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 Bonjour tout le monde ! 
À chaque fois que je commence la rédaction d'une nouvelle lettre, la même phrase d'introduction me vient systématiquement à l'esprit. Je la place ici pour m'en débarrasser, sachant qu'après ça il ne me sera plus possible de la réutiliser : 
Ne trouvez-vous pas que ce monde sent la crotte ?
Voilà, passons maintenant à autre chose.
Dans la précédente lettre j'annonçais ma participation prochaine à une séance de dédicace chez Philippe le libraire, à Paris. C'était le 21 septembre. Voici son histoire.
 Une (nouvelle) journée (très spéciale) à Paris (France) 
08:00
Il fait à peine jour, j’arrive à la gare routière.
Sur le quai n°5, je dépasse un groupe de gros hommes chauves en costumes qui échangent en anglais. Quel est donc ce symposium secret qui oblige à prendre un car à la gare routière ? Dans quelle contrée pas si lointaine se tient-il ? Dans les limites du département, assurément.
Mon Flixbus© est attendu au quai n°13. Je ne suis pas superstitieux mais il ne faut pas déconner.

08:25
Le car arrive. Il comporte un grand nombre de sièges, des toilettes, des compartiments à bagages et aucune possibilité de voyager debout. C’est définitivement un car et non pas un bus comme la marque Flixbus© le laisse entendre. 
La place qui m’a été attribuée est la 20E, je suis dans la toute dernière rangée, celle de la bande des “cools” lorsque j’étais au collège. Ma place est relativement confortable et plutôt bien équipée : j’ai droit à une prise USB personnelle mais je me rends compte que j’ai oublié le câble de chargeur de mon téléphone. C’est fâcheux.

08:30
Le car (et non pas le bus) démarre. C’est parti pour presque 5 heures de trajet.
Je suis assis contre la fenêtre du côté droit, excellent poste d'observation pour scruter les champs à la recherche de bêtes sauvages (quelques chevreuils au compteur).
J’écoute le dernier épisode du (très bon) podcast Se souvenir de Sam puis je m’endors un peu.

10:00
Un téléphone sonne. Une passagère décroche et, pendant de longues minutes, répond à ce qui ressemble à un entretien d’embauche. J’admire sa capacité à rester concentrée dans un tel contexte. La personne est plutôt discrète (personne ne lui reproche rien) mais je télécharge un podcast de bruits blancs pour m’isoler de l’environnement sonore et pouvoir me rendormir un peu.
Nous faisons un court arrêt à Laval.

11:00
Je mange un crêpe Wahoo

11:15
Nous entrons en Eure et Loir.
Je mange une seconde crêpe Wahoo.

12:00
Nous dépassons un panneau “Ile de France”
Je commence la lecture de Cul de sac, de Douglas Kennedy.

12:10
Péage de Saint-Arnoult.
Quelques avis Google Maps parmi les 3853 laissés (3,1 ★ / 5)  :
  • Toujours horrible et angoissant d’arriver à ce péage. Certes comme n’importe quel péage mais celui-ci est un point noir en France.
  • C'est toujours payant. Et rempli de monde. Je mettrai 4  quand ce sera gratuit, et la 5e quand il n'y aura personne.
  • Noter un péage ! Sur quoi ? À mon avis, on note un lieu où on a passé un bon moment ! Là, même pas une minute, le temps de prendre le ticket afin de payer le trajet. Une machine : noter un distributeur ! Où sont passés les agents, où sont les "bonjour", "comment ça va ?", "bonne journée"... 
  • Je me suis fais mal au bras en attrapant le ticket, sortie du péage un peu rocambolesque.
  • Le péage c’est un peu le pire endroit des autoroutes : il y a du monde, on fait la queue, on paye et ça pue la pollution à plein nez, sauf dans les plus beaux péages de France et celui-ci l'est assurément. J'entends certains qui diront qu'il n'y a pas assez de cabines ouvertes, que la file d'à côté avance toujours plus vite que la leur... Ce sont des esprits chagrins, ne les écoutez pas !
  • Super cher et leur CBD arrache la gorge.
13:00
Il pleut et ça bouchonne à l’arrivée de Paris, ce qui me laisse tout le loisir d’admirer les entrepôts de Rungis. 
On traverse des zones industrielles rouillées et magnifiques avec des fleuves de rails et des cheminées fumantes dignes des plus belles ambiances d’Erasurehead.

13:30
Le bus franchit la Seine et s’enfonce dans la gare routière de Bercy. Je m'extrais aussi vite que possible de cet antichambre de l’enfer (2,7 ★ / 5 sur Google Maps) mais dehors ce n’est guère plus réjouissant. Il pleut toujours. Je dois slalomer entre les flaques de boue et les tireurs de valises à roulette qui sont à la peine sur les dalles en ciment défoncées. Je longe un labyrinthe de barrières censé canaliser la foule du public des spectacles du Palais-Omnisport-Paris-Bercy-Accor-Hotel-Arena (POPBAHA). Mais de foule, il n’y a pas ; à peine une dizaine de personnes abritées sous de simples parapluies dont la plus équipée dispose d’une chaise pliante et d’une couverture de survie. Quelle star suscite autant d'abnégation ? Qui mérite que l’on passe huit heures les pieds trempés et dans le froid pour être au premier rang ? Rod Stewart ? Jeff Panacloc ? Patience, patience, bientôt tu le sauras.

Je dois trouver de quoi manger rapidement et, dans l’idéal, un câble de chargeur à un prix modique. J’explore les rayons d’une petite supérette mais tous les sandwichs proposés sont soit au jambon, soit au poulet alors que j’essaye de respecter mes vœux de végétarisme prononcés deux mois plus tôt. Et le câble USB derrière la caisse doit valoir un RSA. 
Je ressors et quelques mètres plus loin, miracle, un snack annonce en vitrine : FALAFEL VEGETRIENNE. Je passe aussitôt commande.
Nous sommes à quelques centaines de mètres du ministère des finances. Bruno Lemaire vient-il parfois commander, lui aussi, un falafel vegetrienne ? Vu le prix du menu (7€ la barquette avec une poignée de frites) Bruno doit demander que le ketchup sur les frites soit offert.

J’engloutis mon wrap-falafel-frites dans la rame de métro. Spectacle affligeant qui laisse les doigts gras.

14:00 
Je descends à la station Edgar Quinet où j’ai rendez-vous. En sortant j’ai une magnifique vue sur la tour Montparnasse, chef-d’œuvre architectural d’acier et de verre fumé maronnasse.
Comme je suis un peu en avance, j’ai le temps d’acheter (à un prix raisonnable) un câble USB dans un Monoprix juste à côté. 
La pluie s’est arrêtée. Une personne m’aborde pour me parler de la conscience cosmique et m’invite à regarder les vidéos de la fédération intergalactique. Je prends bonne note lorsque mon rendez-vous arrive. Il s’agit de Gildas que je n’avais pas vu depuis 12 ans. J'avais peur de ne pas le reconnaître mais il n’a pas du tout changé, peut-être quelques cheveux un peu plus clairs… (lui, au moins, garde ses cheveux).

14:30
Nous allons prendre un café en faisant le point sur ces douze dernières années. Nous nous connaissons depuis le début des années 90 par l’intermédiaire d’un ami commun aujourd’hui disparu. Gildas m’offre le café mais le serveur l’informe qu’il ne prend la carte qu’à partir de cinq euros. Grand seigneur, il veut bien faire une exception pour cette fois. Les serveurs de cafés parisiens ont mauvaise réputation. Je trouve celui-là plutôt serviable. Mais cette histoire de limite de carte puis de dérogation ne serait-t-elle pas un subtil stratagème pour se donner un vernis d’amabilité ?

15:00
Gildas a proposé de m’accompagner durant tout le reste de la journée. Je vais donc lui imposer la visite du cimetière Montparnasse où j’ai un mystère à résoudre : celui de la tombe-véranda (cf. infolettre n°16). Elle est toujours là avec sa petite barrière blanche en bois de palette, face à la tombe de César (le sculpteur), identique à mon souvenir. Il y a 3 ans je pensais qu’il s’agissait d’une structure temporaire mais elle n’a pas du tout changé. Je remarque même la pose plutôt récente d’un joint de silicone pour une étanchéité parfaite. Qui se soucie des infiltrations d’eau de pluie dans une tombe ? Ne s’agirait-il pas d’une résidence secondaire, voire d’une location AirBnB dans la catégorie “nuit insolite”. Le mystère reste entier.
Nous poursuivons le tour du cimetière tout en évoquant les amis et les proches, présents ou disparus, en croisant quelques célébrités décédées. Ce cimetière a ses stars et les hommages rendus sont parfois déroutants : des marques de baisers au rouge à lèvre sur la tombe de Sartre et Beauvoir, des tickets de métro sur celle de Gainsbourg, une pomme pour Chirac. Gildas fait remarquer que c'est un peu pathétique pour un homme d'état (que l'on apprécie ou non), de ne laisser à la postérité qu'un gimmick des guignols de l'info.
Je ne retrouve plus la tombe de Pialat. Gildas est ému de découvrir celle de Wolinski. On se souvient de Roland Moreno.

16:00
Nous quittons le cimetière puis la rive gauche.
Note du rédacteur : l'écriture du récit de cette journée a subi, à ce stade, une interruption de plus de deux mois. Evidemment, mes souvenirs sont maintenant beaucoup moins vifs. Je me retrouve dans la même situation que pour mes promesses de tenir le journal de bord de mes vacances : les première pages du carnet sont remplies d'anecdotes et d'illustrations détaillées ; et la fin n'est plus qu'une simple liste de mots devenus énigmatiques. 
La suite du texte sera donc composée de notes agrémentées de quelques vagues souvenirs.
Remontée jusqu'à la Seine.
Pas d'arrêt chez Boulinier.
Notre Dame.
Où est Charles III ?
Friperie : + chère. 3 tee-shirts.
Affiche de François Feldman.
Affiche de Popeck (pas mort).
Affiche de Denver (le dernier dinosaure).
Il faut beau.
Pot en terrasse
Jeton pour les toilettes
18:30 : arrivée juste à l'heure
à la librairie.
Qui est qui ?
Philippe 1
Philippe 2 (Emmanuel)
Surprise : première rencontre en 26 ans.
Livre lu en Suède.
Arrivée de Sébastien
puis plein de gens (que je ne connais pas) (vraiment).
On discute, je fanfaronne.
Coca restant de la précédente dédicace : qui ?
Dégât des eaux.
Un portrait (goût du risque).
J'appelle S. par son nom.
À 21:00 : on ferme
Il fait nuit.
Crêpe au fromage et aux légumes
sur une place.
La fontaine à eau
ne marche pas.
Chacun part dans une direction.
(Philippe à vélo jusqu'à Troyes)
Peur des travaux sur la 4,
correspondance métro.
Bouteille d'eau au distributeur.
Faisceaux lumineux de tour Eiffel
par dessus les immeubles.
1,5 kilomètres à pied + toute la gare à traverser.
Sale, moche et puant.
Arrivée à l'heure prévue (23:00).
C'est le bordel dans le car. Le Blablacar.
Change de place (le bon samaritain).
Gens qui toussent à l'arrêt : masque.
Tranches de sommeil et ronflement.
03:00
Arrivée à Rennes.
Vélo,
douche, 
dodo
(03:50)
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Post-scriptum : c'est Louis Attaque qui jouait à Bercy ce soir là.
Une cheminée qui fume
 Infomercial 
Le top 5 des idées cadeaux incontournables de cette année :
∎ des sacs congélation avec fermeture ziplock
∎ le livre Ne refaites jamais ça (cf. photo)
∎ des piles rechargeables
∎ un chien (gentil)
∎ encore une fois le livre Ne refaites jamais ça (toujours cf. photo)

🤓FUN FACT !
Savez-vous que toute commande du livre Ne refaites jamais ça :
- peut être agrémentée d’une dédicace personnalisée
- est postée au plus tard le lendemain de la commande
- sera, pendant les 2 prochaines semaines, généreusement affranchie au tarif Lettre Suivie au prix de la Lettre verte (le livre reste au même prix, soit 15€, port compris).
⦁ ∴ ≜ Passez commande, il est encore temps ! ≜ ∴ ⦁
 Quelques liens pour finir 
  • Je parlais dans la précédente lettre de la boulangerie V pour Vends des tartes. Je ne suis apparemment pas le seul.
  • Pendant un an, chaque jour, Gary s'est levé à 5h du matin et a couru la distance d'un marathon avant d'aller travailler. 365 marathons en 365 jours (vidéo en anglais). 15 400 kilomètres. La fin est digne de Rain Man.
  • Saviez-vous que c'est Will Oldham qui a pris la photo de la pochette du Spiderland de Slint ? Le lac de carrière existe toujours mais est maintenant coincé entre un fleuve, une autoroute et un lotissement. Au verso de la pochette du disque, il est pour toujours noté que le groupe recherche une chanteuse (alors qu'il n'existait déjà plus quand le disque est sorti) et donne une adresse où écrire (la légende raconte que PJ Harvey aurait répondu). Si on cherche cette adresse sur google maps, on tombe sur la maison des parents de Britt Walford (batteur du groupe) où le groupe répétait. Et un allant voir l'arrière de la maison, on peut même découvrir sa mère devant son garage.
  • Techniques de combat : savoir identifier les techniques argumentaires des climatosceptiques (mais valable pour plein d'autres sujets). Rappel utile : ne perdez pas votre temps et votre énergie à répondre aux vieux sacs à merde, ils mourront avant vous.
  • C'est chouette d'entendre à nouveau Islands : Life's A Joke (clip 5 ★)
  • Des animaux géants en fibre de verre, les saveurs perdues de Ben & Jerry's, des avions, des tanks, des vélos, des têtes de présidents : un tour du monde des cimetières "non-humains".
  • À propos de mort et de collection : à New-York, le MET possède un "scrapbook" (de la fin XIXe, début XXe) compilant les articles et annonces nécrologiques concernant les peintres, sculpteurs et photographes (en anglais, TW : morts violentes)
  • Adam Savage (de Mythbuster) visite les réserves de la Earl Hays Press, spécialisée dans l'impression de "props" (accessoires de cinéma). Timbres, billets, tickets, boites d'allumettes, permis de conduire de toute époque et de tout lieu... Son enthousiasme devant ces (magnifiques) piles de papier fait plaisir à voir.
  • Attention, suivez bien :
    - le 29 janvier 1972, un Boeing 707 de la TWA est détourné par Garrett Brock Trapnell. Son projet échoue et il est arrêté.
    - le 24 mai 1978, Barbara Ann Oswald détourne un hélicoptère dans le but de faire évader Trapnell. Son projet échoue et elle est tuée.
    - le 21 décembre 1979 le vol TWA 541 est détourné par Robin Oswald, la fille âgée de 16 ans, de Barbara. Elle menace de faire exploser l'avion si Trapnell n'est pas libéré. C'est ce dernier qui l'a convaincu de venger sa mère en terminant sa mission.
    Pour connaître la fin de l'histoire (avant que Netflix n'en tire une série) : Vol TWA 541
  • Le Guardian a compilé les 100 meilleures performances musicales diffusées sur la BBC. J'avais oublié le Top Of The Pop en version playback chaotique de Nirvana.
  • À propos : la fille de Kurt Cobain a épousé le fils de Tony Hawk.
  • Connaissez-vous la plique polonaise (ou tresse de la Vistule) ? Sa page wikipédia (beaucoup trop longue) tente de démêler (vous l'avez ?) ce "mystère".
Le morceau du moment : Água de Beber d'Astrud Gilberto et Antonio Carlos Jobim
Cette lettre est dédiée à Piper Laurie

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