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 P O É S I E

À

L A  U N E



Une sélection de l'actualité
des poètes, des poèmes et de la poésie
proposée par l'Union des Poètes & Cie
"L'u
nion de tous ceux qui - forcenés des mots -
écrivent, promeuvent
ou défendent des textes inclassables 
"

DÉCEMBRE 2020 - JANVIER 2021
Cette édition annule et remplace celle qui a été diffusée ce jour à 11.11, dont quelques bugs logiciels ont notamment modifié:

- le texte du "Mot de Paul de Brancion": il fallait lire "
On veut interdire aux journalistes et photographes de rendre compte des bavures éventuelles des gardiens de la paix, de filmer la police dont les écarts sont de plus en plus fréquents.";

- la photographie de Jean-Pierre SIMÉON publiée en lieu et place de celle de Jude STEFAN.

Nous présentons nos plus vives excuses à l'un et à l'autre.

 
La rédaction de Poésie à La Une 



Le mot de Paul de BRANCION
Président de l'Union des Poètes & Cie
 
ARTICLE 24: ACAB-LANT *

«Nous les écrivains de poésie, nous avons l'habitude de travailler avec la langue mais, pour ce faire, il nous faut distinguer le monde, le voir, le considérer, afin de le dire.
On veut, ces temps derniers, nous empêcher de regarder.
On veut interdire aux journalistes et photographes de rendre compte des bavures éventuelles des gardiens de la paix, de filmer la police dont les écarts sont de plus en plus fréquents. C'est évidemment inadmissible. Lorsque qu'ils travaillent avec un sens aiguisé de l'objectivité et de la vérification, les journaux sont, d'une certaine façon, nos yeux et nos oreilles. En cherchant à entraver le travail de la presse qui est de nous rendre compte du monde, le mettre à notre disposition, on restreint notre liberté.Plus préoccupant encore, on veut empêcher les citoyens que nous sommes de voir ce qui se passe et aussi d'en parler librement quand nous en sommes témoins.
Comment pourrions-nous exister si l'on nous confine dans l'aveuglement?
Au passage, on bafoue la justice qui n'aura plus aucun prix sur quoi s'appuyer pour rétablir l'état de droit. On nous autorise à travailler, à nous rendre sur les chantiers, à consommer à certaines heures puis à rentrer chez nous pour échanger par vidéo-conférence notre ignorance du monde réel désormais dissimulé, voilé. Il nous est permis d'inventer des réalités virtuelles par le biais des réseaux sociaux, qui résonnent souvent de fausses nouvelles, d'égotismes gnan-gnan et de subjectivités torturées.Ainsi, fait sur le lit d'une dictature de la surveillance sécuritaire globale. C'est une situation dangereuse.
Profitant de notre relative apathie dictée par le virus, le Saint Darmanin, se croyant dard-malin, concocte une loi «virile» qui interdit de filmer les flics en train de tabasser les citoyens lambda, la proposition au président qui donne son feu vert. Faut se mettre la police «in the pocket», on ne sait jamais, après le confinement la populace sera ingérable. Alors ok, Darmanin admirateur du lybien Sarkozy, a le feu vert pour proposer sa scélérate loi. Si les parlementaires rechignent, on s'appuiera sur la droite, le Sénat et l'extrême droite, ça constituera une future majorité présidentielle. Bingo, sans la sottise de quelques «BACEUX»** , ça aurait fonctionné.
C'est ainsi que la France, patrie des droits de l'homme et de la femme, est en train de devenir la patrie de l'impunité des pandores et du Parlement potiche. C'est ça, mettre Rimbaud au Panthéon, ça va bien dans le sens de la confusion généralisée des valeurs, tout comme déclarons hautement que le nucléaire est une énergie propre !

* CAB: abréviation d'une expression américaine signifiant: «tous les flics sont des salauds»
** Brigades anti-criminalité de la Police nationale
L'ACTUALITÉ

 DERNIÈRE MINUTE 

 RETOUR DU MARCHÉ DE LA POÉSIE!  


Sous réserve d'une situation sanitaire incertaine
le 38ème bis Marché de la Poésie
devrait avoir lieu du mercredi 9 au dimanche 13 juin 2021
place Saint-Sulpice, Paris 6ème

Le Luxembourg en sera l'invité d'honneur
Les États généraux permanents de la poésie seront consacrés en 2021 aux «Finalités du poème».

LA DISTANCE ENTRE MANIFESTATIONS ARTISTIQUES ET BESOINS DU CITOYEN CREUSE UN GOUFFRE: lors d'une rencontre organisée par Télérama, le Théâtre de la Ville et la Scène de recherche de l'ENS Paris-Saclay, l'heure n'était pas à la plainte , mais au constat, plus navré qu'énervé, de l'injustice de l'arrêt imposé aux artistes alors que les lieux de culte sont ouverts et qu'il ya foule dans les grands magasins; la pilule ne passe pas et elle a un goût de poison qui n'augure rien de bon. Lire

LES FESTIVALS DU SPECTACLE VIVANT NE RIMENT PAS TOUJOURS AVEC OUVERTURE SOCIALE:  un nouveau volet d'étude «SoFEST!», Dédié aux publics des festivals, témoigne de l'essor du phénomène de «festivalisation» et du renouvellement des publics. Lire
 
CETTE CRISE QUI ÉTOUFFE LA CULTURE: la crise sanitaire aggrave la situation de précarité dans laquelle se trouve la culture et ses acteurs; une étudiante ardéchoise en médiation culturelle livre son expertise et apporte un éclairage nouveau sur l'état actuel et l'avenir de la culture. Lire

DES LECTURES DE POÈMES DANS DES ÉPICERIES BIO:  les mesures sanitaires liées à l'épidémie de Covid-19 ont coupé les artistes de leur public et pour renouer le lien, une compagnie organise des représentations dans des lieux insolites comme des épiceries bio. Lire
RAPPEL

POÉSIE À LA UNE a publié au cours des dernières semaines 2 numéros spéciaux:

- «SPÉCIAL CRISE»  Lire

- «SPÉCIAL LIBRAIRIES» Lire
 LETTRE OUVERTE À LA COVID 19  
 
Cher virus

Contrairement aux apparences, cette adresse n'a pas pour mais de t'exprimer mon attachement mais de dresser le coûteux bilan de ton passage dans le monde des humains, alors même que nous n'avons pas encore trouvé les moyens de t ' anéantir. 
Tu as d'ores et déjà été d'énormes dégâts.
À l'image de tes prédécesseurs, variole, peste et autre choléra, tu as décimé plusieurs centaines de milliers de personnes, dont la seule faute aura consisté à être fragiles, du fait de leur âge, de leur poids ou d'une identification physiologique. Avant de disparaître, la plupart de ces victimes ont supporté les pires souffrances dues aux traitements lourds qu’ils ont endurés.
Elles ont également été condamnées à des conditions de départ indignes, une bonne partie d'entre elles ayant été privées d'obsèques.
Certaines ont échappé au verdict macabre, mais il est d'ores et déjà avéré qu'elles doivent vivre avec de lourdes et multiples séquelles, physiques, psychologiques et affectives.
L'entourage familial les a accompagnés jusqu'à leur dernier souffle, les soignants et aidants exposés à ta menace, pour tenter de protéger et de sauver les vies qui veulent l'être.
Il convient également d'inclure à ce bilan, les inégalités que tu as indirectement accentuées, à l'image de celles qui se sont manifestées pendant les périodes de confinement. Les plus aisés en ont profité pour retrouver les bienfaits d'une vie plus proche de la nature, tandis que d'autres, moins bien lotis, ont subi les affres matériels et relations d'une cohabitation forcée, générant notamment une recrudescence des violences familiales . Dans ce contexte, les premiers ont réussi à épargner, alors que les autres vont emprunter. Enfin, le retour conjoncturel des femmes au foyer pour cause de télétravail, risque de se pérenniser, actant une rupture dommageable dans la lente progression vers l'égalité femmes-hommes.
A ces effets individuels et intimes, il faut ajouter les impacts collectifs et publics qui eux aussi vont changer le cours de la vie de millions de gens. En effet, l'impossibilité ou l'interdiction d'exercer une activité va engendrer la disparition d'innombrables agents économiques et entraîner la perte d'emploi ou de revenu pour un pourcentage à ce jour incommensurable de la population. Il faut également contribuer au remboursement des montagnes de dettes accumulées par les États pour faire face aux divers impacts de la pandémie.

Dans leur tentative de résister à une entreprise de destruction massive, les États ont également dû mettre en œuvre des dispositifs catégoriels visant à limiter la circulation et à contrôler les flux dans lesquels tu t'immisces.On peut comprendre ce type de décisions, pourvu qu'elles soient équitables et cohérentes. 
Ainsi pour les industries de l'échange - restauration, hôtellerie, voyage… - qui ont été les premières et les plus lourdement touchées.
Ainsi pour les nombreux métiers de la culture, qui vivent pour et par la création d'œuvres visitées, écoutées ou regardées… et de liens rassemblant leurs publics de visiteurs, d'auditeurs ou de spectateurs, qui ont été contraints de se cloitrer.
Mais alors, quelle équité à laisser les marchands du temple de la consommation poursuivre leurs commerces et continuer à vendre leurs marchandises essentielles à des foules de clients se pressant à leurs portes et dans leurs rayons, là où tu excelles à proliférer ?
Mais alors, quelle cohérence à laisser les cultes poursuivre l'organisation de rites collectifs qui réunissent de vastes communautés de fidèles, lorsque l'on sait que tu ne recules devant aucune prière ?
Tu dois donc te réjouir au spectacle de ces incohérences, qui s'ajoutent aux nombreuses erreurs, omissions ou approximations commises par les gouvernements. Elles facilitent sûrement votre tâche et affaiblissent la vérification des différentes mesures plus ou imposées à des populations de plus en plus de défisantes.

Il existe cependant un secteur où les effets de ton mortel poison restera limité : celui de la poésie. Depuis l'origine du monde, elle a résisté à tous les adversaires qui ont cherché à la contenir. Les collègues-virus qui t'ont précédé savent bien qu'ils ont même stimulé l'activité des poètes. Tu dois seulement savoir que la poésie peut, mieux que tout autre art, voir, entendre, sentir, ce qui se cache au fond de chacun, y compris l'inavouable, le non-dit, l'indicible, et qu'elle excelle à évoquer, dire, montrer, nommer les choses de la vie et de la mort. Tu n'échapperas pas à ce traitement. Tu dois t'attendre à ce que les poètes du monde entier témoignent sans peur du mal que tu auras causé et jugent sans faiblesse l'injustice et la douleur que tu auras semées.
 
La Rédaction en chef, Poésie À La Une




CONFUSION SÉMANTIQUE

ET

INCOHÉRENCE TACTIQUE

 
Les gouvernants revendiquent à loisir leur volonté de faire société, de protéger le vivre ensemble et de s'opposer à tous les adversaires de la liberté individuelle et collective.
Mais ces ambitions fort louables sont exigeantes et elles obligent leurs zélateurs, qui parfois s'expriment et agissent à rebours de ces incantations.
Ainsi de ceux dont les discours et les actes reflètent mal les convictions affichées.

Pourquoi alors à employeur les termes de gestes «barrière» et de distanciation «sociale» qui n'incitent pas vraiment à la cohésion recherchée? De simples gestes et distances «sanitaires» n'auraient-ils pas mieux convenus?


Pourquoi encore convoquer la défense de la laïcité pour justifier la lutte contre les extrémismes et en même temps paralyser la vie culturelle et laisser pratiquer les cultes? Une égalité de traitement transparente entre citoyens et acteurs traités en adultes responsables ne produirait-elle pas de meilleurs effets?

A moins qu'il soit un jour possible d'aller au cinéma de l'église, au de la mosquée, au musée de la synagogue ou au concert du temple…
CE QU'APPREND LE DÉBAT SUR LA FERMETURE DES LIBRAIRIES: les réactions suscitées par cette décision sont le symptôme d'autre choisi que d'un manque de livres à bouquiner pendant le confinement; il s'agit aussi de défendre les petits commerçants et l'identité culturelle française face à la plateforme de la culture. Lire

UN BON LIBRAIRE EST UN LIBRAIRE MORT (ADMINISTRATIVEMENT):  ça fait des années qu'on essaye de faire lire les Français et la solution était là, à portée de main: il suffisait de fermer les librairies! Lire
EN 2020, ÉCRIRE DES LIVRES N'EST TOUJOURS PAS CONSIDÉRÉ COMME UN TRAVAIL:alors que les gens semblaient sur le point de s'étriper au sujet des librairies, on a oublié un peu vite le fonctionnement de ce qu'on appelle la chaîne du livre, et notamment le premier maillon de cette chaîne, l'être blafard et neurasthénique qui se tient tout au bout et qui passe ses journées en compagnie de ses amis imaginaires, autrement dit l'autrice, ou l'auteur. Lire
LA PHRASE 
« La parole des écrivains de poésie a été comme absentée »  : Paul de BRANCION, Président de l'Union des Poètes & Cie a commenté ainsi l'annulation du 38ème Marché de la poésie. Lire
LE CHIFFRE

3%
 
C'est le pourcentage de poètes bénéficiaire de l'aide d'urgence accordée par le CNL / SGDL pour pallier les lacunes du Fonds national de solidarité nationale très tardivement accessible aux auteurs. Entre avril et septembre, 2.311 aides mensuelles ont été accordées à près de 700 auteurs, pour un montant total de 2,26 millions €, soit en moyenne une aide mensuelle de 1.000 € par auteur et un montant total d'aides perçu sur l ' ensemble de la période de 3.330 € par auteur; 54% des bénéficiaires sont des autrices et 46% des auteurs; la répartition entre les genres étant la suivante: romans 28%, livres pour la jeunesse 20%, traductions 14%, BD 14%, essais 8%, livres pratiques 8%, poésie 3%, livres d'art 3%, textes dramatiques 1% et biographies 1%. Lire
POÈTES
ÉDITION EN FRANÇAIS DE RECUEILS DE LOUISE GLÜCK, PRIX NOBEL DE LITTÉRATURE 2020: «L'Iris sauvage» et «Nuit de foi et de vertu» seront édités en mars 2021 dans la collection «Du Monde entier» de Gallimard. Lire
RIMBAUD AU PANTHÉON, LES RIMBALDIENS SE REBELLENT: une panthéonade, c'est ainsi que les fanatiques ont qualifié la proposition de faire entrer RIMBAUD et VERLAINE au Panthéon; le rejet fut presque unanime et l'occasion pour les rimbaldiens de montrer leur amour de la division. Lire
«BAUDELAIRE ÉTAIT UN PUNK DÉFONCÉ DU MATIN AU SOIR! »:  Entretien avec Jean TEULÉ auteur d'une biographie de l'auteur des« Fleurs du mal », politiquement incorrecte, mais savoureuse. Lire
SIMON JOHANNIN: «LA POÉSIE, C'EST PEUT-ÊTRE LA DÉAMBULATION DANS LES RUINES DU RÉCIT»: entretien avec un jeune romancier parmi les plus déterminants de la littérature contemporaine, entrant en terre de poème. Lire
UN POÈME INÉDIT DE MARCEL PROUST SORT DE L'OMBRE: 130 ans après avoir été écrit un texte de jeunesse a été découvert par la Société des amis de Marcel Proust, un poème qui évoquerait une histoire d'amour entre deux hommes. Lire
NANNI BALESTRINI: dans son dernier ouvrage, le poète italien membre de la «néoavanguardia» des années 1960, exilé en France pour fuir la répression des années 1980, décédé en 2019, ne demande pas ce qu'est la poésie, mais ce qu ' elle fait, ce qu'elle peut faire: la poésie crée du chaos, elle crée une langue qui est un chaos indissociable d'un monde qui est lui-même un chaos. Lire
MARC ALEXANDRE OHO BAMBE, DIT «CAPITAINE ALEXANDRE»: poète slameur, lauréat du Prix Paul Verlaine de l'Académie française 2015, a suivi les traces des auteurs humanistes, René CHAR (d'où vient son nom de scène Capitaine Alexandre), Aimé CÉSAIRE… sa poésie évoque le don de soi. Lire
LA POÉSIE

DANS TOUS SES ÉTATS
CONSULTATIONS POÉTIQUES TESTÉES ET APPROUVÉES : coup de fil d'un inconnu, dialogue intimiste et, en conclusion, un poème lu ou un morceau de musique joué; voyage dans les coulisses des entretiens poétiques et musicaux organisés par le Théâtre de la Ville. Lire
 
LA POÉSIE CONTEMPORAINE S'ENLISE DANS L'ESSOUFFLEMENT ET LE «DÉJÀ-VU» : loin de la thèse hégélienne qui plaçait l'art du poète (l'éclipse d'un genre) au sommet de la hiérarchie esthétique, la poésie n'est plus l'enjeu de conflits ouverts; plus de querelles, plus de manifestes, plus de grandes chapelles;elle ne paraît plus à même de s'articuler à quelque grand projet idéologique prenant en compte l'ensemble des aspirations d'une collectivité à un moment donné de son histoire. Lire

LES LYCÉENS, DES POÈTES CONTEMPORAINS ? : il existe un média singulier, participatif et artisanal où la pratique de la poésie mène une existence certes souterraine, mais significative: la presse lycéenne. Lire
 
CE QUE CACHE LE NOM DES POÈTES FRANÇAIS : la poésie fait partie de l'art et ce n'est pas un hasard, si l'art vient se loger dans les noms de poète: dès la Renaissance, Pierre de RONSARD se déclinera entre l'art et la ronce, on peut décliner Paul Verlaine en «vers de laine», on trouve de l'eau, pour Jean de LA FONTAINE, de l'oiseau pour Pierre CORNEILLE ... Lire

MAINTENANT GOOGLE S'OCCUPE MÊME DES VERS : la plateforme propose une nouvelle fonctionnalité décrite comme «  une muse expérimentale qui grâce à l'IA vous aide à composer de la poésie inspirée par des poètes américains identifiés  ». Lire
 
LE MÉTIER DE LIBRAIRE SUSCITE TOUJOURS PLUS DE VOCATIONS : «Rêve de gosse» ou déclic post-accouchement, le moins rentable des commerces indépendants, ci plus plus d'intérêt, au point que l'école qui forme au métier affiche complète. Lire

ÉDITION. CHEYNE, SOLIDEMENT ENRACINÉE : éditeur ardéchois de poésie (mais pas que) fête 40 ans d'exigence et de liberté. Lire
DIALOGUE DE POÈTES

SUR LA POÉSIE ET SON MARCHÉ
Martin RUEFF (à gauche) Pierre VINCLAIR (à droite)

Au moment de l'annonce du report du Marché de la Poésie, Martin RUEFF,  traducteur, poète et philosophe, et Pierre VINCLAIR, agrégé de philosophie, écrivain et poète, nous ont adressé un texte du dialogue qu'ils comptaient avoir à la tribune du Marché...


Martin RUEFF   : Cher Pierre, alors que nous étions invités par le Marché de la poésie pour parler ensemble du "Statut social du poète", formule à laquelle nous étions dit ensemble que nous n'entendions pas grand choix, voilà que l'occasion qui nous était donnée d'exposer notre perplexité face au titre qui nous rassemblait, nous est refusée. La pandémie ferme les auvents du marché et de la liturgie saint-sulpicienne. Nous ne monterons pas sur scène. L'occasion n'est peut-être pas mauvaise de nous demander alors, en fiction continue de dialogue écrit, ce que nous n'aurions sans doute pas pu nous dire sur cette scène. 

Pierre VINCLAIR  : Avant de nous demander ce que nous n'aurions pas pu dire, laisse-moi d'abord essayer d'expliciter ce que tu suggères que nous aurions dit - à savoir (je me permets de dire «nous», mais tu me détromperas si tu n'avais pas en tête la même idée) que nous ne comprenons pas ce que signifie ce «statut social du poète». Non pas que nous croyions que le poète n'a pas de statut social (qu'il est un homme sans statut , un nomade administratif dont les semelles de vent lui permettent d'échapper aux cas des tableurs Excel de l'Urssaf Limousin), mais que nous comprenons aussi peu la question que si l'on nous demande la couleur du théorème de Pythagore. Un poète est quelqu'un, il écrit des poèmes.Il a ou il n'a pas de statut social comme la plupart des gens. Une fois cela dit, voilà ce que je n'aurais pas énoncé sur cette scène - non pas parce que cela m'aurait été interdit bien sûr! mais parce que je n'aurais pas osé, essentiellement par correction envers nos hôtes (qui pourront en revanche choisir de ne pas publier ce paragraphe s'ils jugent qu'il dessert leur cause - et c'est tout différent - raison pour laquelle je me permets de l'écrire ici): que c'est troublant d'être entouré soudain de gens qui présentent de la poésie. condition non seulement au sens faible de «situation existentielle» mais aussi au sens fort de «condition de possibilité») est celle de la confrontation à l'indifférence généralisée, voire à l'hostilité,Écrire de la poésie, c'est être, dans le meilleur des cas (celui des démocraties libérales) une petite souris, et dans le pire (celui des régimes dictatoriaux) un paria. D'où ce trouble: qu'est-ce que ce petit monde où la poésie est célébrée ? Je parle du marché de la poésie. Pour le dire autrement: je ne sais pas si le poète a un statut, mais je sais qu'il est en embuscade. Et voilà donc ce que je n'aurais pas pu dire sur cette scène: il ne peut y avoir de poètes dans un microcosme qui célèbre la poésie. Il n'y a pas de poètes au marché de la poésie. Je laisse chacun débrouiller alors les raisons de sa présence potentielle. La pandémie en empêchant les retrouvailles nous rend à l'embuscade qui pour nous compte.Et toi, Martin, que n'aurais-tu pas dit sous les vivats?

MR  : Nous voici débusqués. Deux éléments retiennent dans la fermeté nette de ta réponse, Pierre. Leur articulation est ma réponse. D 'abord et fondamentalement - «l'embuscade». Je te suis. Êt re embusqué c'est dans les bois Être, à couvert, Comme un Robin. Moins poète des bois que poète du guet-apens - Baudelaire donc. Walter Benjamin : «sous les masques qu'il utilisait, le poète, chez Baudelaire, préservait son incognito». Le poète embusqué est toujours là, prêt à dégainer, mais il le fait car plus efficacement qu'il travaille incognito. Ni poète proclamé, ni poète honteux: poète incognito.J'aurais pleuré en lisant cette phrase tant elle m'expliquait ma propre position. Elle correspondait à plusieurs décisions. Défendre et illustrer la poésie par tous les moyens; se méfier de la publicité; brouiller les identités. La question du statut social du poète s’inscrit dans celle des options que laissent à chacune et chacun les croisements entre ses identités professionnelles, sociales et son incognito.

"L'embuscade et l'incognito sont les formes de résistance moderne
à l'assignation à résidence du poète par le capitalisme contemporain"

L'embuscade et l'incognito sont les formes de résistance moderne à l'assignation à résidence du poète par le capitalisme contemporain qui veut des amuseurs de galerie, des poètes à écharpes, des intellos d'avant-garde ou des aventuriers, mais qui préfère en tout état de cause que la poésie soit portée par des «non-poètes» - romanciers, musiciens, peintres dont on valorise les poèmes - plutôt par ceux qui défendent le nom incognito. Prendre au sérieux la question de la «situation» exige donc qu'on distingue plusieurs niveaux de réponse - un niveau lié aux conditions de vie matérielle des poètes, de leurs éditeurs, de leurs lecteurs; un niveau lié aux conditions de la diffusion de la parole et du langage à l'époque où cette diffusion est devenue un marché des plus porteurs, des plus juteux.Le poète ici n'a pas de compétence particulière en tant que poète, mais s'il s'avère à cette réalité politique, il est fort probable que son art ne soit pas situé. C'est à réfléchir à cette situation que tu travailles dans Prize de vers en creusant la triple question de l'écriture, du langage («une rhétorique de l'illisible») et surtout de la communauté. 
Que faire alors au marché de la poésie? Qu'en faire? Tu portes l'estocade: ce microcosme qui célèbre la poésie glorifie un art mineur par la situation et contribue à cette minoration par cela-même qu'elle est célèbre. Danse dans une réserve, fleurs sous cloche, foire aux cèpes ou «ppp» (petits producteurs de pays comme petits producteurs de poèmes) alors que, non loin, une zone d ' C'est la panthère dans la cage de Rilke:  

" Im Jardin des Plantes, Paris
Sein Blick ist vom Vorübergehn der Stäbe
müd geworden, daß er nichts mehr hält.
Ihm ist, als ob es tausend Stäbe gäbe
und hinter tausend Stäben keine Welt."                     

"Au Jardin des Plantes, Paris
Son regard, à force d'user les barreaux  
s'est tant épuisé qu'il ne retient plus rien.
Pour elle, c'est comme s'il y avait des milliers de barreaux
et derrière ces barreaux par milliers, aucun monde." 

Te voilà Pierre, au Marché de la poésie: une panthère en cage. Et ta thèse: il n'y a pas de poètes au marché de la poésie signifie: il n'y a pas de panthère dans la cage. Ce qui signifie: en tant qu'elle est en cage, la panthère n'est plus. Cette tombe, teintée d'un désespoir résolu et qu'anime une révolte.

Alors voilà ce que j'aurais dit après toi: en tant que poètes, nous ne pouvons pas être des poètes au marché de la poésie à moins que nous ne dénoncions les barreaux.Mais ce que tu dis, toi, c'est que parler depuis l'intérieur des barreaux, c'est contribuer à leur solidité.

D'où, compromis exclus, la raréfaction des possibilités: le dynamitage des barreaux et le grand large (l'incognito rimbaldien), le creusement de l'incognito par le brouillage des identités et l'endurance lente (l'incognito mallarméen). La conviction en outre que l'amitié des poètes a une valeur politique et qu'elle est bien éloignée de toute forme d'amicale.

PV : Cher Martin, ta réponse m'honore et me fait rougir (autant que rugir comme panthère en cage). Je suis absolument convaincu par chacune des phrases, chacun des constats que tu énonces - à une réticence près, sur deux concepts que tu emploies et qui marquent que, si je pense la même chose que toi, c'est malgré tout nettement plus tièdement. Le premier est celui de «capitalisme», le second celui de «compromis». Même si, étant d'accord sur tout le reste, et ta pensée faisant système, je suis encore d'accord avec les propositions où ils apparaissent, je voudrais mettre un bémol.

 "Je ne considère pas les produits de la poésie comme purs ou sacrés, et j'aime autant écouter un bon morceau de rap, que le jazz qu'Adorno condamait comme simple divertissement, une sonate de Beethoven ou Different Trains"

Pour le premier, j'ai peine à caractériser la société française contemporaine par le seul terme de capitalisme. Du point de vue économique en tout cas, nous sommes bien classés pour savoir que l'économie du livre de poèmes (ultra-subventionnée) n'est pas capitaliste. Je sais que tu as travaillé la notion de «capitalisme culturel» et c'est sans doute en ce sens (et non au sens strictement économique) que tu entends le terme. Le capitalisme, dont je reconnais volontiers que c'est la tendance fondamentale de la société, produirait aussi, directement ou indirectement, ses effets sur les œuvres dont la production échappe à sa logique; en l'occurrence, la valorisation des produits de «l'industrie culturelle» aboutirait à l'ostracisation des «véritables œuvres d'art».Pour ma part, je suis mal à l'aise avec cette dichotomie. de nature entre ce qui serait le «vrai art» et ce qui relèverait de «l'industrie culturelle». Je ne considère pas les produits de la poésie comme purs ou sacrés, et j'aime autant écouter un bon morceau de rap, que le jazz qu'Adorno condamné comme simple divertissement, une sonate de Beethoven ou Different Trains . Il en va un peu différemment des livres (j'ai du mal à lire des romans, par exemple), mais ce n'est pas par défiance envers le capitalisme culturel. Au contraire, c'est que je trouve bien souvent les poèmes plus divertissants et les romans, avec leurs grosses ficelles, le fruit d'un artisanat ridiculement appliqué - ce que j'ai contre la poésie des non-poètes, chansonniers et prosateurs, c'est qu'elle m'ennuie. On touche au deuxième concept sur lequel je voudrais porter un bémol: «compromis», qui indique la possibilité d'une position de pureté morale. Non seulement je ne me sens pas spécialement pur en écrivant de la poésie, mais je ne me sens pas sali d'aller au marché de la poésie - sinon je n'aurais pas répondu positivement à l'invitation. Accepter de m'y rendre, c'est moins, à mon avis, me compromettre, que «négocier», c'est-à-dire faire de la politique. De même, publier des livres dans une entreprise capitaliste comme Flammarion, sur Facebook, échanger avec toi sur WhatsApp, écrire des poèmes sur un MacBook, ce n'est pas à mon avis, me compromettre. C'est négocier parmi différentes possibilités dont aucune n'est pure, en gardant en tête la fin que je vise (mettre en valeur la poésie à laquelle je crois) - et que tous ces moyens, aussi «impurs» soient-ils, me gagner de mieux atteindre.De même pour ma présence au marché de la poésie: un tas de choses n'y aurait pas été possible (comme y être en poète; j'y aurais été en bateleur, comme tout le monde), mais d'autres choses y ont été possibles: parler de quelques œuvres et, plus essentiellement pour moi, rencontrer deux ou trois amis éditeurs, qui interviennent aussi à ce marché, et que je ne considère pas comme des agents du capitalisme sous prétexte qu'ils viennent y vendre les livres qu «Ils éditent. Eux aussi négocient. Mettent dans la balance ce en quoi ils croient avec les moyens nécessaires, dans le monde tel qu'il est, pour le mettre en avant. Pour survivre, et continuer à diffuser de beaux livres.

MR  : Cher Pierre. À questions graves, réponses graves : merci à toi. Nous échangeons des radicalités : dynamitage et incognito. «Compromissions exclues» voulait dire pour moi: si l'on se rend au marché alors ce n'est pas pour s'y compromettre, ou pour y compromettre le lien au poème - ce qui laisse deux possibilités. S'y rendre, c'est apprendre à négocier loin de toute pureté impossible et mauvaise. Je te suis. Cette pureté, c'est la grandiloquence qui se hausse hors sol. Asphyxie. Soit. Une fois pour toutes: la poésie n'est pas «par-dessus le marché». Nous sommes d'accord - le marché comme espace de transactions et de négociations: à tous les étages.Et la conviction de leur nécessité. L'envie d'aider, d'appuyer les éditeurs, les diffuseurs de poésie, les annonceurs aussi. Et pourtant, aussi, tu le sais bien, souvent aussi, impression de solitude qui étreint. Sans doute faut-il préciser, détailler, ce qui se fait au marché pour étager les niveaux de la transaction et peut-être aussi les différentes solitudes qu'on y peut éprouver et que l'amitié console.
Je reviens sur le premier point qui engage loin. Quels que soient les raffinements qu
’il convient d’y apporter, quels que soient les aménagements qu’elle réclame, et en dépit de mes incompétences, je ne renonce pas à décrire la situation socio-économique contemporaine comme une phase du capitalisme – par où on peut l’entendre tout simplement la concentration du capital dans les mains de quelques-uns – ce qui implique la dévastation de la vie des autres. Il ne me semble pas que les experts qu’on peut lire aujourd’hui apportent un démenti à ce constat. Cette définition est-elle un vêtement trop grand qui cacherait la singularité des luttes ? C’est l’objet de la description politique. Nous ne devons pas nous soustraire au défi de décrire l’époque.

"Si le théâtre des opérations du poète est le langage, le poète ne peut pas ignorer que le capitalisme occupé le langage et que" l'industrie culturelle "n'est pas étrangère à son destin"

Qu'est-ce que la poésie à faire avec cela? Le poète n'a ici aucun privilège. Mais il faut rappeler qu'une grande partie de ce capital est liée à la circulation de la parole, des mots, des symboles (par les réseaux sociaux, les médias, la télévision aussi etc.).
En d'autres termes: si le théâtre des opérations du poète est le langage, le poète ne peut pas ignorer que le capitalisme fait le langage et que «l'industrie culturelle» n'est pas étrangère à son destin. Je ne crois pas que ce soit complètement nouveau et je tiens Les Illusions perdues pour le livre le plus éclairant sur la situation présente évoque la trajectoire sociale d'un poète de province qui devient journaliste. Il tourne le dos à ce qu'il a de plus cher - sa vocation, ses amours.L'amertume le rend cruel.
Pour ce qui est du concept d'industrie culturelle, tu as raison de te méfier et il faut obliger le tenir à distance s'il est l'expression de ce «pessimisme culturel» qui appartient en propre à l'idéologie bourgeoise et définit une des formes de la réaction et de son protectionnisme avare. Il va de soi au contraire que «culture de masse» et «vulgarisation populaire» ne sont que l'autre face du caractère réactionnaire de la culture bourgeoise. Et tu as encore raison de pointer cette contradiction chez Adorno lui-même. Il reste que la poésie peut constituer un instrument de dialectisation de notre rapport à la «culture de masse» et à la destruction de l'expérience sensible du langage.Je pourrais revenir sur ce point en discutant le livre récent de Robert Kurz, L'industrie culturelle au 21è  siècle. De l'actualité du concept d'Adorno et Horkheimer (Paris 2020). J'aimerais aussi, et ce n'est pas une autre piste, considérer notre situation en me demandant comment les poètes répondent à l'injonction politique de l'adaptation - je pense ici à Barbara Stiegler et à son Il faut s'adapter ( Paris 2020). Il me semble que le creusement de l'incognito est une forme d'adaptation sans compromis et qu'il permet la transaction.

PV  : Cher Martin, merci infiniment pour ces précisions. D'abord, pour les «compromis»: mea culpa , je n'avais pas compris ce que tu voulais dire! Ma bêtise aura malgré tout eu le mérite de nous faire aborder ce point (ce point d'accord) important: la poésie n'est pas, je reprends ta belle formule, «par-dessus le marché».Ce qui signifie à la fois qu'elle ne peut pas se prévaloir d'une pureté morale hors-sol (son existence même dépend de tout un tas de médiations qu'on aurait pu juger impures - ce qui me semble devoir infirmer la position des Romantiques: elle n'est pas quelque chose de sacré par où s'exprimerait, dans l'éther du sens, la vérité de l'être), et qu'elle n'est pas non plus un supplément d'âme, quelque chose qui vient «en outre» (et seulement «par-dessus le marché», à la fin, les choses sérieuses une fois négociées). Ni tout (le lieu pur et sacré de la révélation), ni rien (le supplément d'âme sans conséquence):
Qu'elle ne soit pas tout n'empêche pas d'en avoir une approche radicale et d'organiser sa vie autour de cette pratique.Simplement, en reconnaissant que cela n'est pas foncièrement différent de ceux qui orientent leur vie, par exemple, autour des performances de leurs corps (comme les champions sportifs). Plus généralement la poésie, effort et conquête de la liberté dans la langue, n'est pas tout parce que la langue n'est pas tout; elle est un travail, capable comme tous ceux pour certains sur peut se passionner, et qui donc ne sont pas trop abîmés par l'organisation capitaliste, de faire advenir la plus grande liberté au cœur même de l'effort qu'oppose la résistance d 'une matière. Une organisation de la société qui d'ailleurs nous ménage plutôt: qui a le loisir (et se sent le droit, pour le dire en des termes sociologiques) d'écrire des poèmes, a de bonnes chances d'être du bon côté de la lutte des classes. Cela n'empêche pas que, dans son rapport à la langue, c'est un travailleur, un prolétaire: quelqu'un qui de présente nu face à elle, et la sculpte comme à la main. Et c'est de ce dénuement même, du fait qu'il travaille nu l'os de la langue, qu'il tire une habileté technique ouvrant un horizon de liberté. Descendant en mineur, frigorifié et fatigué, dans les galeries de la langue, il a créé une nouvelle image de l'humanité parlante. Le poème est à la fois cet enfer et ce paradis, et son auteur le prolétaire émancipé. du fait qu'il travaille nu l'os de la langue, qu'il tire une habileté technique ouvrant un horizon de liberté.Descendant en mineur, frigorifié et fatigué, dans les galeries de la langue, il a créé une nouvelle image de l'humanité parlante. Le poème est à la fois cet enfer et ce paradis, et son auteur le prolétaire émancipé. du fait qu'il travaille nu l'os de la langue, qu'il tire une habileté technique ouvrant un horizon de liberté. Descendant en mineur, frigorifié et fatigué, dans les galeries de la langue, il a créé une nouvelle image de l'humanité parlante. Le poème est à la fois cet enfer et ce paradis, et son auteur le prolétaire émancipé.
Pour le reste, je veux dire pour ce qui ne concerne pas la langue, je ne sais pas quoi dire des rapports de la poésie au capitalisme: le poète quand il n'écrit pas m'apparait un bonhomme lambda, les contraintes économiques pèsent sur lui comme sur tout un chacun en fonction de la place qu'il occupe dans le système. Il peut être par ailleurs compétent dans un autre champ (être un médecin efficace, un professeur écouté) mais peut aussi ne pas l'être. Quand il n'écrit pas, c'est simplement quelqu'un: d'où mes réticences sur la question posée, celle du statut social du poète.

"La poésie est quelque chose de collectif,
la solitude d'une écriture est traversée par la solitude d'autres"

Reste que la solitude est en effet la condition essentielle de ce rapport à la langue et au monde. La pensée nécessite de se soustraire aux slogans qui cimentent les groupes, l'écriture-au-carnet demande la déambulation dérivante dans la ville bruyante, le dressage-à-exiger exige la concentration extrême. L'embuscade (un mot que j'ai lancé sans trop y réfléchir, mais qui fera peut-être encore l'affaire pour quelques phrases) est celle d'un campement de fortune à la lisière du commerce des opinions communes, la conversation générale qui innerve ses propres pensées. L'incognito dont tu parles très bien, c'est la condition du brigand de grand chemin, prêt à se jeter sur les diligences de la langue, Le théâtre des opérations est le langage, que seul, car il se piège lui-même) contre tous: sa famille, ses amis, les entreprises et les institutions, les académies et leurs prix. Les accolades du marché de la poésie sont devant plus pénibles qu'on s'y trouve embrasse en criant les hauts faits de poètes: mais comment des brigands, si leurs méfaits étaient avérés, pourraient-ils venir s'en vanter au milieu de la ville? Cette recherche de la lumière, ce goût de la place du marché ne signifie-t-elle au contraire que ce brigandage n'est qu'un mauvais spectacle ? On dirait les rappeurs bling-bling qui font étalage dans leurs clips de leurs pistolets en plastique.
Cela ne signifie pas qu'il ne peut exister de repaire secret, où se rassembler, entre coquins 
: la poésie est quelque chose de collectif, la solitude d'une écriture est traversée par la solitude d'autres. Comme dans Au bord de l'eau , le vieux roman chinois, on peut imaginer un Mont Liang, un repaire utopique où se croisent les voix, singulières quoique impersonnelles, des poètes-brigands: un collectif où l'on peut travailler la parole en poète, une scène où la panthère et le panda, ensemble, rugissent leurs barreaux - c'est cela, je crois, une revue de poésie. C'est ce que toi et tes camarades de poésie ont réalisé si merveilleusement depuis tant d'années; c'est ce qu'à notre échelle beaucoup plus modeste, nous essayons de faire à CatastrophesLe présent échange, où nous disons ce que nous n'aurions pas pu ou pas su dire sur la scène du marché machin, est bien la preuve (destiné qu'il est à la revue de Paul de Brancion) que ces lieux collectifs existent, où des gens peuvent parler en tant que poètes de leur travail.

MR  : Repères de coquins et marché de coquins. Le ciel se charge, les gens courent sur la place, les gouttes deviennent nombreuses, fracas sur les tentes; on n'a pas de parapluies, on range les manuscrits sous le bras, on cherche un sac où glisser la revue, on file se réfugier dans un café. Peut-être est-ce le White Horse Tavern où Dylan Thomas lève son dernier verre.Ce Dylan Thomas qui dit comme toi: «un poète est poète durant une fraction si infime de sa vie - n'étant, le reste du temps, qu'un être humain dont l'une des responsabilités est de connaître et de sentir autant, que faire se peut, tout ce qui bouge autour de lui et en lui, afin que sa poésie, quand il vient de l'écrire, tente d'exprimer la quintessence de l'expérience humaine sur cette terre si insolite, et qui semble, en cette année 2020 [je change la date] si tellement attirée par l'enfer! ». Ce Dylan Thomas qui nous bouleverse quand il déclare à la BBC en 1946: «un bon poème est une contribution à la réalité».

LA POÉSIE AILLEURS
LA POÉSIE OUÏGHOURE EN VOIE DE DISPARITION: les Ouïghours de la diaspora se battent pour maintenir cette forme d'art en vie alors que les poètes et les écrivains du Xinjiang sont réduits au silence ou détenus. Lire

LES LIBRAIRES INDÉPENDANTS AMÉRICAINS LANCENT UNE CAMPAGNE CONTRE AMAZON: ils veulent alerter sur le danger renforcé que représente le géant du commerce en ligne en cette période de pandémie. Lire

UNE LIBRAIRIE DE TAÏWAN, OU L'ON VIENT CHERCHER UN LIVRE PLONGÉ DANS LE NOIR: de quoi entrer véritablement en communion avec les ouvrages. Lire
DISTINCTIONS
NIMROD ET ANNA AYANOGLOU : NIMROD vient de recevoir le Prix APOLLINAIRE 2020, pour son recueil «Petit éloge de la lumière nature» (Obsidiane); ce prix, fondé en 1941, considéré comme le «Goncourt de la poésie», couronne chaque année « en dehors de tout dogmatisme d'école ou de technique un recueil caractérisé par son originalité et sa modernité »; Anna AYANOGLOU a reçu quant à elle le «Prix Apollinaire Découverte 2020» pour son recueil «Le fil des traversées» (Gallimard). Lire
RICHARD ROGNET:  le poète vosgien vient de recevoir le Prix ERCKMANN-CHATRIAN, surnommé le Goncourt lorrain, qui récompense chaque année depuis 1925, un auteur vivant en Lorraine ou qui place son œuvre dans un cadre lorrain. Lire
KATERINA APOSTOLOPOULOU : poétesse et traductrice, elle vient de recevoir le Prix PÉPITE FICTION ADOS DU SALON DU LIVRE ET DE LA PRESSE JEUNESSE - FRANCE TÉLÉVISIONS, pour son premier recueil «J'ai vu Sisyphe heureux», qui rassemble trois histoires, racontées en vers libres. Lire
AU REVOIR...

JUDE STÉFAN: poète et nouvelliste français, auteur d'une soixantaine d'ouvrages, son œuvre est l'une des plus marquantes et singulières de la seconde moitié du XXème siècle; il était réputé pour être un penseur et un technicien du vers. Lire

ANNE SYLVESTRE : ouvertement féministe, malgré elle, elle a écrit des auteurs de chansons plus poétiques, militantes et drôles les unes que les autres; un répertoire trop complexe pour un public assoiffé de simplisme ? Lire

NATHAN ZACH: poète et lauréat du prix d'Israël, qui avait aidé à façonner la poésie israélienne. Lire
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10 LIVRES POUR DÉCOUVRIR LA POÉSIE QUI S'ÉCRIT AUJOURD'HUI: foisonnante et passionnante, la poésie contemporaine reste peu connue; un guide pour mettre des vers à son menu. Lire

HABITER POÉTIQUEMENT LE MONDE: une anthologie plus de 100 auteurs qui n'a jamais cessé depuis 200 ans d'être citée ou commentée par des écrivains, des poètes et des philosophes de tous les pays.
«Habiter poétiquement le monde», Frédéric Brun, Éd. Editions Poesis, 2016, 368 p., 79 €
 
ANTHOLOGIE INÉDITE DE FEDERICO GARCÍA LORCA: petite anthologie de poèmes en prose et autres textes parfois inédits en français et souvent méconnus du poète espagnol assassiné.
«Une colombe si cruelle», Editions Bruno Doucey, «Soleil noir», 144 p, 16 €.
 
L'AUTRE RIMBAUD: cet ouvrage remet dans la lumière Frédéric, frère ainé avec lequel Arthur entretient une relation fusionnelle, compagnon d'ennui dans leurs Ardennes natales, auprès d'une mère acariâtre abandonnée par son mari; A été élevé au rang de l'un génie, tandis que l'autre, conducteur de calèche vu comme un raté, fut ostracisé par sa famille, gommé de la correspondance d'Arthur et privé des droits sur son œuvre. Lire

ANTHOLOGIE BILINGUE DE LA POÉSIE LATINE: ouvrage collectif qui célèbre la rencontre de la poésie et du latin, sur plus de 2.000 ans et propose de nombreux poèmes présentent que si le temps passe, la langue évolue peu, le Moyen Âge invente de nouveaux systèmes rythmiques, la rime apparaît, la métrique classique ne disparaît pas;quand il compose «Ver erat» ..., l'élève Rimbaud utilise le mètre qui règne en latin, l'hexamètre dactylique…
Bibliothèque de la Pléiade, n° 652, septembre 2020, 1920 p., 69 €
 
«GUSTAVE», LE MENSUEL DE POÉSIE, LANCE UNE RADIO
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UNE CHAINE YOUTUBE ENTIÈREMENT DÉDIÉE À LA POÉSIE: lancée au mois d'août 2020 par un passionné de poésie, la chaîne des Éditions Marcomir a pour ambition de faire découvrir la poésie au plus grand nombre et de montrer ses nombreuses vertus. Lire

LA GRANDE LIBRAIRIE CONFINÉE AVEC LA POÉSIE: JMG Le CLÉZIO et Charles JULIET dialoguent à propos de la poésie. Lire

"LE FLOT DE LA POÉSIE CONTINUERA DE COULER":interview de JMG Le CLEZIO, Prix Nobel de Littérature, à propos de son dernier essai. Lire

ESQUISSE D'ANTHOLOGIE POÉTIQUE: en 1995, France Culture proposée un montage exceptionnel d'archives, une anthologie poétique lue par les poètes eux-mêmes, parmi eux: Andrée CHEDID, René CHAR, Jean GENET, Aimé CÉSAIRE, Léopold Sédar SENGHOR. Lire

CAHIER PAUL CELAN:  appuyé sur de nombreux documents inédits (lettres, traductions et notes privées) qui éclairent sa vie et ses choix poétiques, ce volume donne accès à un «autre» Celan qui se situe tant dans une tradition dont il discute la pertinence , que dans une époque qu'il guette avec une acuité implacable, attrapant dans son écriture les mots, les textes et les personnes de son temps
L'Herne Celan, Bertrand Badiou, Clément Fradin et Werner Wögerbauer, Ed. de L'Herne, 2020, 256 p., 33 €
 
LOUIS ZUKOFSKY, LE CHANT DISSONANT DE LA MODERNITÉ: la traduction du dernier ouvrage du poète américain mort en 1978, rend le bruit et la musique de son temps.
«A», Louis Zukofsky, Ed. Nous, «Now», 2020, 792 p., 35 €
 
LA NOSTALGIE EN POÉSIE: quel exilé n'a jamais connu le mal du pays? J. AVRIN et H. CHARTIER parlent de la nostalgie du pays natal, du pays de l'enfance avec RONSARD, COLETTE et Du BELLAY. Lire
 
PERCER LE SECRET DANTE:une vie dont on sait très peu de choses et qui continue de susciter des recherches, spéculations et fantasmes, une œuvre dont aucun manuscrit et peu de documents renseigne sur son existence, peu de traces de son passage; une serie de 4 émissions pour tenter de percer ces secrets. Lire

UNE SÉRIE DE COURS SUR LA DIVINE COMÉDIE: les circonstances poétiques et politiques de la composition de l'œuvre, des lectures d'extraits destinées à la situation dans le contexte intellectuel et social de la fin du Moyen Âge, accordant une attention particulière aux Concernant les politiques, philosophiques et théologiques. Lire

VIRGILE: "LE TEMPS EMPORTE TOUT, L'ESPRIT COMME LE RESTE":pendant 2.000 ans cette poésie a été une source inépuisable de richesses et de beautés fécondant de façon continue et multiple les branches majeures de l'esprit; parmi ses prérogatives, le poète est peintre… promenade entre les mots et les images. Lire

DELPHINE BRETESCHE:  écrivain, dessinatrice et performeuse qui s'intéresse au territoire, à celles et ceux qui le pratiquent, est reçue par Paul de BRANCION. Lire

LES STATUES DE LA VILLE DE TOULOUSE EN DEUIL: avec la décision du gouvernement de repousser sine die l'ouverture des théâtres, cinémas, salles de concerts, musées, bibliothèques, la culture se meurt. Lire

ARCHIVES EXCEPTIONNELLES:
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- APOLLINAIRE interprète «Le Voyageur» enregistré en 1913. Lire
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