Roland Gransart, «le grand frère» des Minots
Catapulté entraîneur de l’OM à 27 ans, il finira écarté sans ménagement, malgré ses succès.
On peut dire que c’est un morceau de l’OM. Roland Gransart aime enchaîner les anecdotes. Il en a tant vu, ne peut pas tout dire parfois. Ses silences en disent long. Il est fils de joueur, ancien joueur, entraîneur et ex-directeur du centre de formation.
Quand il raconte, ses yeux s'illuminent derrière ses lunettes rectangulaires. L’Olympique de Marseille, il est né dedans. À sa naissance en 1954, son père, Maurice, porte déjà le bleu et le blanc en étendard. Il grandit dans les vibrations enivrantes de l’OM. «Lorsqu’il y avait des grands matchs, ma mère me disait : “il se passe quelque chose dans la ville, l’ambiance n’est pas la même”, se souvient-il. Tout le monde s’intéressait déjà à l’OM. Ça fait partie de Marseille».
Dès son plus jeune âge, il entre en minimes à l’OM. Il y gravit les échelons jusqu’à débuter en équipe première, à tout juste 21 ans. Au milieu des grands noms, les Trésor, Émon, Yazalde, il écrit sa propre histoire de joueur à Marseille… qui s’achève brutalement en 1980. Pas de blessure physique, mais un rejet profond de la saison 1979-1980.
Cette saison s’est achevée par une descente en deuxième division et a été émaillée de mille petits dégoûts pour sa profession : des coéquipiers refusant de jouer au stade Vélodrome, mais acceptant des matchs à l’extérieur, d’autres venant à l’entraînement avec un dictionnaire d’allemand en espérant un transfert outre-Rhin, des dirigeants aux abois car le club est aux bords de la relégation… Il ne veut plus être joueur professionnel.
«C’était le grand frère»
Il commence la saison 1980-1981 en tant qu’éducateur encadrant la jeune génération du centre de formation. Puis la liquidation judiciaire de l’OM tombe le 7 avril 1981. À 27 ans seulement, Roland Gransart devient entraîneur et joueur pour six matchs. «C’était le grand frère qui nous guide pendant ces six matchs que l’entraîneur, explique José Anigo, défenseur des Minots. C’est l’année d’après qu’il va réellement devenir entraîneur».
Pendant trois saisons, il va jouer les équilibristes, entre la nécessité de remonter le club en première division et la réalité économique du club ainsi que la tentative des dirigeants d’affaiblir l’équipe de jeunes des Minots. Il y arrivera et sera récompensé par un licenciement en 1985, sans ménagement, comme c’est la coutume à l’OM. Bastia, Gueugnon, Cannes, Martigues, il poursuit sa carrière de coach ailleurs en France. Ce n’est qu’en 2003 qu’il revient en tant qu’entraîneur de l’équipe réserve, à Marseille. De 2005 jusqu’à 2010, il prend la tête du centre de formation de l’OM.
Cette histoire du club semble parfois reléguée aux oubliettes. «Il y a quelque temps, je suis parti acheter des maillots pour mes petits enfants à la boutique du club. Naïvement, je demande si je ne peux pas avoir une réduction et on m’a répondu : «qui vous êtes, vous ?», raconte Roland Gransart
L’ancien entraîneur a gardé le lien avec les Minots. Ils s’échangent des messages sur Whatsapp. À 69 ans, il est devenu président de l'Amicale des anciens de l'OM. Il participe activement à l'organisation d'évènements comme la célébration de l'équipe de 1972 qui avait remporté le doublé Coupe/Championnat. Toujours sur le terrain, il est engagé dans le développement du "walking foot", en tant que responsable, joueur et entraîneur de la France, dans la catégorie + 60 ans.
Mourad Aerts, journaliste
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