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prochain vernissage
O U V R A G E S ,  F A N T A S M E R  L E  M O N D E

Ouvrages, fantasmer le monde est une exposition de projets artistiques qui interrogent les « liens écologiques » dans le sens de « l’effet du tout sur le tout ».
Quelles hypothèses et méthodes sommes-nous contraints d’échafauder pour approcher le territoire qui nous entoure ? La rencontre entre les protocoles scientifiques et les méthodologies artistiques permet de faire émerger une nouvelle complexité dans les diverses explorations de notre environnement. Les ouvrages se construisent avec ardeur, pas de dissection ici, mais des passerelles où s’interpénètrent des forces vivantes toutes reliées les unes aux autres.
Cet événement s’inscrit dans la continuité d’un premier rendez-vous qui a eu lieu à Coco Velten (Yes Ye Camp) en septembre 2021, lors duquel nous avions présenté une vingtaine de projets d’artistes réunis dans le cadre de la saison culturelle pour la biodiversité VIVANT 2020 pendant le Congrès Mondial de la Nature de l’UICN à Marseille.
Avec la participation des artistes et collectifs: Ada, Katrin Backes et Sylvain Tanquerel, Julien Beauquel, Mauro Bordin, Thierry Boutonnier, Aymée Darblay, Corinne Forget, Sylvain Gouraud, Anita Fuchs et Resa Pernthaller, Ivana Adaime Makac, Alex Mira, Antoine Perez, Benoît Pype, Pascaline Rey Noémie Sauve, Thomas Savelli, Jean-Sébastien Tacher et Adrianna Wallis.

Ouvrage (subs. masc.) : 1. Action de mettre (quelque chose) en œuvre, de travailler. 2. Travailler de bon cœur, avec ardeur. 3. Tâche qui demande principalement du temps et de la constance.

https://www.facebook.com/ouvrages.fantasmerlemonde
https://www.instagram.com/ouvrages_fantasmer_le_monde
https://www.vivant2020.com/event/ouvrages-fantasmer-le-monde
 
Comment penser l’ouvrage et ses enjeux symboliques quand il prend son inspiration dans nos rapports écologiques?

extrait du texte d’ouverture de l’événement «V1», à Marseille en septembre 2021:
L’ «ouvrage» se situe, il est inspiré. Il est créé ou pensé, ce qui est parfois déjà la forme la plus aboutie et peut-être même la plus écologique (faudrait-il ne rien faire pour être écologique?). Notre corps est plein de récepteurs et d’émetteurs. Nous les prolongeons. Parfois pour réaliser des gestes utiles mais aussi pour des gestes nécessaires moins utiles. Nous marquons notre environnement de ce corps simple ou outillé et cet environnement nous reçoit, se transforme, c’est déjà un dialogue.
Si je vous invite dans un magasin de bricolage pour faire « ouvrage » est-ce la même chose que si je vous invite en forêt? Sur certains points je pense que oui et sur d’autres pas du tout. Premièrement, vous serez certainement tenté•e•s de vous demander « à quoi répondre » autour de vous. Se posera alors la question du début. D’une possible « neutralité ». D’un « sur quoi commence le dialogue ?» ce qui sera différent dans un lieu qui est prévu pour être le début de tous les projets (comme un magasin de bricolage par exemple = on commence par le vide?) et un autre qui est déjà un projet autonome en cours (comme la forêt?) et qui pourrait aussi être vu comme un début efficace pour penser à créer.
(...) Œuvrer est-ce se familiariser avec une nouvelle mise en rapport à une future nouvelle mise en rapport?

Noémie Sauve

ADRESSE
5 Rue Beaujon 75 008 Paris

OUVRAGES, fantasmer le monde
ouvrages2020@gmail.com
Aymée Darblay 06 60 90 73 12
Noémie Sauve 0607251383
Ada Yu 06 51 52 49 20

toujours en cours

JUSQU'AU 30 AVRIL 2022

LE BUCHER DES VANITES

Mauro Bordin I Aexis Gallissaires I Sylvie Cliche I Kristin Meller
Curatrice: Fabienne Rousseau

 
100ecs, rue de Charenton, Paris 12e
Plan >>
Métro : Gare de Lyon ou Ledru-Rollin

HORAIRES
Lundi au samedi : 9h00 / 23h
Dimanche : se renseigner à l'accueil

ENTRETIEN / MAURO BORDIN À L’OCCASION DE L’EXPOSITION COLLECTIVE LE BÛCHER DES VANITÉS
JUSQU’À FIN AVRIL 2022 AU 
100ECS, RUE DE CHARENTON, PARIS 12E
CURATRICE 
FABIENNE ROUSSEAU

MAURO BORDIN : UN MONDE HORS DU TEMPS

PAR PAULINE LISOWSKI

La peinture de Mauro Bordin, riche en références artistiques, invite à réfléchir à notre position d’être humain face aux enjeux environnementaux. L’artiste compose des paysages où la nature semble être à la fois merveilleuse et hostile. Que d’interrogations face à ses toiles, scènes pourvues de nombreux éléments qui attirent l’attention ainsi que le désir de songer à un monde à la fois familier et étrange, entre rêve et réalité. Chacun pourra y projeter ses propres pensées enfouies et y trouver refuge. Ses œuvres picturales évoquent la résilience d’une nature dont nous faisons partie. En prenant le temps de s’arrêter et de les contempler, le spectateur peut méditer devant des situations parfois incongrues, où ses repères sont à retrouver.
 

Pauline Lisowski : De quelle manière nourris-tu ta pratique picturale et comment interprètes-tu les œuvres du passé ?

Mauro Bordin : La peinture comme tu dis justement est une pratique, un langage, qui permet d’ouvrir une fenêtre sur le monde ; l’artiste dévoile ou révèle un regard particulier sur l’existant. Personnellement, j’ai plus des questions que des réponses, donc ma peinture est une vision sur un monde sans repères. Elle parle de l’homme d’aujourd’hui – en occident au moins -, un homme qui n’a plus les anciens repères : famille, communauté, religion, environnement, patrie, etc. C’est la fameuse société liquide, où même l’identité sexuelle est devenue floue. Je ne suis ni contre ni pour, je constate ce changement radical et assez rapide. J’observe que cet égarement de l’homme occidental ne lui a pas apporté du bonheur. Donc souvent mes peintures parlent de cela, du voyage à la recherche du sens de la vie.

Les œuvres anciennes parlent aussi de cela, mais avec une grille de lecture fondée sur « les repères » anciens, la connaissance plus au moins dogmatique des textes religieux, de la morale dominante, des hiérarchies, du langage symbolique, etc. Personnellement j’adore l’histoire, donc je me nourris de cette richesse. Et je crée des situations contradictoires, par exemple, une image très sereine qui rappelle la Renaissance mais avec quelque chose qui cloche, un bouc à la place d’une brebis, ce qui change la lecture iconographique… C’est un jeu mais cela n’est pas seulement un jeu ludique, car derrière le sourire décroché par une image un peu incongrue se cache une réalité tragique, celle d’une société qui est face au choix fatal de devoir se reconstruire avec probablement des nouvelles règles pour pouvoir se projeter vers l’avenir.

PL : Des éléments sont récurrents dans ta pratique artistique, les cactus, les champignons et d’autres animaux. Comment ceux-ci participent-il d’un récit ?
Quels symboles revêtent-ils pour toi ?

MB : Il y a des animaux, comme les cochons, ou les chèvres, que je choisis car ils sont très proches de l’homme : Ils sont présents dans les fables et la littérature, et ont toujours été utilisés pour caractériser les hommes, comme par exemple dans les insultes, mais aussi utilisés comme divinités, probablement un héritage d’anciennes religions animistes. Souvent je mélange créatures aquatiques et terrestres pour créer une atmosphère étrange, disons chimérique. Ce qui suggère un environnement manipulé et inconnu peuplé d’espèces disproportionnées qui ne vivent pas dans le même écosystème. Pour moi, l’erreur serait de penser que la peinture puisse représenter le réel alors qu’elle est forcément un langage proche du rêve, de la fable. Les images racontent ce qui ne peut pas être raconté par les mots et les artistes du passé le savaient très bien. Il y a effectivement certains sujets qui reviennent, en général la forêt, composée d’arbres, de cactus, de champignons ou d’autres éléments. C’est la forêt des fables, le labyrinthe, le voyage vers l’inconnu, c’est l’endroit des rites de passages, nous avons besoin de ces lieux depuis toujours. Les forêts se font rares, on vit dans un monde fini, connu, donc on essaie de repousser les frontières. Cependant, pour les atteindre et se retrouver face à ce monde encore à découvrir, il faut être très spécialisé, physicien, astronome, etc. Je pense pourtant que l’homme de tous les jours a encore beaucoup à découvrir sur soi-même, d’où la nécessité de créer des forêts mentales…

Mes forêts sont peuplées d’anémones de mer pour évoquer ce milieu aquatique, mais aussi pour leurs formes élégantes qui suivent les courants, ressemblant à des cheveux de sirène. Elles sont belles mais urticantes. Les cactus sont précieux avec leur réserve d’eau et leurs fruits. Ils sont charnus, sensuels, mais bien sûr impossibles à approcher. Ils rappellent un monde qui chauffe. Enfin les champignons, comestibles ou toxiques, évoquent un monde en décomposition… Tous ces éléments ont une signification double. Globalement mon choix se porte vers les formes sensuelles. Dans la nature, il y a beaucoup de séduction, mais l’ignorant s’expose à tous les dangers. Une fois que l’homme est sorti de l’écosystème, qu’il a abandonné sa place, il le voit comme hostile. Or, son désir de retrouver sa place dans l’écosystème est toujours en lui.
 

PL : Tu convoques plusieurs temporalités au sein d’une toile, diverses références, un monde rêvé et des faits historiques par exemple. Que cherches-tu à provoquer chez le spectateur ?

MB : Ce que tu dis sur les temporalités est juste. Parmi les outils du peintre, il y a la possibilité de s’offrir l’usage d’un temps qui répondrait à la logique poétique et non linéaire, j’ai effectivement tendance à exploiter les qualités propres du langage pictural.

Il y a un moment dans l’histoire de la peinture lors duquel des nouvelles technologies, les camera obscura et camera lucida, enfin les appareils photos, ont séduit fortement les peintres qui ont changé progressivement leurs manières de travailler, en cherchant à capturer l’instant, à retranscrire fidèlement la réalité observée. Cela a rapproché les images créées par les peintres des images que la photographie produira à partir de sa naissance. Réaliser un instant avec la peinture équivaut à imiter le processus photographique. Mais l’œuvre picturale est le résultat d’une synthèse entre le geste du peintre, sa perception du sujet et la présence du modèle dans le temps. Donc les temporalités dans la peinture sont naturellement autre chose que le temps linéaire.

J’ai tendance à douter de tous les récits, l’histoire étant un récit répété on la croit par convention collective, mais personnellement je suis davantage fasciné par l’inconnu, le récit qui défie les catégories habituelles, mais qui entre malgré la vigilance attentive de la raison, dans notre quotidien, par exemple à travers les rêves, qui racontent la réalité mais sans la catégorie du temps, de la reconnaissance des personnes, etc. Pour moi l’art fait partie de ce monde des rêves, raconte la réalité, mais comme la poésie, il utilise des instruments qui nécessitent une pensée perceptive, intuitive. Les citations et appropriations rendent les œuvres familières. J’aime que mes tableaux n’agressent pas l’observateur. La perception des œuvres se fait aussi dans le temps. Celui qui arrête le temps pour observer un tableau doit percevoir aussi son histoire, doit se reconnaître. Je respecte beaucoup « mon » public : l’observateur doit se sentir attiré par mes sujets et avoir l’envie de développer un raisonnement. La découverte d’un tableau est aussi un parcours, un voyage.

PL : De quelle façon penses-tu nos relations à la nature et comment plastiquement tentes-tu de nous faire prendre conscience de sa fragilité ?

MB : C’est une relation conflictuelle. Je pense qu’on fait globalement l’erreur de voir l’homme d’un côté et la Nature de l’autre. Parler de la Nature comme une entité, c’est une forme de visualisation, on imagine un sujet extérieur à nous avec lequel il faut être en relation. Je dirai que la Nature est un ensemble dont on fait partie. Il est vain aussi de croire qu’elle puisse avoir besoin de nous, je pense que la Nature est forte. Elle existait avant nous et existera après nous. Il ne faut pas penser la Nature avec des catégories moralistes ou religieuses. La Nature est par-delà le bien et le mal, elle trouvera le moyen de revivre, les espèces s’adapteront et d’autres prendront le relais même si cela prendra des millénaires. 

Nous sommes en train de détruire notre environnement. Quand on modifie un équilibre extrêmement complexe qui existe depuis des millions d’années avec pour prétexte de l’améliorer sans avoir la moindre connaissance des effets à moyen et long terme, cela peut signifier que la technologie a permis à l’homme d’atteindre les limites de son intelligence. Donc, je n’essaie pas de montrer la fragilité de la Nature mais plutôt la petitesse de l’homme. 

PL : Tes toiles proposent des paysages fantasmés qui tendent vers une contre-utopie. Quelles sources d’inspiration et quelles interrogations t’amènent-elles à des scènes ambiguës ?

MB : Depuis toujours on est habitué aux vendeurs d’utopies et la société en a besoin. Mais combien de ces utopies se sont-elles réalisées ? Les hommes sont des primates et comme les primates, ils suivent des leaders. Tant que ce fonctionnement continuera ainsi, il y a peu d’espoir pour que l’humanité puisse changer. Donc pour moi « croire » et « convaincre » sont les clés pour comprendre l’homme et son évolution. L’utopie est le rêve de ceux qui ont peu de perspectives. Les vendeurs d’utopies, de rêves ont bien sûr un futur déjà planifié. Le Paradis est la plus extraordinaire utopie jamais créée. Je ne tourne pas en dérision les gens qui ont une foi, grâce à eux l’homme a produit des choses extraordinaires comme les œuvres d’art, mais je me demande d’où vient cette foi capable de faire accomplir des actes extraordinaires aux hommes, jusqu’au sacrifice extrême.

PL : L’histoire des représentations religieuses sont également au cœur de tes peintures récentes. Un certain humour en ressort également. Que cherches-tu à exprimer en réinterprétant des figures religieuses au sein de paysages fantasmés ?

MB : Comme je disais, la foi est un moteur extraordinaire pour pousser les hommes à agir. Correspondrait-elle à un besoin d’avoir un mode d’emploi pour l’existence, d’être affranchis de la situation d’incertitude, du libre arbitre ? Il est vrai que la majorité des hommes délèguent les décisions à une minorité ou à un seul chef. La nécessité de croire à des choses extraordinaires, d’imaginer que le monde est beaucoup plus que ce qu’on voit me fascine. Alors, dieux, saints, héros, existent réellement car nous les faisons exister depuis des temps innombrables. Leurs histoires sont répétées bien plus que l’histoire de n’importe quel individu. Ainsi, dans mes tableaux récents, j’expérimente la fabrique de la divinité. 
 

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