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Le Bonheur Est Possible — NEWSLETTER 2 — Juin 2020

Convaincre ? Non. Expliquer


Fin janvier j'étais encore à m'interroger sur l'existence de ces « zones bleues » dont les habitants feraient preuve d'une longévité exceptionnelle (http://eepurl.com/gQ6lun). Les publications sur la vallée de la Hunza (https://leti.lt/uhkr) ont mobilisé mon attention avec une telle intensité que je viens à peine de terminer le récit captivant des pérégrinations de Jean Bowie Shor, en 1949 sur les traces de Marco Polo (https://leti.lt/fkij). Ceci pour enchaîner sur la lecture du magnifique roman Le Faucon errant (https://leti.lt/gt48) au seul motif que son auteur Jamil Ahmad (1933-2014) était témoin de cette époque. Je comprends maintenant la dépendance des historiens à des sujets qu'ils ont étudiés avec ferveur : ils remettent le couvert chaque fois qu'un nouvel indice fait son apparition…

L'actualité m'a arraché à cette rêverie nostalgique pour me ramener au
« présent » : la vague épidémique qui s'annonçait dans une cacophonie
« d'experts » méritait une recherche documentaire en phase avec le quotidien. Je me suis donc engagé dans un travail de synthèse de données entachées d'incertitudes, circulant à grand bruit. Plus que jamais, dans une telle situation d'urgence, les décideurs politiques ont agité le drapeau du « consensus scientifique » sans réaliser qu'aucun consensus ne répond à la question
« qu'est-ce qui est vrai ? » mais plutôt « qu'est-ce qu'on va leur dire ? »

L'attente d'un remède miracle et d'instructions précises pour enrayer la dissémination du SARS-CoV-2 a rendu inaudible une réflexion sur les moyens à la portée de chacun pour entretenir un système immunitaire protecteur. Il n'est pas anodin de savoir que 90% des décès sont survenus chez des patients âgés de plus de 65 ans, atteints de déficiences immunitaires, de maladies chroniques, ou sujets à des carences. Il y avait mieux à faire que leur prescrire du Paracétamol… Ma synthèse est dans l'article CoVID-19 : immunité, style de vie (https://leti.lt/yy8y). La menace pandémique m'obligeait donc à revenir sur la question de la longévité !

La danse des « experts »

Nous avons assisté à une tentative maladroite des décideurs politiques de masquer leur désarroi en appuyant leurs décisions sur des données chiffrées. Celles-ci étaient issues de modèles mathématiques qui ont depuis longtemps affiché leurs limites, ou encore attendues d'essais cliniques que ni l'urgence ni un comité d'éthique n'auraient permis de réaliser. Démonstration tragicomique de « l'essor des usages normatifs » (https://leti.lt/cy5z) ou plus généralement de « gouvernance par les nombres » : « résurgence du vieux rêve occidental d'une harmonie fondée sur le calcul » (Alain Supiot, 2015 https://leti.lt/kw5a).

Les médias grand public, sans oublier les réseaux sociaux, se sont emparés de discours faciles à traduire en logique classique binaire : vrai ou faux, “fact checking” versus « complotisme » etc. Un océan de certitudes s'est trouvé agité par des faiseurs d'opinion (pour la plupart des hommes !) déguisés en scientifiques. Leurs propositions étaient autant de démonstrations de l'effet Dunning-Kruger, ce biais cognitif selon lequel les moins qualifiés dans un domaine surestiment leur compétence (https://leti.lt/xwg5). Twitter, surtout, a servi de tout-à-l'égout de ce largage d'idioties.

Arguments d'autorité contre un matraquage d'opinions sous le couvert de la
« liberté d'expression »… Un public majoritairement passif admettait sans scepticisme que le parleur médiatisé (presque toujours un homme !) pouvait être à la fois expert de recherche en virologie, épidémiologie et santé publique, jonglant avec les statistiques et la modélisation numérique, quand ce n'est pas pratiquer la médecine !

Comme je l'ai souligné, les femmes étaient rarement invitées au bal de ceux qui savent, décident et rassurent… Leur boulot n'est-il-pas de « prendre
soin » ? Pendant ce temps, notre collectif d'associations d'usagers de services de maternité (https://ciane.net) avait mis en place une écoute téléphonique au service des femmes et des couples inquiets des conditions de suivi de grossesse, d’accouchement et de retour à la maison (https://leti.lt/05ht). Leur travail continue, loin des médias, avec toutes les actrices et acteurs du système de santé.

Doute, regret, curiosité

Il est temps de lire ou relire l'ouvrage de Marc Girard, Alertes grippales - comprendre et choisir (2009, en téléchargement contributif https://leti.lt/c5fw) qui osait poser cette question fondamentale : « Lorsqu’on est profane, est-il possible d’auditer le discours des experts ? » La croyance s'est substituée à la connaissance, la raison a cédé la place à l'émotion  — ou le texte à l'image comme le dit Régis Debray…

Pour ne pas tomber dans le piège des « faits alternatifs », nous avons besoin de comprendre que des émotions viennent en premier gouverner nos décisions en attirant notre attention : c'est le « système 1 » décrit par Olivier Houdé (https://leti.lt/45et). Ce mécanisme cognitif est plus rapide et moins coûteux que le « système 2 » qui fait intervenir des formes de raisonnement. Le système 1 nous permet bien sûr de réagir en situation d'urgence, mais dans les situations plus complexes nous aurions besoin de mettre en attente nos intuitions pour les soumettre au crible du raisonnement. Pour cela, il existe un « système 3 », d'inhibition cognitive, qui peut être entraîné dès l'enfance. Des chercheurs en psychologie cognitive l'ont même localisé dans le cerveau des apprenants. Mais ce système est lui aussi mis en œuvre par des émotions dont les trois principales sont le doute, le regret… et la curiosité ! (https://leti.lt/3mkb)

Dans une démarche critique, un auteur ne devrait pas chercher à convaincre mais plutôt expliquer dans les limites de sa compréhension du sujet. Sur mon site, en intervenant dans des commentaires ou des messages privés, les lecteurs peuvent prendre part à l'élaboration d'un savoir. Les nombreuses questions ouvertes dans mes articles sont un carburant du système 3 !

Un peu d'informatique

Documenter l'actualité revient à exercer un travail journalistique avec la même neutralité qu'un historien, mais un risque accru d'erreurs ou d'incohérences. Sur un espace web on a le choix entre empiler des communiqués — dont les lecteurs se lasseraient vite — et corriger chaque jour ce qu'on a rédigé la veille. C'est l'option que j'ai choisie, notamment pour l'article Coronavirus — discussion (https://leti.lt/obn3) qui est corrigé et complété chaque jour.

Mais comment donner accès à ce qui a été écrit précédemment, complété ou supprimé ? C'est possible, bien que peu pratique, dans un environnement collaboratif comme Wikipedia. Pour le rendre lisible sur mon site et ne mettre en lumière que les changements pertinents, j'ai développé un outil de suivi des modifications. Je vous invite à cliquer les boutons “Historique de cet article” et “Modifications récentes du site”. Le résultat paraît aller de soi, mais l'implémentation était un travail de très longue haleine (https://leti.lt/ae7x) !

Bernard Bel
https://LeBonheurEstPossible.org

 
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