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Le Fonctionnaire
Une infolettre sur la fonction publique fédérale.
Par by
Kathryn May
Bonjour tout le monde,

Les fonctionnaires retournent peu à peu au bureau et, jusqu’à présent, l’enfer ne s’est toujours pas déchaîné alors que les ministères s’efforcent de trouver un moyen de travailler en mode hybride. Beaucoup de fonctionnaires sont revenus à contrecœur. Cela a placé le droit au télétravail à égalité avec les salaires en tant qu’enjeu prioritaire, tant pour les travailleurs syndiqués que pour leurs patrons.

Alors, allons-y !

* En direct des années ‘70 : « Beaucoup plus d’entre nous pourraient travailler de la maison d’ici 1981. »
* Sondage de l’ACEP : le télétravail est largement favori.
* Négociations salariales : la bataille entre AFPC et le Conseil du Trésor
* Télétravail : les syndicats veulent mettre de la pression.
* Perdus dans la bataille : les cadres font face aux mêmes problèmes.
* Et voici… : la couverture médicale tant attendue.

***
 
TRAVAIL HYBRIDE

Retour vers le futur
Tendance, le télétravail ? Ce reportage de la BBC l’annonçait pour le début des années… 1980. Il circule abondamment sur les forums et médias sociaux fréquentés par les fonctionnaires.
Source : Reddit
Le pari. Le travail en hybride est la plus grande perturbation depuis des décennies. Le gouvernement tente sa chance en passant à une main-d’œuvre hybride. Les ministères ont lancé leurs propres plans de retour au bureau en essayant de trouver le meilleur équilibre possible entre le travail au bureau et le télétravail, tout en s’assurant du bon roulement des opérations. La plupart des fonctionnaires veulent continuer à travailler de la maison. 

Pas de rébellion pour l’instant. Mais cela pourrait changer, selon Meredith Thatcher, cofondatrice et stratège en milieu de travail chez Agile Work Evolutions. Avec une telle diversité d’approches entre les ministères, plusieurs s’attendent à ce que des fonctionnaires quittent leur emploi et aillent travailler pour les ministères les plus ouverts au télétravail. Certains syndicats parlent même de classer les ministères en ordre de flexibilité pour aider leurs membres à faire le saut. 


L’Association canadienne des employés professionnels, le troisième plus grand syndicat de la fonction publique fédérale, a rendu public le grand sondage réalisé auprès de ses membres – dont plusieurs sont des analystes politiques. L’enquête a été réalisée alors que les fonctionnaires entamaient le retour massif au bureau, après la fête du Travail :

  • 73 % préfèrent travailler de la maison ;
  • 60 % s’opposent au retour obligatoire au bureau (ROB) cet automne ;
  • 75 % sont « susceptibles ou très susceptibles » de quitter leur emploi pour un autre qui leur permettrait de travailler comme ils le souhaitent ;
  • 80 % n’ont pas reçu de plan ou d’échéancier clair au sujet du ROB, ni de raison justifiant pourquoi ils doivent revenir maintenant ;
  • 50 % disent ne pas avoir été consultés sur les plans de ROB, et les 45 % qui ont été consultés sont insatisfaits de la façon dont cela a été fait.

Les raisons invoquées pour ramener les gens au bureau :

Source : ACEP
« Il ne s’agira pas d’un changement discret, mais d’un raz-de-marée de changements d’un ministère à l’autre, dépendamment de la façon dont les choses sont mises en œuvre », explique Mme Thatcher. « Je pense que plusieurs prennent leur mal en patience – en regardant ce qui se passe avant de bouger eux-mêmes, en fonction de ce que feront les autres ».
 
Bien sûr, une nouvelle vague de sous-variants de la COVID ou d’autres virus respiratoires pourrait encore une fois reporter les plans de retour au travail. 
 
Que négocient les syndicats ?

Les salaires : Les syndicats sont encouragés ces jours-ci par l’inflation, le faible taux de chômage et la pénurie persistante de personnel compétent. L’Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC) a été le premier des 17 syndicats à la table de négociation et a abouti à une impasse au printemps. Le syndicat et 150 000 fonctionnaires sont maintenant sur le chemin de la grève. 
 
Le Syndicat des employé-e-s de l’impôt de l’AFPC réclame des hausses de salaire de 33 % (!) pour 35 000 de ses membres à l’Agence du revenu du Canada. Cela comprend :
 
D’abord, un rajustement en fonction du marché de 9 % afin d’aligner les salaires des percepteurs d’impôts sur ceux des percepteurs de droits de douane de l’Agence des services frontaliers du Canada. (L’explication est ici). Cela remonte à l’époque où l’ARC et l’ASFC faisaient partie de la même agence – l’Agence des douanes et du revenu du Canada – et où les employés étaient payés de la même façon. L’organisme a été scindé en 2003 et un écart salarial s’est creusé au fil des ans.
 
Puis, une augmentation de 20,5 % sur trois ans :
4,5 % en 2021
8 % en 2022
8 % en 2023
 
Retour au cœur de la fonction publique : Le Conseil du Trésor et l’AFPC viennent de conclure quatre jours de médiation, qui n’ont guère permis de dénouer l’impasse. Le Conseil du Trésor a bonifié son offre de 1,5 % sur quatre ans (pour un total de 8,25 % sur quatre ans), ce que l’AFPC a rejeté, affirmant que cela « fait encore reculer les travailleurs ». L’AFPC demande une hausse de 13,5 % sur trois ans.
 
Les parties s’adressent maintenant à une commission de l’intérêt public, dont les recommandations ne sont pas contraignantes, pour l’aider à conclure une entente. 
 
La demande salariale de l’AFPC sur trois ans :
4,5 % en 2021
4,5 % en 2022
4,5 % en 2023 
                                                                             
La première offre du Conseil du Trésor, sur quatre ans :
1,5 % en 2021
2,0 % en 2022
1,75 % en 2023
1,5 % en 2024
 
La seconde offre du Conseil du Trésor :
1,5 % en 2021
3,0 % en 2022
2,0 % en 2023
1,75 % en 2024

Les syndicats ont possiblement les précédents de leur côté. Ils ont en effet réussi à négocier des augmentations de salaire qui ont atteint ou dépassé l’inflation depuis 20 ans.

Source : Agence de la fonction publique du Canada

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Le télétravail. C’est une priorité absolue, au même titre que les salaires. Les négociateurs sont avares de détails, mais ils veulent inscrire les dispositions relatives au travail à distance dans les conventions collectives.

Les syndicats ont peu d’emprise ici, puisque la direction détient le droit exclusif d’organiser le travail – y compris où et comment les gens travaillent – et ne veut pas y renoncer. Une possibilité consiste à faire en sorte que la directive sur le télétravail du Conseil du Trésor (qui est le guide du gouvernement pour le travail à distance) soit jointe à la convention collective sous forme de protocole d’entente. Une fois la directive inscrite dans la convention, les employés auraient un recours. Les travailleurs qui seraient forcés de retourner au bureau alors qu’ils croient pouvoir faire leur travail de la maison pourraient contester la décision.


Et les cadres ? Ils ont les deux mêmes problèmes : le travail hybride et la rémunération. Les cadres ont tendance à se perdre dans la bataille du retour au bureau. Ils doivent gérer la transition vers le travail hybride et rallier leurs équipes, qui ne sont pas enthousiastes. De nombreux cadres n’aiment pas non plus l’idée de revenir en arrière. En outre, les plans ne sont pas clairs, les ministères adoptant des approches très disparates.
 
L’APEX, l’association représentant les cadres fédéraux, soutient le passage à un modèle hybride, car elle estime que « quelque chose se perd » lorsque les gens travaillent entièrement à distance. La créativité et la résolution de problèmes, par exemple, sont affectées lorsque les gens ne sont pas ensemble et en personne.
 
L’APEX a publié un guide pour aider les cadres à gérer ce nouvel environnement hybride. Sa dernière enquête sur la santé et le travail révèle que 75 % des cadres se disent épuisés depuis la pandémie ; 39 % font état d’épuisement et de cynisme.  La principale raison : la structure et les systèmes, qui doivent être repensés.
Source : LinkedIn
Certaines idées sont révolutionnaires pour une bureaucratie statique. Ne centralisez pas la direction dans un siège physique ; créez plutôt un « siège numérique » avec des heures de bureau numériques.
 
Ou, encore, limitez le nombre de jours que les cadres doivent passer au bureau, afin d’éviter le favoritisme envers ceux qui y travaillent. Adoptez une politique de réunions selon laquelle « si une personne appelle, tous appellent », afin d’inclure tout le monde, quel que soit son lieu de travail.
 
Voyez ici les meilleures pratiques, qui incluent les heures de travail de l’équipe centrale, alignées sur les fuseaux horaires et non sur l’emplacement du bâtiment, et qui mesurent l’impact du travail des employés, et non le temps qu’ils passent à leur bureau.

La rémunération : La façon dont les cadres sont payés est une épine au pied pour tous, depuis des années. La semaine dernière, les conservateurs fédéraux ont reproché aux cadres de recevoir une rémunération au rendement « tout à fait injustifiable », alors que les Canadiens reçoivent un service médiocre dans les aéroports et les bureaux de passeport et d’immigration. La rémunération au rendement est sujette à controverse depuis son introduction, il y a plusieurs décennies, sur le modèle du secteur privé. Elle n’a jamais fonctionné comme prévu. L’ancien greffier du Conseil privé Michael Wernick a pris la parole pour demander aux partis politiques ce qu’ils feraient pour y remédier.
Source : LinkedIn
L’APEX a l’intention de s’attaquer à la rémunération au rendement, mais elle prépare d’abord un document visant à revoir la façon dont le gouvernement fixe la rémunération des cadres. Le processus est devenu politisé. Les augmentations sont liées à ce qu’obtiennent les employés syndiqués et ne sont pas suffisamment comparables à celles du secteur privé. Elle identifie sept grands problèmes :
Source : Infolettre de l’APEX

RÉGIME DE SOINS DE SANTÉ

Économiser, puis dépenser ce qui reste
Le Conseil du Trésor a approuvé la plus importante mise à jour du Régime de soins de santé de la fonction publique en 16 ans. Les améliorations seront payées à même les importantes économies réalisées grâce à un contrôle rigoureux du coût des médicaments. Le plafonnement des honoraires des pharmaciens, l’obligation d’utiliser les médicaments génériques plutôt que les médicaments de marque et l’autorisation pour les médicaments coûteux devraient couvrir le coût des prestations supplémentaires – malgré le taux d’inflation le plus élevé depuis 40 ans.
 
Des gains importants. C’est ce que proclament les syndicats, notamment pour les prestations de santé mentale et les soins de la vue ; des ordonnances qui ne sont plus nécessaires pour les prestations paramédicales, comme le massage et l’orthophonie, les traitements chiropratiques, la physiothérapie, les services psychologiques. De plus, une couverture allant jusqu’à 75 000 $ pour les procédures d’affirmation du genre pour les personnes en transition d’un genre à l’autre.
 
La présidente du Conseil du Trésor, Mona Fortier, affirme que le régime est axé sur « l’inclusion et le bien-être » et qu’il comporte des améliorations pour tout le monde - personnes âgées, familles, jeunes adultes, personnes handicapées et membres de la communauté LGBTQ2S+.
 
À coût nul. Les initiés disent que la conclusion d’un accord a été difficile, retardée par la pandémie et un Conseil du Trésor inflexible, dont les négociateurs n’étaient pas d’humeur à faire des concessions. La somme de 1,5 milliard de dollars que le gouvernement verse chaque année pour le régime ne pouvait tout simplement pas augmenter.
 
« Si vous voulez des améliorations, prenez-les de votre poche gauche et mettez-les dans la poche droite », a résumé une source informée. « Ils n’ont jamais dévié de cela ».
 
C’est la plus grosse assurance collective au pays :

  • 1,5 million de membres : fonctionnaires, retraités et leurs personnes à charge.
  • Le gouvernement paie pour les employés, mais les retraités paient la moitié de leurs frais dans le cadre d’un accord de partage des coûts à parts égales.
  • Le nouveau régime entrera en vigueur le 1er juillet 2023, lorsque la Canada-Vie remplacera la Sun Life comme administratrice du régime.

 
Pas si blindé que ça. Des études de référence indiquent que le régime a pris du retard par rapport à ceux de grands employeurs syndiqués similaires. Les syndicats affirment que les modifications apportées au régime en font un régime de milieu de gamme. Certains avantages sont plus généreux que d’autres régimes, d’autres moins.

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Kathryn May écrit sur la fonction publique fédérale pour le magazine Options politiques. Elle est la boursière Accenture en journalisme sur l’avenir de la fonction publique, qui couvre et analyse les questions complexes auxquelles est confrontée la fonction publique fédérale du Canada. Elle a écrit pendant 25 ans sur la fonction publique – la plus gros effectif professionnel au pays – et a également couvert les affaires parlementaires et la politique pour le Ottawa Citizen, Postmedia Network Inc. et iPolitics. Lauréate d'un National Newspaper Award, elle a également effectué des recherches et rédigé des articles sur des questions liées à la fonction publique pour le gouvernement fédéral et des instituts de recherche. Suivez Kathryn sur Twitter : @kathryn_may.
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Le Fonctionnaire est publié par l'Institut de recherche en politiques publiques
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