assurance MRC, des données individuelles de sinistralité par le biais d’une structure tierce apparaît, parmi les trois dispositifs envisagés, comme celui soulevant le moins de problèmes au regard du droit européen de la concurrence. Il faudrait néanmoins que les assureurs, sur lesquels repose la charge de la preuve, parviennent à démontrer que les quatre conditions cumulatives prévues par l’article 101, § 3, TFUE sont remplies (pt. 93). Cela dépendrait notamment d’un accès libre au groupement et du caractère suffisamment agrégé des données partagées.

Le dispositif relatif à la constitution d’un groupement de co-réassurance soulève, quant à lui, un certain nombre de réserves et ne pourrait à tout le moins être exempté qu’à condition que les assureurs démontre (i) le caractère indispensable de la création d’un seul groupement et (ii) l’absence d’alternatives moins restrictives (pt. 126).

Par ailleurs, les gains supplémentaires que le dispositif relatif à la constitution d’un groupement de co-assurance permettrait d’atteindre, par rapport au dispositif relatif à la mise en commun des données de sinistralité, n’apparaissent pas, sur la base des éléments recueillis, de nature à compenser les effets restrictifs sur la concurrence plus importants qu’il emporte. De ce fait, s’agissant de la constitution d’un groupement de co-assurance, l’octroi d’une exemption au titre de l’article 101, § 3, du TFUE apparaît difficilement envisageable (pt. 127).

Enfin, l’Autorité souhaite rappeler que si l’adhésion à un dispositif sur lequel l’Autorité a émis des réserves quant à sa compatibilité avec le droit européen de la concurrence était rendue obligatoire par voie législative, le comportement des entreprises membres du groupement pourrait échapper au droit des ententes au sens de l’article L. 420-1 du code de commerce et de l’article 101, § 1, du TFUE (pt. 130). Néanmoins, tout comportement des assureurs qui excéderait le strict cadre imposé par la loi au pool, ou tout comportement de ces mêmes assureurs découlant de la marge de manoeuvre dont ils pourraient disposer s’agissant de la définition plus précise des règles de fonctionnement du pool, serait susceptible de se voir appliquer le droit des ententes (pt. 131). Par ailleurs, il est rappelé que l’adoption d’une mesure de nature législative ou réglementaire, susceptible d’éliminer l’effet utile des règles de concurrence énoncées à l’article 101, § 1, du TFUE, pourrait engager la responsabilité de la France dans le cadre d’un recours en manquement devant la Cour de justice de l’Union européenne (pt. 132).

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