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Je redoute l’hiver parce que c’est la saison du confort ! Arthur Rimbaud
 lettre aléatoire
 11 décembre 2020

#4 Xylographies
Sapin perdu
Une gravure de Noël par @verre_minuit.
À la demande générale, j’ai créé une galerie de photos pour partager plus d’images de mes rencontres. À contempler sur lafulgurante.fr et @lafulgurante_lettre (Instagram).
VISITE ÉCLAIR

Drôles d’impressions. Une incursion dans l’atelier de gravure Grafikas

Une salle lumineuse du Labo Novo, maison d’art et d’essai à Reillanne, occupée par des machines anciennes et du matériel d’imprimerie, accueille depuis le printemps 2019 des graveuses et des graveurs de divers horizons. Au sein de cette unité d’expérimentation de la gravure et de la forme imprimée, des artistes permanents ou invités se retrouvent pour fabriquer des images et transmettre leurs savoir-faire lors d’ateliers tous publics. Bienvenue dans un espace convivial d’explorations typo/graphiques.

Presse Minerve à platine, dite « pédalette », première moitié du XXe siècle. Toujours en fonction.
Entrer dans l’atelier Grafikas, c’est découvrir un de ces lieux où les rencontres fertiles et l’ébullition créatrice sont palpables dans l'air. Arnaud, artiste-verrier marseillais en résidence sauvage, fume une cigarette devant la porte, à côté du chat endormi au soleil. Penchée sur la composition typographique d’un calendrier, Maria, la curatrice du Labo Novo, paraît très absorbée. David nettoie ses mains tachées d’encre avec un chiffon. Celui qui se décrit comme « graveur-estampeur » ressemble à cet instant à un garagiste couvert de cambouis. Sur les murs, suspendues à des fils à linge, une profusion d'affiches et de cartes imprimées, où se mêlent textes poétiques, dessins figuratifs, messages engagés et images oniriques.

Vive la gravure populaire !

Les adeptes* qui gravitent autour de l’atelier pratiquent principalement la gravure sur bois et la taille d’épargne, en relief. Un type de gravure populaire, par opposition avec la taille-douce, plus précieuse et savante. « La gravure sur bois est la gravure de l’imprimerie, elle a un grand potentiel de reproduction », explique David, « tu encres ton image au rouleau et tu imprimes, c’est ludique, simple et rapide. » Il y a chez lui cette envie de partager avec tous, et à moindre coût, un art fondé sur des techniques ancestrales. L’atelier est ouvert aux adultes le mercredi, et des stages pour enfants sont proposés sur place ou en itinérance lors de festivals, et en milieu scolaire.

Une esthétique de l’imprimé

Les sources d’inspiration des graveurs de Grafikas sont multiples et tirées de l’histoire de cette technique. David raconte que la gravure sur bois est traditionnellement associée au livre. Une maison d’édition comme Ferenczi (fondée en 1879 à Paris) proposait des romans populaires illustrés par des gravures. La gravure se marie souvent au texte, en particulier à la poésie, comme dans le loubok russe et dans la littérature de cordel brésilienne, mode d’auto-édition à grand tirage de poèmes et de saynètes illustrées. Mais l’exemple le plus célèbre reste celui du jeu de tarot médiéval.

Des projets fantastiques

S’appropriant l'imaginaire fantastique de la gravure, le collectif Gravos – David Audibert, David Sedano, Renaud Eymony – prépare un film d’animation inspiré d’un conte de Julio Cortázar, « Fin du monde de la fin » (tiré du recueil Cronopes et Fameux, 1962). L’histoire : dans un monde où chacun est devenu scribe et produit une montagne d’information, la multiplication des livres imprimés devient incontrôlable, les bibliothèques débordent, et la pâte à papier finit par remplir les océans. Une critique de la prolifération de mots que génère la société numérique aujourd’hui, mais peut-être aussi un clin d’œil au désir frénétique de ces jeunes xylographes de diffuser encore et toujours leurs images sur du papier imprimé.

*Font également partie de la galaxie Grafikas : Julie Monta (relieuse) , Pénélope La Méta, Samuel Autexier et Dany Tavori. 

Infos pratiques :
Atelier Grafikas ouvert au public le mercredi de 18 h à 20 h, et à la carte en fonction des projets. 
Ateliers scolaires (écoles, collèges, lycées) sur demande.
23 place de l’Ormeau à Reillanne.

Facebook du Labo Novo
labonovo@gmail.com loeildulargue@riseup.net

BRÈVE RENCONTRE

David Audibert : « Il y a un aspect imagique et fascinant dans l’acte d’imprimer, quelque chose de l’ordre de l’apparition. »

David Audibert est né à Apt en 1978. Il travaille à Reillanne comme graveur-estampeur dans l’atelier Grafikas, où il est membre du collectif L’Œil du largue.

Abécédaire avant la lettre, en cours, 2020.
Comment décrivez-vous votre pratique artistique ?
Le graveur travaille d’abord dans la matière, en creusant, grattant, griffant, ponçant. Il y a une dimension artisanale forte, des gestes archaïques qui me portent. J’utilise le mot « estampage » pour désigner toutes les expérimentations résultant de l’acte d’impression au sens large et combinant images, lettres, mots, mais aussi textures, gestes, couleurs. Pour moi, « estampeur » c’est presque comme « peintre ».  Ça veut dire aussi « escroc, enfumeur » en argot...

Quels matériaux choisissez-vous ?
Pour la gravure, n’importe quel support plat qui peut recevoir de l’encre fonctionne. Le support s’appelle une matrice. Traditionnellement, c’est du poirier, mais on utilise souvent du contreplaqué de bricolage, ou du contreplaqué japonais. On creuse le bois avec des gouges et des burins. Les encres offset ou typo, un peu déclassées, sont récupérées dans des imprimeries. Cela permet de s’équiper simplement et d’être vite autonomes pour s’approprier les outils, inventer et diffuser des images.

Quels sont vos gestes et procédés de création ?
Je grave une image en bas-relief. Puis il y a tout un travail d’encrage et d’impression, de tirage des épreuves, de choix des couleurs, des encres et du papier. Pour imprimer, on peut utiliser une presse en fonte qui pèse plusieurs centaines de kilos, ou bien le dos d’une cuillère à soupe – à la japonaise. La presse permet d’écraser le papier sur la matrice pour qu’il aille chercher l’encre, selon le principe du tampon. C’est un peu une avancée à l’aveugle car on ne sait pas vraiment comment la gravure va se révéler un fois imprimée. Il y a un aspect imagique et fascinant dans l’acte d’imprimer, quelque chose de l’ordre de l’apparition. Les intentions premières deviennent souvent surprises et accidents.

Parlez-nous de votre travail en cours.
Ce projet a commencé pendant le premier confinement. C’était un peu comme de la gravure automatique, sans intention précise, des rêveries éveillées. Je voulais travailler des petits formats de manière rapide, capturer des idées fugaces. J’ai ensuite associé des lettres aux gravures et c’est comme ça que l’idée d’abécédaire est apparue. Le titre Abécédaire avant la lettre reprend un ancien terme d’imprimerie, « avant la lettre », qui qualifie l’épreuve d'une estampe réalisée avant l’impression du texte qui doit l’accompagner. C’est aussi une façon de désigner de manière désuète une production d’avant-garde.
J’essaye de jouer avec les liens entre une image et une lettre. Il y a trois éléments : la gravure, la lettre, et cet espace infini et invisible entre les deux, le blanc. C’est parfois littéral, parfois hermétique, parfois les deux. La lettre est aussi un élément plastique, une forme pure et une couleur. J’invite le spectateur à trouver lui-même des interprétations, à observer des rapports, à imaginer des scénarios, à entrer dans une rêverie. Il y a une narration aléatoire qui se construit d’une lettre à l’autre et dans la succession des gravures. C’est un abécédaire qui propose une série d’« in-définitions » et dont la règle du jeu s’invente et se modifie tout au long de la création.

Site de David Audibert Facebook de L’Œil du largue

L’INCRUSTE
 
Cet ascenseur ne bouge plus depuis trente-cinq minutes. Les lambris luisent jaune. Elle évite le miroir piqueté. Dans son sac, une vie — la sienne ? Dans la cage, son corps prolonge les câbles coulissant vibrants puis arrêtés. Oscillations imperceptibles.
Esther Salmona
Envoyez votre nouvelle courte (255 signes maximum).
ALLONS ÉCOUTER

Les mangeurs de hérissons  Radio Petit Zéro  12 décembre 9 h 30
Un documentaire sonore de Cabiria Chomel à découvrir sur les ondes de Radio Zinzine ou en ligne
.

Les échappées sonores
Balades proposées par le Théâtre Durance
Des compositions musicales imaginée spécialement pour la marche, à télécharger puis à écouter tout au long d'un parcours. Deux balades déjà disponibles
en ligne : Lurs (Benjamin Dupé) et Les Mées (Thierry Balasse).

Qui écrit ?
Cette lettre est préparée par Raphaële Javary, journaliste indépendante explorant la création entre Lure et Luberon.

Remerciements
Ilya Green (conseils graphiques et œil critique),  Louise Girard (à l’affût des bonnes idées), Maxime Chevallier (complice d’excursion), Pauline Hessel (correctrice amoureuse), Bénédicte Bourcier (marseillaise hospitalière), Virginie Bellot (ma meuf sûre) et tous les autres.

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